Strasbourg, 25 mars 1940.
Pour la première fois de son existence et même si elle n'osait l'affirmer, Hermione aurait préféré se tromper.
La guerre était arrivée, soudaine et féroce, menaçant directement l'Alsace et ses occupants. L'exact scénario des lugubres prévisions de la jeune femme s'était alors mis en place. Tout se déroulait sans aucun accroc pour les Allemands et elle priait en silence pour que cela cesse.
Des soldats avaient été mobilisés, des centaines et des centaines. Des hommes de l'âge d'Harry, vigoureux et pleins de vie, qui partaient à la mort sans un regard en arrière. Une génération qui portait avec eux les ambitions meurtries de leurs parents et qui s'en allaient où personne ne revenait.
Dehors, l'hiver avait du mal à laisser place au printemps, s'accrochant à chaque brin d'herbe que le soleil peinait à réchauffer de ses faibles rayons. Les marchands de journaux s'activaient dans les rues bien moins animées qu'à l'ordinaire. Hermione haïssait ce que l'Etat français tentait de faire avaler à la population alsacienne par le biais de ce « ramassis de balivernes », comme elle aimait nommer la presse hebdomadaire locale.
Des pages entières étaient consacrées au conflit qui faisait rage des kilomètres plus au nord. Un discours censé rassurer les moins téméraires, ceux que la guerre effrayait plus que tout et que l'on ne pouvait blâmer avec ne serait-ce qu'un peu de recul. De grands mots destinés à taire les angoisses et à créer un engouement totalement irraisonné. Comment pouvait-on souhaiter la mort d'innocents, quelque soit leur nationalité ? Comment pouvait-on encourager une telle infamie ?
La terreur se terrait en chacun, prenant diverses formes. Harry tentait, tant bien que mal, de masquer son affectation. Son visage se fermait de jour en jour, comme un ciel d'été que les nuages investissaient peu à peu et jusqu'à ce que l'orage n'éclate. Ron, quant à lui, ne cachait rien de ses émotions. Il maudissait ces putains d'Allemands et ne songeait plus à contredire les pensées d'Hermione. Cette dernière entretenait difficilement son humeur. Toujours plongée dans un livre, que celui-ci traite de médecine ou non, elle avait trouvé l'ultime remède à cette barbarie. S'en échapper et fuir la réalité pour une autre, bien meilleure.
Dès l'ouverture des hostilités, le gouvernement français avait évacué une grande part des Strasbourgeois. La ville avait été vidée de plus de cent mille habitants et arborait une bien triste façade. Hermione avait refusé de quitter sa terre natale tout comme son père dont l'attachement à sa région était indéfinissable. La tentation poussait encore bon nombre de résidents à quitter l'endroit où il vivait, dans le simple espoir de sauver leur peau. Il faisait face à une ville fantôme, un visage malheureux de Strasbourg privée de toute vie.
Ron s'était attardé plus que nécessaire et la joie de l'Alsacienne avait offert un contraste saisissant avec la morosité ambiante. Le rapprochement s'était fait subtilement et le rouquin avait subitement décidé de quitter la région, d'évacuer au milieu de tous les autres. Sa décision n'avait pas été discutée malgré la déception palpable d'Hermione. Il souhaitait rejoindre ses frères et elle respectait ce choix. Les adieux promettaient d'être douloureux, déchirants même.
Elle se dirigeait vers la chambre d'Harry, n'ayant pas le courage de braver Ron et son indifférence feinte à une heure aussi tardive. Elle remit alors cela au lendemain, jour du grand départ, afin de ne pas s'abaisser à le supplier de rester. Femme forte et de caractère, elle s'y refusait catégoriquement.
Elle s'arrêta devant la porte close, la gorge nouée et un nœud dans l'estomac. Son ami ne dormait pas encore, c'était chose certaine et c'était pourquoi elle se permettait de le déranger à un tel moment. Après un instant d'hésitation, juste suffisant pour lui permettre de rassembler ses idées, elle abattit fermement son poing fermé contre le bois dur. Une réponse étouffée suivit quelques instants de silence :
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Cueillir les étoiles
FanfictionLe 1 septembre 1939, le second conflit mondial éclate. Deux idéologies s'opposent et s'affrontent avec pour unique objectif l'anéantissement ennemi. Quelques mois seulement après le début des combats, la France accuse une cuisante défaite. L'Alsace...