Gersenda pour une fille

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Quand je me suis réveillée, Misha avaient les bras croisés juste au-dessus de moi, il avait dû attendre très longtemps que je me lève. En effet, Martin, lui, était déjà en train de déballer avec joie sans petit déjeuner dans du papier journal sur la table à côté. On a reculé une chaise, et je n'ai eu qu'à me déplacer dessus.

-Alors la marmotte ça va tu te souviens de moi?

-Bah évidemment que je me souviens c'est grâce à toi qu'on a passé cette porte quand même.

Il sourit, et me sort les réserves que lui et sa mère avaient gardé pour moi. J'ai l'impression d'être une princesse.

-Oh ça me rappelle les petits déjeuner du dimanche!

Il a repris son sérieux et nous a dit de vraiment manger en vitesse. Il nous a aussi glissé, faites en ce que vous voulez, qu'il n'était pas russe. Il est ukrainien.

-Tu es déjà allée à l'hôpital c'est ça?


-Oui c'est ça pourquoi?

-Hé bien ça c'est du luxe.

Si tu savais...C'était assez excitant blague à part de faire nos affaires pour ne pas savoir où aller ensuite. Intérieurement ça m'excite même assez.

-Au fait, dis-moi tu travailles dans une..maisonnée c'est ça?

-Oui ce sont des gens très bien, ce serait une autre lignée sur ce territoire...Tu n'existerais même pas.

-Ma mère , vous imaginez pas à quel point je suis rassurée à l'idée de la revoir.

-Mais dis-moi c'était pas trop dur pour toi de danser en pensant à elle.

-Oh tu sais, c'est aussi pour ça que je dansais et que je me concentrais, et que j'y arrivais bien..Bah oui on m'aurait virée sinon.

Donc nous sommes partis tous les trois pour poursuivre notre route. Et bien sûr je n'avais aucune idée qu'on mettrait plusieurs mois à arriver là-bas. Je pensais attendre seulement une semaine pour retrouver ma mère. J'avais fait beaucoup de randonnée quand j'étais jeune. Je l'ai expliqué à Misha, que mon père était très riche et qu'on avait une luxueuse maison de vacances dans le vercors et que si on le demandait je pourrais marcher dans les montagnes.

-Il n'y a pas de montagne sur notre route, ce n'est que de la steppe et éventuellement des collines.

Nous étions sur un petit chemin qui courait à travers ces paysages que j'avais vu en regardant les tableaux du XIXème pendant les sorties au musée. Nous avions grimpé avec nos baluchons du matin sur une colline pour admirer, du sommet, la portion du chemin précédemment parcourue. Bien entendu, j'ai glissé sur le tissu à carreaux rouge et vert du baluchon et j'ai dévalé la colline la tête la première. Je suis tombée lourdement au bas de la colline et n'arrive même pas à me relever.

-Je peux monter sur tes épaules?

-T'as l'air de très bien réussir à te lever pourtant.

On peut faire une halte pour qu'elle se repose, a proposé Misha. On va pas la porter sur nos épaules toute la journée.

-Vous n'auriez pas besoin de me porter sur les épaules, même si je ne peux pas marcher.

J'ai coupé le 'je peux voler au montage'.

-Cela me paraît étrange, a fait Misha, dont je ne savais même pas si il était au courant de quoi que ce soit.

Il fallait malgré tout que je puise de la force dans mes tatouages.

-Vous pouvez voler?

-Taisez-vous je me concentre.

-Je trouve qu'il y a quelque chose de très étrange.

-Quoi donc, le fait que je puisse y arriver?

-Vous y arrivez. Vous pouvez vous détendre. Je ne sais pas exactement comment ça marche, mais j'imagine que si on vous tient par la main ça vous fera avancer.

C'est donc la première méthode qui fut employée et curieusement elle fit ses preuves. J'avançais dans ce décor, au milieu de ces personnages de peinture, avec une relative fluidité.

-Vous savez je vous aime bien, Ania.

-Oh c'est réciproque, ai-je fait d'un ton détaché.

Dites,ai-je fait pour changer de sujet. Dis Martin, tu l'as bien connue l'Angleterre?

-Je vois où tu veux en venir. J'ai de la chance que la langue soit plutôt simple à maîtriser pour des français et qu'on l'ai enseigné au lycée. Je suis plutôt un ado banal avec une existence ordinaire mais c'est vrai que c'est un problème pour moi. Comme je connais pas mon père je connais pas une partie de mes racines, c'est comme ça.

-J'ai connu ma mère mais je n'avais jamais vue la Russie, juste l'Empire Austro-Hongrois en Pologne, une fois. Et voilà que j'ai vécu tout ça dans ce pays que je rêvais de visiter. Je repense à toutes les fois où j'avais vu la Russie en rêve en espérant que ce soit un rêve prémonitoire. Et dire que vous pensez, vous , que je puisse avoir un rôle à jouer dans toute cette Histoire.

-Bah oui, tu fais partie de l'histoire de la Russie Anya.

C'est là qu'on a fait notre première halte et que j'ai pu m'écrouler lamentablement sur le pauvre canapé élimé de gens  à qui j'avais à peine le droit de parler. Allons bon. Je n'avais pas jamais sociabilisé à ce point. J'osais à peine leur adresser la parole. En fait, j'avais trop peur qu'ils découvrent ma véritable identité et qu'ils nous virent aussi sec ou pire qu'ils nous pendent dans la grange. Aurais-je aussi peur chez des gens riches? me questionnait Misha avec reproche sous-jacent. Allons bon, me rassura-t-il, on est tous victimes de ses préjugés de classe.

Vous n'avez pas peur que je vous trahisse? ai-je alors demandé très sérieusement.

Vivement que l'on s'en aille, ai-je alors pensé. Avant de goûter au nouveau peu que les gens aient à nous offrir et d'avoir les souvenirs kinesthésiques du Titanic qui remontent. Martin avait l'air de s'amuser follement. Il n'avait aucune raison, autre que moi, de participer à cette expérience. J'ai dû sortir vers le potager, sous l'angle éblouissant du soleil et la chaleur, et le peu qu'ils avaient, je l'ai vomi à côté des fleurs. Pas de doute y avait bien un bébé dans moi.

C'est alors que cette chaleureuse hôtesse me servit cette délicieuse réplique de cinéma:

-C'est la grossesse ça arrive, vous croyez que je n'ai jamais été enceinte?


Ania.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant