Chapitre 86 : La final

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Chapitre 86 : La final

L'ambiance de la finale est à son comble, chaque détail semble exacerbé par la tension accumulée. Je me réveille tôt, bien avant l'alarme, incapable de rester allongée tant mon esprit est déjà sur le terrain. Ce match, c'est bien plus qu'une simple rencontre sportive. Pour moi, pour l'équipe, c'est la consécration d'une année de travail acharné. Et dans un coin de ma tête, la dispute de la veille avec Lenie reste en suspens. Elle m'a à peine regardée à la fin de l'entraînement, et le souvenir de cette story avec ses amies me reste en travers de la gorge. Une partie de moi a envie de la confronter, mais aujourd'hui, ce n'est ni l'endroit ni le moment.

J'avale un rapide petit-déjeuner, me forçant à manger malgré le nœud qui se serre dans mon estomac. La tension est palpable quand j'arrive au lieu de rendez-vous. Tout le monde est là, chacun dans son coin, vérifiant son sac, les écouteurs vissés aux oreilles, comme pour s'isoler du monde extérieur. Je croise le regard de Lenie un instant, et même si aucune de nous ne parle, je sens cette distance entre nous. Mais je me refuse de laisser cela troubler mon jeu aujourd'hui. Je dois rester concentrée.

Le trajet jusqu'à la salle de sport se passe dans un silence quasi religieux. Seuls quelques échanges polis émergent ici et là, mais je sens que chaque joueur est enfermé dans sa bulle. Axel est assis devant, jetant des coups d'œil nerveux par la fenêtre. Candice, à côté de moi, me lance un regard complice et me serre brièvement la main. Ça fait du bien d'avoir ce soutien. Elle sait que quelque chose cloche entre Lenie et moi, mais elle n'a pas cherché à me questionner. C'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai toujours pu compter sur elle, depuis presque un an.

Arrivés dans le vestiaire, je prends une profonde inspiration en enfilant mon maillot, comme pour chasser mes doutes et recentrer mes pensées sur ce match. Les voix commencent à se mêler, chacun encourageant l'autre, des tapes sur les épaules pour se donner du courage. Lenie reste un peu à l'écart, mais nos regards se croisent, et j'essaie de lui sourire malgré tout. Elle baisse les yeux, presque imperceptiblement. Je me dis qu'il faudra qu'on parle, mais pas maintenant. Pas avant la fin de cette finale.

Sur le terrain, l'énergie est électrique. Les gradins sont remplis, les applaudissements résonnent, et la pression monte d'un cran. Les premières minutes du match sont intenses, chaque équipe cherchant à prendre l'avantage. On joue avec toute notre énergie, enchaînant passes, tirs, et contres avec une précision millimétrée. Mais malgré mes efforts pour rester concentrée, l'ombre de la dispute avec Lenie continue de me hanter. Chaque fois que je la vois courir vers le panier ou défendre, je ressens une étrange tension, comme si quelque chose nous séparait.

Notre équipe prend un léger retard, et je sens l'impatience dans les regards de mes coéquipiers. Ils me regardent, et je sais qu'ils comptent sur moi pour renverser la situation. Je rassemble toute mon énergie, criant des encouragements et essayant de redonner confiance à tout le monde. À chaque pause, je rassemble l'équipe autour de moi, leur rappelant pourquoi nous sommes ici et ce que nous avons accompli pour en arriver là.

Au troisième quart-temps, nous commençons à revenir. Notre défense se resserre, et l'attaque devient plus percutante. Lenie et moi échangeons enfin quelques passes décisives, et malgré nos différends, la complicité que nous avons sur le terrain refait surface. C'est comme si, pendant un instant, tout le reste disparaissait. Nos regards se croisent brièvement, et dans ce silence complice, je retrouve une partie de ce que nous avions mis de côté. Un sourire se dessine sur mes lèvres, et pour la première fois de la journée, je sens l'énergie circuler de nouveau entre nous.

La fin du match approche, et les points s'enchaînent, rapprochant les deux équipes. L'ambiance dans la salle est à couper le souffle ; chaque mouvement, chaque dribble, chaque passe devient crucial. Alors que le chrono affiche les dernières secondes, nous sommes à égalité. Le silence se fait dans les gradins, chaque spectateur suspendu aux mouvements de l'équipe. L'adrénaline parcourt mes veines ; je me lance dans une ultime tentative, franchissant la défense adverse, et je passe le ballon à Lenie, qui se trouve en position idéale. Elle hésite une fraction de seconde, et pendant ce laps de temps, je retiens mon souffle. Puis elle lance, et le ballon traverse le filet sans faute. Le public explose, et l'euphorie nous emporte.

Les applaudissements résonnent autour de nous tandis que l'équipe se regroupe dans une étreinte collective. La joie et le soulagement se mêlent, et je me tourne instinctivement vers Lenie. Elle me sourit enfin, et, sans même réfléchir, je la serre dans mes bras. Elle m'enlace en retour, et ce moment nous appartient, même au milieu de la foule et des acclamations. On a gagné, ensemble, malgré les tensions, malgré tout.

De retour au vestiaire, l'ambiance est à la fête. Les rires fusent, les bouteilles d'eau éclatent en une sorte de mini célébration, et je m'accorde enfin le luxe de relâcher la pression. Je croise à nouveau le regard de Lenie, et cette fois, un sourire complice passe entre nous. Dans la cohue, elle s'approche de moi discrètement et chuchote : « On peut parler après ? » Je hoche la tête, prête à mettre les choses au clair.

Après la remise des médailles, tout le monde est invité à fêter notre victoire, mais je décide de m'éclipser avec Lenie. On trouve un endroit tranquille à l'extérieur de la salle, loin des regards et des rires qui résonnent encore à l'intérieur. Le silence qui nous entoure est lourd de sens. Elle prend une profonde inspiration et se lance :

« Écoute, je sais que j'ai été dure avec toi... et que cette histoire de secret, ça commence à me peser. Mais je ne voulais pas te blesser. »

Je baisse les yeux un instant, réfléchissant à mes mots.« Je comprends, Lenie, vraiment. Mais j'ai besoin de temps pour certaines choses. Ce n'est pas que je veux te cacher, c'est juste... compliqué pour moi. »

Elle me regarde avec une intensité que je n'avais pas vue depuis longtemps. « Est-ce que ça vaut encore la peine d'attendre pour toi ? Ou tu préfères... qu'on arrête ? »

Sa question me prend de court. C'est à ce moment que je réalise à quel point elle compte pour moi. Oui, j'ai mes peurs, mes réticences, mais la perdre me semble inconcevable. Je lui attrape la main, entrelaçant nos doigts. « J'ai envie d'être avec toi, Lenie. On trouvera un moyen d'avancer ensemble, d'accord ? »

Elle acquiesce, et on reste là un moment, main dans la main, savourant ce silence apaisé, enfin débarrassé des non-dits.

Sur le chemin du retour, un sentiment de légèreté m'envahit. Pour la première fois depuis longtemps, j'ai l'impression d'avoir pris la bonne décision, d'avoir trouvé un équilibre entre mon cœur et ma raison. Et tandis que je rentre chez moi, épuisée mais heureuse, je me dis que cette victoire sur le terrain n'est rien à côté de celle que je viens de remporter pour moi-même et pour nous. 

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