Chapitre 77 : L'Étreinte de la Victoire

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Chapitre 77 : L'Étreinte de la Victoire


La salle résonnait des cris d'encouragement et du claquement des chaussures sur le parquet. C'était les quarts de finale, un match décisif pour lequel nous avions tous tant travaillé. Les points étaient serrés, et chaque seconde comptait. Mon esprit s'était verrouillé sur une pensée simple : ne pas lâcher. Je pouvais sentir la tension dans mes muscles, l'urgence dans chaque respiration que je prenais. Mes yeux cherchaient un repère familier : Lenie.

Elle courait, concentrée, l'expression intense, ses traits marqués par la détermination. Même sous la pression, elle arrivait à garder ce calme et cette force qui me fascinaient tant. Il n'y avait pas de doute : elle était dans son élément. Elle avait toujours cette capacité à être à la fois concentrée et fluide, déterminée mais gracieuse, et voir cela de si près me faisait battre le cœur plus fort que les applaudissements autour de nous.

Le ballon me revint dans un échange rapide. Je pivotai pour me donner de l'espace, et sans même réfléchir, je lançai une passe directe à Lenie. Elle réceptionna le ballon avec agilité, et d'un geste parfaitement calculé, elle fonça vers le panier. Le public retint son souffle, et mes yeux ne quittaient pas une seconde la trajectoire du ballon qui filait droit dans l'arceau. Un silence suspendu s'installa avant que la salle n'explose en applaudissements et en cris de victoire. Nous venions de reprendre l'avantage.

D'un pas rapide, je me suis retrouvée face à Lenie, prise par l'excitation du moment. Mon cœur battait plus fort encore, comme si chaque battement amplifiait l'intensité de ce que je ressentais. Je n'ai pas réfléchi ; un besoin incontrôlable d'être proche d'elle me poussait vers elle. Je la serrai dans mes bras, un geste spontané, une accolade un peu plus intense que je ne l'aurais voulu. Mais en cet instant, tout cela semblait secondaire.

Son corps contre le mien, je pouvais sentir la chaleur de son souffle près de mon cou. Ce n'était pas un simple geste d'encouragement. Cette proximité, cet instant, portait quelque chose de plus fort. Une sorte d'étreinte silencieuse, qui n'avait rien à voir avec la victoire sportive. Je crois qu'aucune de nous deux n'avait anticipé cette réaction. Quand elle enroula doucement ses bras autour de moi, je sentis un frisson me parcourir, amplifié par les murmures discrets des autres autour de nous.

Quand nos regards se croisèrent, il n'y avait plus que nous deux, comme si la foule, le bruit et les projecteurs avaient disparu. Ses yeux étaient troublés, presque étonnés, mais un sourire discret se dessinait sur ses lèvres. Ce sourire timide me disait tout, et je savais que je rougissais, bien consciente que nous avions franchi une ligne invisible. Ce moment était un aveu en lui-même, mais nous étions entourées.

Un léger silence s'installa autour de nous avant que nos coéquipiers ne se précipitent à leur tour vers Lenie pour la féliciter. Cela me força à desserrer mon étreinte, et je fis un pas en arrière. Margot, qui nous regardait d'un peu plus loin, arborait un sourire en coin, comme si elle avait tout compris, comme si elle savait que ce n'était pas un simple geste de victoire. Autour de nous, d'autres échangèrent des regards, mi-surpris, mi-amusés, des sourires discrets se dessinant sur leurs visages.

Depuis des mois, je savais que mes amis avaient remarqué ce qui se passait. Ils savaient tous ce que je ressentais pour Lenie, et je voyais dans leurs expressions qu'ils n'avaient jamais douté que quelque chose finirait par éclater entre nous. Peut-être qu'ils avaient eu raison de nous laisser tranquilles, de nous permettre de retrouver notre rythme sans se mêler de nos affaires. Cela m'allait bien ainsi. Je n'avais pas besoin de plus de pression.

Lenie me lança un regard fugace, mi-gênée, mi-complice, et je lui rendis un sourire un peu maladroit. Je sentais encore la chaleur de nos étreintes sur mes épaules, et je dus me forcer à me recentrer sur le match. Mais une part de moi continuait de vagabonder dans cet instant, dans cette fraction de seconde où nous nous étions dévoilées, au moins l'une pour l'autre.

Le match reprit, et malgré la victoire presque assurée, chaque mouvement me paraissait plus léger. Une sorte de soulagement flottait autour de nous, un frémissement palpable. Chaque fois que nos regards se croisaient, je sentais un éclat de lumière, comme si quelque chose de fragile et de précieux s'était allumé entre nous.

Lorsque le coup de sifflet final retentit, la salle explosa en cris de joie et en acclamations. Nous avions gagné, et pourtant, je restais en retrait, un peu en retrait des autres, perdue dans mes pensées. Les félicitations fusaient de toute part, mais je ne prêtais attention à rien d'autre que Lenie. Et elle semblait elle aussi troublée, comme si l'intensité de l'instant avait laissé une trace, une marque profonde.

Elle s'approcha finalement de moi, son sourire timide illuminant son visage malgré l'agitation. Elle se pencha légèrement vers moi, ses paroles à peine audibles au milieu du tumulte.

« Merci... pour tout à l'heure. » Sa voix était douce, teintée d'une reconnaissance que je n'avais pas anticipée.

Un sourire nerveux monta à mes lèvres. J'aurais voulu dire tellement de choses, mais j'étais paralysée. Le monde autour de nous n'était plus qu'un flou indistinct, et j'espérais que ce simple hochement de tête serait suffisant pour le moment.

Nos amis, cependant, semblaient bien plus curieux que discrets. Margot s'approcha de moi avec un sourire en coin, ses yeux pétillant de malice.

« Alors, c'est officiel, maintenant ? » souffla-t-elle à voix basse, avant de me donner une tape amicale dans le dos.

Je secouai la tête en riant, faussement gênée, mais un peu soulagée de savoir que Margot, au moins, avait toujours été là pour me soutenir. Et dans son regard, je voyais qu'elle savait. Elle savait tout ce que je ressentais pour Lenie, probablement bien plus que ce que j'avais pu lui confier.

Le reste de l'équipe nous rejoignit dans les vestiaires pour fêter la victoire, et l'ambiance était à la fête. Mais même au milieu de cette effervescence, mon esprit restait accroché à ce moment partagé avec Lenie. Comme si cet instant, ce câlin échappé, avait été une confession silencieuse que nous ne pouvions plus effacer. Un aveu fugace, mais bien réel.

Lenie et moi échangeâmes un dernier regard complice avant de quitter la salle. Nos mains se frôlèrent brièvement alors que nous marchions, et je ressentis une nouvelle vague de chaleur. Ce frôlement semblait dire plus que tous les mots du monde. Une promesse silencieuse, presque rassurante. Peu importait ce que les autres savaient ou pensaient. Ce que nous avions décidé, c'était de le garder pour nous, de laisser cette relation évoluer à son propre rythme.

Au fond de moi, je savais que tout cela ne resterait pas éternellement caché, mais pour l'instant, c'était suffisant. J'étais prête à attendre, à savourer ces instants discrets, à l'abri des regards. Car pour moi, ces regards, ces gestes partagés, étaient tout ce dont j'avais besoin.

En marchant à ses côtés, un sourire complice aux lèvres, je réalisais que ce chemin serait peut-être plus complexe que ce que j'avais imaginé. Mais pour la première fois, j'étais prête à l'affronter. 

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