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Belfort, 2 octobre 1940.

Un mois venait de s'écouler.

Plus d'une trentaine de jours envolée, partie en fumée en un claquement de doigts. Harry n'en revenait toujours pas.

Il avait rendu visite à Hermione quelques jours plus tôt, s'assurant qu'elle ne manquait de rien et qu'elle survivait sans trop de difficultés. La réponse s'était soldée par l'affirmative, sans grand étonnement.

Blaise se portait mieux. Il était même presque entièrement rétabli et ne gardait que quelques séquelles de ses terribles blessures. Il avait cependant avoué s'ennuyer ferme, cloîtré comme il l'était dans la maison. Il n'était pas question pour lui de mettre le nez dehors, le risque se révélait trop important pour être pris. Il songeait donc à trouver une occupation, ou une solution à cet exil des plus pénibles.

Harry s'était donc fait à ce nouveau lieu de vie. Il s'acclimatait doucement aux conséquences et à l'omniprésence de Draco à ses côtés. La tentation incarnée s'endormait à quelques mètres seulement, lui considérant une plate et douloureuse indifférence. Les deux êtres vivaient sans s'attarder sur le devenir de l'autre. Sans savoir qu'ils souffraient autant le premier que le second de cette ignorance créée de toute pièce.

Le juif avait traqué la trace de Ron. Pour se faire, il avait cherché les visages de ceux qui se dressaient contre l'ennemi, ces résistants de la première heure résidant à Belfort. La discrétion dont ils faisaient preuve les rendait presque introuvables pour un étranger des lieux. Les prémices d'une organisation secrète qui agissait dans le plus grand anonymat et avec une telle efficacité qu'elle faisait trembler l'ennemi en personne. L'ennemi qui ne mesurait pas encore le danger de ces actes isolés qui prendraient de l'ampleur jour après jour, mois après mois. Jusqu'à sonner le glas du Reich et de son étau de terreur sur la majeure partie de l'Europe.

Les recherches d'Harry s'étaient donc révélées inefficaces, au grand désespoir du concerné. Il avait dû annoncer la triste nouvelle à Hermione qui avait masqué au mieux sa déception. Elle ne doutait pas de la persévérance de son ami, il ferait tout pour retrouver le rouquin.

Ici aussi, la guerre ravageait les corps et les esprits. L'abattement de certains inspirait la révolte aux autres. Les restrictions se mettaient en place tandis que la Gestapo allemande envahissait les rues pour insuffler un vent de terreur.

Harry s'invitait au cœur de Belfort, dans ses ruelles et dans ses larges places surmontées des fortifications, au contact de cette population brimée. Tout était à la fois semblable et diamétralement différent de Strasbourg. Entre les territoires annexés et les territoires libres. Le jeune homme songea qu'il existait une zone encore libre sur laquelle Pétain mettait en place un gouvernement antisémite prêt à collaborer avec l'ennemi d'hier. Ce qui serait bientôt un pouvoir abusif et autoritaire. Les murmures dans les bars le lui avaient appris cela. La France se paraît d'un tout nouveau visage.

La veille, l'école s'était emplie de monde. Plus d'une centaine de jeunes élèves qui foulaient le sol et qui traversaient les couloirs pour s'y perdre, le plus souvent. Des petites têtes curieuses desquelles Harry et Draco se cachaient, ils fuyaient l'arrivée de ces écoliers bruyants et dont l'indiscipline ne tarderait pas à être redressée par l'autorité incontestée de Severus.

Finalement, le médecin fut convoqué chez le directeur de l'établissement en fin de journée. La majeure partie des enfants avaient quitté les bancs de l'école, et l'autre partie, interne, avait pour ordre de ne pas sortir le nez de leurs chambres avant l'annonce du dîner. Ce fut l'esprit tranquille que le jeune homme se dirigea vers le bureau du sévère parrain de Draco.

Cueillir les étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant