20.2

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Strasbourg, 28 août 1940.

Une silhouette se frayait un passage entre les corps pressés des Strasbourgeois, passablement agacé. Telle une ombre d'obsidienne en ce tout début de journée, il traversait les rues de la ville sans prêter attention à ses habitants.

Vêtu de noir, le grand homme pestait dans sa barbe. Son voyage venait de prendre plusieurs jours de retard et cette idée lui restait en travers de la gorge. Il maudissait les contrôles qu'il avait subis et qui l'avaient retardé de la sorte. Cela ne resterait pas impuni, il s'en faisait le serment.

Il suivait à la lettre les instructions communiquées dans la missive. Doté d'un sens aigu de l'observation, il se repérait à merveille dans cette ville en tous points inconnue. Il croisa plusieurs camarades allemands qui le saluèrent dans un mouvement de tête brutal. L'un d'entre eux se risqua même à le héler afin de l'interroger sur les raisons de sa venue :

—Que venez-vous faire ici ? Vous ne pouvez pas circuler comme bon vous semble.

Incapable de faire appel à la moindre once de patience, il avait serré la mâchoire avant de persifler, furieusement :

—N'avez-vous pas mieux à faire qu'interroger les représentants du Führer ? Votre tâche ici est-elle aussi inutile pour que vous puissiez-vous le permettre ? La gendarmerie est à deux pas, passez votre chemin avant qu'il me vienne l'envie d'aller toucher deux mots à votre supérieur !

L'autre s'était décomposé avant de tourner les talons sans demander son reste. Cette course matinale avait pu reprendre.

Il finit par trouver l'objet de ses convoitises. Une grande bâtisse coincée entre deux autres du même type d'architecture. Un lieu déserté par leurs anciens propriétaires lorsque l'État français avait enjoint les Alsaciens à quitter leurs terres face à la menace allemande. Un petit joyau qui, d'ordinaire, aurait dû coûter une fortune mais que Draco avait pu acquérir sans nul mal. La pression du nom de son père avait amplement suffi.

Sans perdre un seul instant, il toqua trois coups à la porte. Plusieurs secondes s'écoulèrent et, déjà, il s'impatienta. Il s'apprêtait à reproduire son geste lorsque la porte s'ouvrit devant lui. Une silhouette de petite taille se dessina face à lui et il ne put ignorer le choc qui le faucha. Cet homme qui se tenait face à lui, c'était... Non, cela ne pouvait être vrai.

Merde, ce sont ses yeux ! Ce sont exactement les mêmes !

—Oui ? s'enquit le garçon, tentant visiblement d'emprunter un ton dégagé.

Le plus âgé le toisait avec hauteur sans prononcer un mot. Ainsi donc cela était possible. Il chassa le trouble affreux que le jeune homme produisait en son sein pour dire, aussi froidement qu'imaginable :

—Harry Potter, c'est exact ?

—Que lui voulez-vous, à Harry Potter ? s'enquit l'intéressé, immédiatement sur la défensive.

Et quelle insolence ! Il est bien le fils de son père !

L'adulte eut un rictus méprisant, les mains jointes devant lui sans prêter attention à la vie qui poursuivait son cours à quelques mètres de là.

—Est-ce là une manière d'accueillir un invité ? Vos manières laissent à désirer, monsieur Potter.

—Si vous ne me dites pas tout de suite pourquoi vous êtes ici, je vais refermer cette porte et vous aurez toutes les raisons de critiquer mon éducation !

Il eut un soupir las, comme s'il s'adressait à un être aux capacités intellectuelles particulièrement affolantes. Toujours planté sur le pas de la porte, dévisageant Harry qui ne semblait comprendre la raison de cette visite, mais qui craignait le pire, il s'accorda le bénéfice du doute. Quelques instants pour admirer ce regard vert pur et la détermination farouche du juif. Après cela, il se décida enfin susurrer, portant une insistance particulière pour chaque syllabe :

—Mon nom est Severus Snape, j'ai fait un long chemin pour rendre visite à mon filleul, Draco Malfoy. Alors, je vous serai gré de me laisser entrer, Potter.



C'est vraiment une toute petite partie, la plus petite depuis le début, mais je ne me voyais pas couper la première partie avant. J'espère ne pas en avoir déçu certains, mais le segment précédent étant plus conséquent, je n'ai pas pu faire autrement :3

Au moins, il contient une belle révélation ! Severus Snape entre en scène, et pour un bon moment !

Kiss ~

Cueillir les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant