Ania.

11 Avril 1912:Première partie.

La vision de mon oeil se retrouva anormalement floue ce matin,quand une stewardesse est entrée dans notre chambre pour nous dire de nous dépâcher si on ne voulait pas manquer le petit-déjeuner.Ma vision se rétablit et je découvrais ma cabine,encore intacte,prouvant que physiquement j'y étais,réellement.Les autres filles firent quelques pas dans la cabine avant d'aller s'habiller dans la petite pièce attenante,celle qui ne fait que quelques centimètres carrés.J'ai choisi une robe blanche où des fleurs de différentes nuances de roses,ressemblant à un croisement entre des paons et des lys,s'entremêlaient.Je me suis assise face à ma valise ouverte et sans réfléchir j'en ai tiré une liasse de papiers,il s'agissait de mon journal intime,que j'ai tôt fait de replonger dans cette valise avant de quitter cette chambre.

J'ai pu accéder à cette salle à manger de première classe tout en restant parfaitement invisible,inaudible,c'était magique.Mes amies et moi avions choisi une table proche de la baie vitrée,un coin tranquille où nous fichera la paix.Nous étions des silhouettes furtives de grandes filles minces et fières,passant devant les tables de nos ennemis sans nous transformer en mangeoires.Je me faisais une joie de dégusteer avec mes amies de si délicieuses pâtisseries.

-Je me demande si Brian et Tristan ne sont pas tapis dans l'ombre à nous attendre,ne pouvant accéder à notre classe,s'interrogea soudain Katty.

Je l'espérais aussi.Il me tardait déjà de le revoir.Il ne m'a jamais dit qu'il m'aimait,mais ma présence n'a pas l'air de lui déplaire.En tout cas,quand il me parlait,je ne me lassais pas d'entendre sa voix douce et pleine d'intelligence.

J'ai soudain eu envie de me lever,courir sans faire attention aux gens d'un milieu supérieur au mien,en criant partout que j'étais amoureuse,que j'étais amoureuse,que j'étais tombée amoureuse du garçon qui m'avait sauvé la vie.Je me suis simplement levée,je me suis essuyée la bouche avec une serviette et j'ai demandé à Katty de me suivre.J'ai croisé en chemin Mdame Spencergates qui faisait une petite visite avec le groupe d'amies de Clara Prodigua,qui nous souria en nous voyant arrivant.Je ne m'apercevais pas que je n'allais pas dans le bon sens,c'est katty qui m'a prise par la main pour me remettre dans la bonne direction.

Aussitôt après,nous vîmes ces garçons,mais pas ensemble hélàs!On est parti chacun de notre côté,espérant qu'on nous fichera la paix,espérant qu'on réussira à passer tous les obstacles pour s'échanger des roses,même si il n'y a pas de roses sur le paquebot.

-Dis-moi,Tristan,est-ce que tu me trouves jolie?

-Doucement,ma jolie,répondit-il avec un sourire qui lui fendait la bouche jusqu'aux oreilles,je ne te connais pas assez!

Il est drôle et il est fin,en plus.Il m'a emmené un peu plus loin sur un long travelling rempli de gens,et il a commencé à me parler de son enfance,de sa famille.Il passait la semaine dans une pension,et il les retrouvait tous le soir.

Tristan William était né le 6 janvier 1898.Il a une soeur de 21 ans,Stella,un frère de 20 ans qui a une très jolie copine,Georges,un frère de 18 ans,Douglas,une soeur de 14-15 ans,Dorothy,une soeur de 10 ans,Elizabeth,une soeur de huit ans,Constance,et le petit dernier,Thomas,4 ans.

Ses parents eurent encore deux autres enfants,morts en bas âge.Pour une fille qui n'a que deux soeurs,ça faisait quand même beaucoup.Hors de question que je me reproduise autant,moi.

Après avoir raconté à quel point sa famille formidable pouvait s'avérer énervante et envahissante,il a replongé son nez dans L'île mystérieuse de Jules Verne,sans absolument prêter garde au fait que je souhaitais absolument lui raconter mes propres malheurs.Tant mieux quelque part,parce que j'étais une inconnue et qu'il était indécent de me livrer ainsi.