Doute que les astres soient de flammes, doute que le soleil tourne, doute de la vérité même, mais jamais ne doute que je t'aime.
William Shakespeare, Hamlet
J'ai servi une salade César dans les deux assiettes posées sur la petite table en bois. Tout est prêt : le couvert, les serviettes, la nourriture, le pichet d'eau... Tout, sauf Matt. Il a fini de se doucher, mais n'est pas encore descendu. Alors, je m'installe tranquillement sur le canapé, en travers, appuyée sur les coudes et les pieds sur l'accoudoir opposé.
Je réfléchis. Si je pars avec eux, soit ces 30 guerriers dont Matt fait partie, je vais devoir me faire le plus discrète possible, me couper les cheveux et parler le moins possible. Puisque même si je n'ai pas une voix qui porte dans les aigues, elle n'est pas non plus aussi grave que celle d'un homme en âge. Et puis, mon physique risque de me trahir.
- Bonjour !
Je sursaute. J'étais tellement plongée dans mes pensées que je ne l'ai pas entendu descendre. Ça, il faudra que je le rectifie, ce n'est pas normal, il faut que je me concentre ; tout le temps.
- Enfin sorti.
- Comme tu le vois.
Il montre d'un geste furtif l'intégralité de son corps pour montrer sa présence.
- T'as mis ce T-shirt.
- Oui, exactement celui que tu as balancé par terre.
- Il était déjà par terre. Et en plein milieu, je te signale.
Il prend quelque chose sur la table que je ne peux pas voir et le mange tout en contournant le sofa sur lequel je suis avachie.
- Hé ! Je t'ai préparé le repas ET je t'ai attendu depuis tout ce temps et toi tu ne m'attends même pas !
- Ne fais pas ta tête indignée ! Dois-je te rappeler que c'est ton rôle de femme ?
Je le fixe durement. Je ne sais que trop bien que cela est une vérité, certes, mais une vérité injuste, minable et blessante.
- Faire à manger, comme toutes les tâches de cette maison. C'est ton rôle, et pas le mien, point barre, dit-il.
C'en est trop ! Je ne sais pas ce qu'il a, lui et sa mauvaise humeur, mais il m'agace fortement.
Tous les deux, nous n'avons jamais fonctionné comme les autres, où je faisais toutes les courses, la vaisselle, le dîner, le linge, le ménage... Et cetera. Et lui, sa vocation, soit en ce qui le concerne : guerrier. Et c'est tout ; tout ce qu'il est censé faire.
Nous avons toujours tout partagé. Il m'énerve !
- Et bien, tu sais quoi ? Puisque mon rôle est de m'occuper de toutes ces tâches ménagères, et toi de ne rien faire, j'en suis fatiguée. Je ne ferai plus rien, c'est ma décision. Si tu en as assez d'avoir des vêtements sales et rien dans l'assiette, je te conseille fortement de t'en charger toi-même, car je ne te serai plus d'aucune utilité sur ce genre de choses. J'ai un peu envie que ça change.
- Et si je refuse ?
- Tu n'as pas vraiment le choix, peut-être que en ce qui me concerne je ne fais plus rien, mais toi, rien ne t'oblige à faire quelque chose. Alors, tu décides, pour ton rendez-vous avec ton équipe de guerriers, dans deux jours, tu préfères sentir bon ou empester la sueur et la poussière ?
Il ne dit rien et semble peser le pour et le contre.
- Et si je t'obligeais à me laver mes affaires ? Il fronce les sourcils. Cela sonnait mieux dans ma tête.
VOUS LISEZ
Guerrière
Science Fiction2183, Westen : 2 751 habitants Cela fait maintenant un siècle qu'un virus a contaminé la majeur partie de l'espèce humaine, les mutant en créatures ignobles. Westen, ville entourée d'immenses murs la protégeant, est dirigée par un système sexiste et...