Chapitre 85 : Atmosphère électrique

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Chapitre 85 : Atmosphère électrique

Ces derniers jours, les entraînements sont devenus intensifs, presque acharnés. L'équipe — composée de Candice, Margot, Axel, Djebril, Lenie et moi — commence à montrer des signes de fatigue, chacun ayant ses propres attentes et stress pour la finale. On sent que l'enjeu crée des étincelles ; des petits accrochages surgissent, tantôt pour un placement, tantôt pour un geste mal interprété. L'atmosphère est électrique, et je m'efforce de jouer mon rôle de leader pour maintenir tout le monde concentré, même si la fatigue et les frustrations pèsent lourdement sur mes épaules aussi.

Comme chaque soir, après l'entraînement, Lenie et moi restons sur le terrain une dizaine de minutes de plus. Ce sont des instants précieux où nous avons le terrain pour nous seules. Parfois, on se lance un défi de cinq points, et même si ces jeux restent amicaux, ils renforcent cette complicité sportive unique entre nous. Une fois la petite partie terminée, on s'assoit souvent sur le banc, côte à côte, profitant d'un moment de répit, de silence, et de proximité. On s'effleure les mains, nos épaules se touchent, et dans ces instants-là, le monde semble s'évanouir autour de nous. Mais ces brefs moments d'intimité sont rares, et la pression du quotidien nous rattrape rapidement. Il est rare que nous nous embrassions ici — ça arrive, mais ce n'est jamais calculé. Peut-être que cette réserve est un moyen de garder cet espace spécial entre nous, un endroit où nous restons avant tout coéquipières.

Plus tard dans la soirée, alors que je suis plongée dans mes révisions, j'échange quelques messages avec Lenie. Les tensions de ces derniers jours sont palpables même par écran interposé. Depuis notre dernière discussion, où je l'avais calmée en lui rappelant qu'on ne devait pas précipiter notre relation, elle semble plus distante. J'ai bien compris qu'elle avait été blessée par mon refus d'aller trop vite. Je sens sa frustration, même si elle ne dit rien, mais cette distance me pèse un peu. Elle n'a plus tenté de m'envoyer des sextos depuis, et bien que ce soit un soulagement en partie, je ressens aussi cette distance émotionnelle qui s'installe.

Et cette tension éclate ce soir. On finit par se disputer par messages, une querelle qui tourne vite autour de la frustration de Lenie de devoir toujours se cacher. « Ça commence à devenir pesant de devoir dissimuler ce qu'on vit à nos amis et à mes parents », m'écrit-elle. Elle m'accuse de trop vouloir tout contrôler, et ses mots me piquent. Elle me fait comprendre qu'elle ne supporte plus cette situation et qu'elle n'avait accepté cet arrangement que parce qu'elle était contente que je sois enfin prête à nous officialiser. Mais elle ajoute qu'elle n'aurait jamais pensé que cela durerait aussi longtemps. Je le prends mal et, agacée, je coupe court à la conversation en lui disant que cette discussion ne nous mènera nulle part ce soir.

Le lendemain matin, l'atmosphère est glaciale entre nous. Quand j'arrive devant l'école, je m'attends à la voir, comme d'habitude, mais elle ne m'attend pas. Elle est assise avec Clara, comme si elle tentait de se dérober à nos habitudes matinales. En rejoignant le groupe, nos amis commencent à poser des questions. Clara et Lenie esquivent, prétendant qu'elles travaillent sur un projet ensemble et qu'il est normal de se retrouver entre filles. Je ressens une pointe de colère. Cette réaction infantile de Lenie me touche bien plus que je ne le voudrais, et je vais m'installer derrière Candice et Pierre, essayant de calmer les pensées qui s'agitent dans ma tête.

Pour couronner le tout, Virginie, ma prof et ex, me retient à la fin du dernier cours. Alors que je m'apprête à rejoindre l'équipe pour l'entraînement, elle me rappelle en arrière, avec un sourire un peu trop insistant. Fatiguée et exaspérée, je soupire. J'observe Lenie quitter la classe sans un regard en arrière, ce qui me donne encore plus l'impression de m'enfoncer dans une spirale d'incompréhensions. Virginie, quant à elle, essaie de se montrer bienveillante, mais je perçois clairement son intention de s'immiscer dans ma vie. Et lorsque, dans un geste familier, elle pose la main sur mon poignet, une vague de souvenirs me submerge. Malgré moi, je sens mon cœur battre plus vite, probablement par nostalgie plus que par réel sentiment.

Quand j'arrive enfin sur le terrain pour le dernier entraînement avant la finale, je suis en proie à une tempête intérieure. Je repense à la manière dont Virginie m'a touchée, à notre relation passée, à tout ce que j'ai espéré pendant des mois après notre rupture. Bien que cela appartienne au passé, cette rencontre me laisse un arrière-goût amer et réveillé par d'anciens souvenirs que je croyais avoir enterrés. Je souffle un bon coup pour remettre mes idées en place. Ce match de demain est bien trop important pour que je laisse mes pensées me perturber davantage.

L'entraînement se passe dans un silence tendu. Lenie et moi échangeons à peine un regard, et même l'équipe semble ressentir cette tension. Mais en tant que capitaine, je rassemble tout le monde à la fin, leur rappelant l'importance de cette finale. C'est notre chance de décrocher le doublé, une victoire en coupe qui marquerait l'histoire de notre équipe. Je leur demande de bien se reposer, de prendre un bon petit-déjeuner et de se retrouver demain matin à neuf heures pour partir ensemble. Tout le monde acquiesce, même Lenie, qui part sans un mot ni un regard.

Une fois chez moi, après une douche bien méritée et un repas rapide, je m'installe pour revoir les tactiques de match. J'attends sans vraiment attendre, espérant malgré moi un message de Lenie. Lorsque finalement je prends mon téléphone, un peu exaspérée par le silence, je découvre une notification Instagram. Elle a posté une story. Curieuse et un peu irritée, j'ouvre l'application pour voir sa photo entourée de ses amies, souriante, comme si notre dispute n'avait jamais existé. C'est comme si elle m'envoyait un message indirect : elle peut continuer sans moi.

Je jette mon téléphone sur le canapé, frustrée, me sentant à la fois en colère et blessée. Tout ce que je voulais, c'était que cette finale se déroule bien, que nous soyons une équipe soudée. Mais maintenant, des émotions et des conflits que j'avais soigneusement enterrés remontent à la surface. Le poids de mon passé avec Virginie, les attentes de Lenie, et les enjeux de ce match important forment une tempête que j'ai du mal à contrôler.

Je prends une grande inspiration, me promettant de tout laisser sur le terrain demain. Peu importe mes pensées, mes regrets ou mes disputes, je sais que je devrai être présente pour l'équipe, pour Lenie, et pour moi-même. Demain, c'est le match le plus important de l'année, et je me dois de tout donner. 

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