47. Une courbure inattendue (part. 2)

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Je ne comprends pas sa réaction et visiblement Wyden non plus. Ma courte épée a cessé de bouger entre mes doigts, elle est figée, tout comme mon esprit. Tentant de garder contenance, mon co-équipier lui réponds, méprisant :

- Celui qui se trouve dans la boîte que vous avez volés à un laboratoire de Ew York.

Artenthus sourit de plus bel et cela me donne envie de lui envoyer une droite.

- Deux-mille-soixante-dix-neuf, cela ne vous dit rien ?

Toujours le regard hilare, le bras droit ne cache pas son étonnement.

- Je suis impressionné que vous ayez su comprendre quelle date se cachait derrière le code. Mais savez-vous seulement ce qu'elle représente ?

Je n'ai pas le temps de répondre quoi que ce soit que Wyden prend la parole.

- C'est la fin de l'Ancien Temps.

- Oh ! Vous avez su trouvez un ami avec un peu de culture, Theresy. Très bien, cela saura peut-être compenser vos propres lacunes.

Une rage sourde s'installe peu à peu en moi.

- Cependant, même si l'effort est là, cette date ne fait pas exactement référence à cela, non, mais à un vrai tournant dans notre Histoire. Et, il est bien dommage que vous ne connaissiez même pas cela, annonce-t-il sérieusement. Toutefois, cela n'est pas étonnant si vous croyez encore aux contes de fée et aux remèdes, ricane-t-il doucement.

Son attitude m'insupporte. Il ne comprend sûrement pas qu'il n'est pas en position de discuter ou de nous parler sur ce ton. Et puis, comment cela il n'y aurait pas de remède ? Bien-sûr que si, il y en a un, et c'est justement pour cela que nous sommes ici.

- Les remèdes n'existent pas ? Et bien dans ce cas, expliquez-nous pourquoi l'Aîné aurait envoyé une équipe d'une trentaine de guerriers expérimentés, leur général et son bras droit, vous, si loin de leur ville d'origine ?

L'homme me regarde comme l'on observerait une petite enfant qui refuse de boire sa soupe, d'un air contrit. Et cela me met encore plus en colère. Je sens le sang affluer dans mon visage et pulser dans mes tempes. Mes mains me démangent.

- Sérieusement ? Tu pensais réellement que s'il existait un remède Le Conseil n'aurait attendu que maintenant pour mener une expédition ? Et cela en comptant bien évidemment que cela fait plus de soixante années que ce remède serait à la merci de n'importe quel vagabond ou raz de marée. Je te rappelle dans quel état est cette ville.

Ce dernier secoue la tête.

- Depuis combien de temps l'Aîné a-t-il annoncé que son fils était malade ?

Je réfléchis. Certainement il y a près de deux mois maintenant. Le temps passe tellement vite, et pourtant lorsque je m'imagine là-bas, lors de cette grande réunion, j'ai l'impression que cela remonte à il y a plusieurs années.

- Si l'Aîné avait pu déterminer que son fils allait se transformer en créature, ne pensez-vous pas que c'est bien parce que la transformation avait commencé ? Sinon, il aurait simplement diagnostiqué une grippe. Et croyez-vous réellement qu'une transformation qui a déjà commencé pourrait être guérie plus de deux mois après ?

Je comprends bien tout cela, que rien ne tient la route, mais alors quoi ? S'il n'y a pas de remède, que sont-ils venus faire ici ? Je ne comprends plus. Je ne sais pas où il souhaite en venir.

- Alors pourquoi avoir envoyé autant de guerriers ici ? questionne Wyden, bien conscient que nous n'avons de toute façon plus aucune crédibilité si ce n'est peut-être concernant notre piège tendu au grand roux.

- A vous de me le dire, vous qui êtes entrés après nous dans la pièce éclairée du laboratoire et qui avez 'bien plus d'informations que je ne le pense', sourit-il

Cela ne répond nullement à sa question, et je sais qu'il ne nous dira rien de plus. Son ton fait trembler une corde sensible et déjà bien égratignée en moi. Je reflue la colère en moi, tentant de me calmer.

- Tu as beau dire que tu n'es plus une de ces femmes idiotes et naïves de Westen, tu ne me feras jamais penser le contraire, rit-il. Et, tu me le prouves encore une fois.

Je faux m'étouffer avec l'air que je venais d'inspirer. Je bouillonne. Trop de chamboulements, trop de phrases aux sonorités dénigrantes. Mes joues me brûlent rageusement. Cet homme est insupportable, s'il ne savait pas des choses dont j'ai besoin pour comprendre ce qu'il se passe, je l'aurai déjà embroché depuis longtemps. Et ça, il le sait très bien. Il sait que j'ai besoin de lui et que je ne peux pas me permettre de l'éliminer à cause de ses remarques condescendantes. Et cela m'énerve d'autant plus.

- Qu'êtes-vous venus chercher ? prononcé-je durement.

Il me sourit, narquois. Je ne supporte plus de voir sa figure face à moi.

- La petite fille veut obtenir des réponses on dirait, mime-t-il en se baissant un peu, les mains sur les genoux.

Je vois noir. Je n'entends plus que mon pouls prêt à exploser. Que ma respiration prête à s'emballer. Que mes muscles, qui me supplient, quémandant de se défouler sur lui. Derrière lui, Wyden a le visage fermé, légèrement agacé par la situation. Il ne veut pas que je bouge, je le sens. Que je m'énerve. Mais c'est trop tard. L'on m'a trop longtemps prise pour une petite chose fragile et idiote. Peut-être l'ai-je été, mais ce n'était qu'à cause d'eux et de leur 'éducation' qui trop sexiste. Et depuis, j'ai appris. J'ai appris l'Histoire j'ai appris à mieux me battre, j'ai appris à réfléchir différemment. Mais ça, il ne le sait probablement pas. Il pense certainement que je suis encore en vie si loin de chez moi, seulement grâce à mes co-équipiers. Puisqu'après tout, la seule place valable d'une femme c'est dans la cuisine.

D'un mouvement bien trop rapide pour lui, je me glisse dans son dos. Ma lame exerce une pression sur sa gorge. Suffisante pour laisser une goutte de sang perler lorsque ce dernier déglutit, trop faible pour qu'il ne soit gravement blessé. De mon autre main, j'attrape sa dague bien rangée dans son holster. Je la jette à Wyden qui l'attrape sans effort. 

- Je vais répéter calmement.

Je serre les dents, contrôlant ma prise afin de ne pas me laisser emporter.

GuerrièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant