Guerrière

6. Une Visite Imprévue (part. 2)

J'entends un peu d'agitation à l'étage, sûrement Matt qui met la table. Je commence à monter les marches d'escaliers, lorsque j'arrive sur les dernières, je commence à parler tout en me dirigeant vers le salon.

- Matt ! Je voulais te demander, est-ce que tu pourrais m'apprendre de nouveaux coups ? Enfin, si tu es...

Je me stoppe net lorsque j'arrive dans le séjour. Matt s'y trouve, seulement, c'est en compagnie d'une jeune femme. Elle se tourne vers moi en faisant légèrement bouger ses cheveux d'un blond doré. Ses yeux bleus me regardent, surpris, puis une teinte de dégoût vient y transparaître.

Je me crispe intérieurement. Que dois-je faire ? Je ne sais pas qui est-elle et je ne suis pas dans une tenue convenable. Que va-t-elle penser ?

Matt se racle la gorge.

- Callie, je te présente Tery, ma sœur. Et Tery, voici Callie, mon... commence-t-il lorsqu'il est interrompu par cette jeune femme.

- Sa petite amie.

Elle regarde Matt avec tellement d'amour et d'admiration que cela en devient ridicule et assez gênant.

- Ancienne petite amie, répondit-il en insistant sur le premier mot.

Un silence vient peser sur nos épaules. Alors c'est elle cette 46ème conquête ? Elle n'est pas laide, au contraire, elle serait magnifique si visage n'exprimait ni l'orgueil, ni la convoitise. Mais malheureusement, ces traits ont l'air d'être encré en elle.

Elle fronce les sourcils, en tout en me regardant elle approuve une expression pensive. La panique commence à se faire ressentir au creux de mon ventre, elle me tord de plus en plus les entrailles.

- Pourquoi donc portes-tu cela ?

Une boule vient se former dans ma gorge, m'empêchant de répondre.

Je baisse les yeux sur ma tenue et découvre sans surprise mes vêtements de cuir et mes armes. Me contrôler devient difficile. Dire que la pression qu'exerce son regard jugeur sur moi me déstabilise serait un euphémisme.

- Il y a quelques jours c'était son anniversaire. Comme nous n'avons pas forcément les moyens de nous acheter de beaux cadeaux, elle a voulu essayer mes habits de combat.

Comprenant que Matt essaie de me sauver la peau, je rentre dans ce jeu.

- Oui, en effet. Je sais que c'est un choix bizarre et difficile à comprendre d'un point de vue extérieur, mais j'ai toujours voulu être aussi forte que Matt et c'est pourquoi j'ai voulu lui ressembler durant quelques minutes.

J'hausse les épaules et souris doucement à l'homme qui se tient devant moi, sur ma gauche. Callie nous regarde étrangement, j'espère qu'elle ne posera pas plus de questions. Mais surtout, j'espère qu'elle fait parti des nombreuses femmes naïves de cette ville.

Alors qu'elle allait ouvrir la bouche pour parler, Matt la devance te prend la parole.

- C'est ma petite sœur, et tu sais très bien que je ne sais résister au fait de faire plaisir à une personne que j'aime.

- C'est donc pour cela que tu n'as jamais rien fait pour moi ? Est-ce ta manière de me dire que tu ne m'aimes pas ?

- Callie, écoute-moi...

- Non, tout va bien. Je vais retourner dans mon logis et vous laisser entre fraternité.

Elle se retourne en faisant voler sa chevelure légèrement ondulée, et sort en claquant la porte.

Je reste figée sur place. Matt me regarde dans les yeux où une expression indéchiffrable s'y lit. Il s'approche de moi, je ne sais pas ce qu'il va faire. Cependant, j'ai grandement besoin d'évacuer tout ce stress, alors, je me jette dans ses bras. Durant de courts instants, il reste les mains le long du corps. Puis, comme se réveillant d'une transe, il encercle ma taille de ses robustes bras et niche sa tête au creux de mon cou. Il me serre fort contre lui en agrippant le tissu de mon haut.

J'ai l'impression que le temps s'est arrêté, qu'il tournoie sans jamais vouloir se poser. Il virevolte, nous vole et nous donne le temps d'accomplir nos rêves. La présence de Matt est tout ce qui compte pour moi à ce moment précis. J'aime le sentir près de moi, toujours à mes côtés quoi qu'il advienne. Tandis que de nombreux souvenirs m'assaillent, je serre Matt un peu plus fort contre mon corps si frêle comparé au sien. Je sais qu'il ne m'abandonnera pas, même dans les moments les plus complexes, de même que je ne le laisserai pas tomber. Nous avons dépassé plusieurs épreuves, toutes plus complexe les unes que les autres, et cela sans jamais se séparer. Ce n'est pas maintenant que cela va changer. Certes, Callie m'a vue dans cette posture qui déplaît fortement au Conseil, mais ce n'est pas pour cela qu'elle va nous dénoncer. Nous avons trouvé des arguments suffisants, je l'espère, mais le danger n'est pas non plus mince. Cependant, si je veux continuer à exercer ma passion, mon activité physique, je suis obligée de continuer à me cacher, et les risques seront toujours présents.

Je remercie le ciel de m'avoir donné une amitié, un frère, aussi proche et gentil à mes côtés. Toujours là, jusqu'à la fin de notre vie, nous resteront fidèle à cet amour inconditionnel qui subsiste et subsistera entre nous. Je ne sais si je dois aussi le remercier pour toutes les épreuves compliquées et douloureuses qu'il nous a fait subir, mais se sont grâce à elles que nous sommes ce que nous sommes à présent. Nous ne maîtrisons pas le destin, c'est lui qui nous maîtrise. Cependant, rien ne nous empêche de lui coincer des bâtons dans les roues pour modifier sa trajectoire. Nous ne contrôlons pas l'univers, mais il ne nous contrôle pas non plus. Chacun est libre de ses choix, de ses désirs, de ses rêves. Enfin, cela c'était avant que Le Conseil ne pose des règles qui me déplaisent de plus en plus, et de jour en jour. Moi qui le considérais mon notre Protecteur et comme notre gardien de la paix, je me rends compte aujourd'hui qu'il ne l'est pas du tout. Il nous a privé de nos droits, de notre libre-arbitre. Il nous a confiné entre quatre murs, nous empêchant de voir le monde. Il ne nous a pas appris à tous à pouvoir nous défendre contre ces Créatures, et cela pour nous garder sous leur coupe.