Chapitre 56 : S'aérer la tête.
Le lendemain de la discussion entre Lenie et moi, je me sentais à la fois légère et troublée. Nous n'avions pas reparlé de cette conversation où nos sentiments étaient ressortis, et je n'étais même pas sûre de vouloir le faire. Lenie ne semblait pas mal à l'aise pour autant, elle avait retrouvé sa spontanéité habituelle, comme si la veille ne pesait pas trop sur ses épaules. C'était moi qui ressentais encore cette pression. Ce doute.
Le matin, l'équipe se réunissait pour un entraînement léger, une sorte de préparation physique sans trop forcer, car nous devions économiser nos forces pour le match décisif du lendemain. La tension était palpable chez tout le monde, mais pas nécessairement à cause des sentiments amoureux qui flottaient dans l'air. Non, c'était l'excitation du tournoi qui grandissait, l'envie de prouver que notre équipe méritait de se qualifier.
Le terrain extérieur était baigné de lumière. Le soleil tapait fort, et les gouttes de sueur roulaient déjà sur nos fronts avant même que l'échauffement n'ait vraiment commencé. Djebril était dans son élément, toujours le premier à motiver les autres à se donner à fond, même lorsqu'il s'agissait d'une simple préparation. C'est lui qui criait les encouragements, qui s'assurait que personne ne lâche prise.
« Allez, on fait un dernier tour de terrain ! C'est demain qu'on doit tout donner, pas aujourd'hui. On garde des forces, mais on ne relâche pas la concentration ! » cria-t-il, sa voix résonnant dans tout le stade.
Margot, Candice, Axel et Lenie semblaient absorbés dans l'entraînement, chacun à sa manière. Pierre, lui, avait pris sa place habituelle sur un banc avec sa caméra, filmant discrètement nos efforts et nos rires. Cela me faisait sourire de le voir ainsi, toujours en retrait, mais si impliqué à sa façon.
Lenie et moi échangeâmes quelques regards, quelques sourires. Nous étions redevenues presque comme avant, un peu plus proches, mais quelque chose avait changé. C'était comme si la légèreté de notre relation d'autrefois avait laissé place à quelque chose de plus profond, de plus fragile aussi.
L'entraînement se termina plus tôt que prévu. Nous savions tous que le repos était essentiel avant le grand jour. Pourtant, après avoir pris une douche rapide, j'ai ressenti un besoin irrésistible de m'éloigner un peu du groupe. Sans en dire trop, j'ai attrapé mon ballon de basket et je suis retournée sur le terrain, désert à cette heure-là. Les autres discutaient encore dans les vestiaires, préparant la suite de la journée, mais moi, j'avais besoin de ce moment seule, avec mes pensées.
Dribbler. Faire rebondir ce ballon contre le sol était la seule chose qui me ramenait à l'instant présent, loin de toutes les questions qui tourbillonnaient dans ma tête. C'était une échappatoire, un moment où je pouvais laisser mes mains travailler mécaniquement, pendant que mon esprit essayait de remettre de l'ordre dans tout ce que je ressentais.
Lenie.
Je me surprenais à penser à elle constamment, à me demander ce qui se passait dans sa tête. Depuis notre rapprochement, je savais qu'elle était perturbée. Mais comment avancer, alors qu'elle était toujours avec Marie Maude ? Je ne voulais pas être celle qui venait compliquer les choses. Je l'avais déjà blessée une première fois, et l'idée de la blesser à nouveau m'effrayait.
Au bout d'un moment, je l'entendis arriver. Les bruits de ses pas étaient légers, mais je les reconnaissais entre mille. Margot.
« T'avais besoin d'être seule ? » demanda-t-elle en s'asseyant sur le banc, son regard posé sur moi.
Je lui fis un signe de tête, reprenant ma respiration après une série de paniers.
« Un peu, ouais. Ça fait du bien de s'aérer la tête avant demain. »
Margot me regardait d'un air pensif, les sourcils légèrement froncés. Elle me connaissait mieux que personne, et elle voyait clair dans mon jeu. Elle savait que ce n'était pas le tournoi qui me tourmentait.
« Tu penses encore à Lenie, n'est-ce pas ? »
Je m'arrêtai, laissant le ballon rouler doucement jusqu'à mes pieds. Margot avait cette capacité de lire en moi, et je savais qu'il ne servait à rien de nier. Je me suis assise à côté d'elle, laissant mes épaules s'affaisser sous le poids des émotions que je gardais pour moi.
« Je sais pas quoi faire, Margot. Hier, on a parlé, mais ça n'a fait que compliquer les choses dans ma tête. Elle est encore avec Marie Maude, et même si elle a des sentiments pour moi, je... »
Je ne savais pas comment finir ma phrase. Tout était si confus.
Margot me fixa avec cette intensité qu'elle savait utiliser à la perfection.
« Helena, tu as toujours été honnête avec toi-même, mais là, tu te retiens. Tu l'aimes, et elle t'aime probablement aussi. Alors pourquoi tu attends encore ? »
Je soupirai, le regard perdu sur le terrain désert devant nous.
« Parce que je l'ai déjà perdue une fois, Margot. Et si ça recommence, je sais pas si je m'en remettrai. »
Margot prit un moment avant de répondre. Elle savait que ses mots devaient être choisis avec soin.
« Écoute, je comprends que tu aies peur. Mais tu ne peux pas rester bloquée dans cette peur. Lenie est ici, maintenant, avec toi. Si tu ne fais rien, tu risques de la perdre à nouveau, mais cette fois pour de bon. »
Je hochai la tête, incapable de formuler une réponse. Margot avait raison, bien sûr. Comme toujours. Mais ça n'enlevait rien à l'angoisse qui me rongeait de l'intérieur.
« Et puis, » ajouta-t-elle, « tu sais, tu n'as pas besoin de faire tout d'un coup. Prends ton temps, mais sois honnête avec elle. C'est tout ce qu'elle attend de toi. »
Le silence s'installa entre nous, mais c'était un silence réconfortant. Margot avait cette manière de me calmer, de me ramener à moi-même. Elle était mon ancre, celle qui me rappelait toujours qui j'étais au fond.
Après un moment, nous décidâmes de retourner avec les autres. Djebril, Candice, Axel, et Lenie étaient en train de rigoler, assis sur l'herbe près du terrain. Pierre filmait encore, capturant ces moments de complicité avant que la pression du tournoi ne nous rattrape.
Quand Lenie croisa mon regard, elle me sourit. Un sourire timide, mais sincère, comme si elle savait que j'avais eu besoin de ce moment de réflexion.
Je m'assis à côté d'elle, tandis que Pierre continuait de parler à sa caméra, documentant cette étrange journée où rien ne se passait, mais où tant de choses bougeaient en nous.
Lenie ne dit rien, mais elle se rapprocha légèrement, laissant nos épaules se frôler. Je sentis son regard sur moi, et je sus, à cet instant précis, que peu importe ce qui se passerait demain, tout changerait entre nous. Pour le meilleur ou pour le pire.
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Ce que nous sommes.
FanfictionHello, nouvelle histoire Helenie dans un autre univers. Elle se retrouve en secondaire (Lycée pour les Français je pense) Ont du coup entre 16 et 18-19 ans. Extrait : Bang, un seul son, pas de cri, pas de traces de freinage, rien, juste se bang, u...