46. Un coeur au bord de l'explosion (part. 3)

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Mes lèvres embrassent lentement les siennes, goûtant enfin ces demies lunes si convoitées. Wyden me rend mon baiser. Ses lèvres sont douces et bougent avec une tendresse précieuse, comme s'il avait peur de m'abîmer. Ses doigts glissent sur la peau fine de mon cou et viennent se déposer au creux de ma mâchoire, caressant ma joue d'une main, s'encerclant un peu plus de l'autre. Et je sens mon souffle s'accélérer, mon cœur s'emballer un peu plus et le rouge incendier mon visage. Ma poitrine se soulève plus rapidement, diminuant en vain les palpitations frénétiques de mon cœur. Le souffle de Wyden s'est aussi accéléré. Mais j'ai peur qu'il s'en aille, lui aussi. De ne plus le revoir. Qu'il s'écarte de moi. Alors que j'enroule mon bras autour de ses épaules, je l'embrasse plus vigoureusement. Sans en attendre plus, Wyden s'enhardit et m'embrasse comme si sa vie en dépendait. Il m'embrasse comme si ce besoin vital le brûlait de l'intérieur. Ses lèvres, brûlantes, dansent éperdument avec les miennes. Une chaleur me faisant perdre la tête se répand dans mon cœur. Je bouillonne. Il me serre un peu plus contre lui et mon cœur se gonfle d'amour. Il est prêt à exploser. Choc. Tristesse. Colère. Perte. Trahison. Et maintenant... une sensation si agréable et enivrante. Dans un souffle d'abandon qui retient pourtant tant de sentiments, je caresse doucement et lentement ses lèvres des miennes. Puis, il s'écarte timidement. Ses sourcils se froncent et son indexe vient cueillir une larme qui avait roulé jusqu'à s'échouer dans mon cou. J'ai peur de croiser son regard, à nue. Et lorsque je redresse mes yeux, je lis dans les siens la même peur qui, alors, s'évanouit aussitôt.

Un sourire éclaire son visage, suivit d'un rire d'anxiété qui détend enfin tous nos muscles. Un rire qui vient apporter la meilleure conclusion, la meilleure transition. Il me regard, malicieux. Et je souris. Il recule un peu, plante ses pieds au sol et se redresse en me tendant une main.

- Tu as souri, s'exclame-t-il vainqueur.

J'accepte sa main en me laissant aller à un sourire encore engourdie par une chaleur langoureuse. Nos regards s'accrochent quelques secondes, puis, après une grande bouffée d'air, Wyden s'étire un peu la nuque. Je l'imite en chassant cette sensation étrange et endormie de mon corps. Je souffle, acceptant enfin de penser à ce qu'il vient de se passer, là, il y a quelques minutes, il y a quelques heures... Mon esprit divague, se représentant le général et les images associées. Mon co-équipier coupe court à mes pensées, orientant plutôt ma réflexion.

- N'ignore pas Matt, parle plutôt avec lui.

Silence, je regarde la plaine.

- Peut-être pas aujourd'hui, mais parlez. Sa manière d'agir envers toi ces dernières semaines ne correspondaient pas à quelqu'un qui voulait ta mort.

Je soupire. Peut-être bien que oui, peut-être bien que non. Je n'ai pas la tête à ça, mais je me force un peu.

- Je ne le connais pas comme toi, mais je ne pense pas que l'on puisse jouer la comédie à ce point, concue-t-il.

- Tu ne le connais pas. Il a des phases. Il est toujours traversé par des émotions fortes et marquées : amour, joie, tristesse, indifférence, haine... Il ne le montre pas toujours, il se contient, mais elles sont belles et bien là.

Je soupire, repensant à cette haine qui l'avait traversé durant notre chemin vers Lowick. A l'époque, je n'aurai jamais imaginé me trouver aussi loin de chez moi. Enfant, il passait si rapidement d'un excès de colère, au rire, aux pleurs. Une vraie petite boule de vie, excitée à l'idée de ressentir le monde qui l'entoure.

Wyden s'arrête de marcher. Je tends l'oreille. Un chuchotement. Mon visage se tourne à l'Ouest. Un buisson frémit. Quelques pas plus tard, j'aperçois deux hommes, très différents. Un petit homme en noir, d'une musculature importante pour son âge si l'on en juge par ses cheveux poivre et sel, tient un sac d'une main. Face à lui, un grand roux au visage impassible le regarde cordialement. Ses yeux perçants et professionnels attrapent les paroles sortant de la bouche du bras droit. Son uniforme m'est inconnu. Il ne ressemble nullement à ceux des guerriers ou des soldats de Lowick. Le style formel, pratique requiert cependant une certaine grâce. Ce dernier hoche la tête, attrape le sac et formule quelques phrases que je présume être une simple politesse. Je me demande d'où il vient. Peut-être d'une ville alentour ? Je ne sais pas. Wyden, d'un léger coup de coude, me fait signe. Nous n'allons pas rester spectateur. Lui aussi veut savoir ce qu'il en est. Qu'il y a-t-il dans ce sac ? Qui était-ce ? Et que fait Artenthus ici ?

GuerrièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant