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Munich, 9 octobre 1940.

Le repas tirait sur sa fin. Les enfants avaient quitté la longue table pour s'adonner à leurs jeux, lassés du sérieux qu'on leur avait imposé. Les adultes demeuraient attablés, certains fumaient, d'autres profitaient de la tiédeur de cette après-midi tranquille. Les conversations se faisaient de plus en plus rares, et les Malfoy pourraient bientôt profiter de leur manoir, débarrassés des invités du jour.

Lucius avait organisé ce rassemblement avec la rigueur qui le caractérisait. Narcissa y avait grandement contribué, s'attelant au dressage de la table, au choix des mets et de tous les détails qui couronneraient ce repas de réussite. Son bon goût avait plu et séduit les grands aristocrates allemands conviés en l'occasion de cet événement mondain.

Les Malfoy pouvaient se féliciter, chacun garderait en mémoire ce que cette famille richissime et puissance pouvait témoigner de meilleur dans ce jeu où l'hypocrisie était maîtresse. Narcissa se fondait à merveille dans ce décor factice, tenant compagnie à cette bourgeoisie bien pensante, leur faisait la conversation avec beaucoup d'esprit. Lucius connaissait suffisamment bien sa femme pour l'abandonner à ces charognards sans qu'elle ne se laisse dévorer. Derrière son allure délicate et le raffinement de sa posture se cachaient de la ruse et une habilité hors pair. L'aristocrate avait gagné, depuis bien longtemps déjà, sa place au sein de cet univers particulier où le soin des apparences était primordial, tout comme la vigilance constante. Un univers de femmes dans lequel elle excellait.

Narcissa observait, du coin de l'œil, les enfants s'amuser dans le jardin. Leurs rires la berçaient, lui rappelant l'époque révolue où Draco n'était qu'un môme. Moins espiègles que ceux qui jouaient à cette heure, alors que la guerre faisait rage partout ailleurs, plus réfléchi aussi. Un petit garçon qui manquait terriblement à son cœur de mère.

Elle but une gorgée de thé, rejetant d'un revers de main ces sombres pensées. À quelques mètres se tenait Pansy et une de ses amies. Les jeunes femmes murmuraient des cachotteries à l'oreille de l'autre et Narcissa ne sut estimer si ce comportement l'attendrissait ou l'agaçait prodigieusement. La fiancée de son fils tenait pourtant à faire bonne figure et s'était montrée exemplaire tout au long du repas.

Finalement, elle débarrassa quelques couverts sur la table au départ des autres convives. À contre cœur, bien-sûr, la femme pouvait se l'assurer d'un seul coup d'œil, Pansy n'était guère habituée à prêter main forte aux domestiques, elle s'y répugnait même. Une enfant gâtée et capricieuse qui, pendant longtemps, avait semblé si bien assortie au jeune Draco.

—Ce repas a-t-il été à votre goût ? finit par demander Narcissa, d'un air détaché.

—Absolument merveilleux, Madame Malfoy ! La réception était parfaite, je suis certaine que c'est la pensée de tout le monde.

—Ne soyez pas si flatteuse.

—Je suis sincère, assura la jeune bourgeoise. J'aimerais apprendre à organiser de tels événements. Ne pensez-vous pas que Draco en serait heureux ?

Un léger sourire fleurit aux lèvres de Narcissa. L'enjouement de Pansy se renouvelait et son aînée ne savait si elle devrait l'encourager, s'en sentir flattée, ou s'en exaspérer. Dans sa robe vert vif, la jeune femme attirait tous les regards et elle ne manquait jamais de s'en vanter. Un besoin viscéral de plaire, de séduire, qui avait de quoi irriter.

—C'est une qualité que Lucius apprécie, j'imagine qu'il en est de même pour son héritier, releva la belle quarantenaire.

—Accepteriez-vous de m'apprendre ce que vous savez ?

Cueillir les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant