Rejetée.

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15 août 1911

Désolé de ne pas avoir pu écrire avant,mais j'ai passé la journée en extérieur,avec mes parents on a passé la journée en campagne pour se promener.Albert,le majordome polonais et mari de la cuisinière,nous a accompagné et nous a pas mal diverti avec ses anecdotes de son pays natal,assez futiles mais divertissantes quand même.De plus,j'aime beaucoup me balader dans la forêt alors que le soleil filtre entre les arbres et qu'on peut tous s'allonger sur une herbe fraîchement tondue.Mais voilà.Rien n'est plus agréable que de s'enfermer pendant la nuit dans le petit bureau situé sur un ancien balcon transformé en pièce couverte,sombre,avec un petit bureau situé devant une fenêtre fermée.Il est en bois sombre,éclairé seulement par une bougie blanche toute baveuse,en fin de vie.Je tire d'un tiroir mon cahier,avec une sorte de frénésie.Il est en bois sombre,légèrement sculpté,et je respire ses pages jaunies que j'ai envie de parcourir de mots,avec mon encrier rempli à rabord.J'avais déjà préparé dans ma tête ce que je voulais dire depuis longtemps.Donc,nous allons parler du néant de mes relations sociales pour bien faire rendre compte à tout le monde que je suis élève au milieu d'une basse-cour.Une basse-cour pleine de dindes,avec l'école des trolls juste en face.

Je suis élève dans un lycée très élitiste,où ne sont admises que des élèves de la haute société,et en tout petit nombre.C'est donc un miracle que je sois admise.Pour donner un exemple,c'est 25 filles par par générations,soit 25 filles nées en 1898,et le redoublement est interdit bien entendu.Donc,à mon entrée en 4ème en septembre,je serais avec les même petites dindes qu'en cinquième.Je suis condamnée à les supporter jusqu'à ce que je passe au lycée.C'est beau de ne pas pouvoir penser qu'on aura un bel avenir proche.Mais parce qu'il faut positiver dans la vie,je vais ajouter que ça veut aussi dire que je serais avec mes trois meilleures amies.Trois filles avec qui je suis liée à vie.Trois filles que j'ai rencontrées dans l'adversité.Trois filles que je vais prononcer maintenant:

Catherine Millet.Ce nom me semble si beau quand je l'entends.C'est vraiment ma meilleure amie,je la connais depuis la petite section.Catherine est quelqu'un dont même le visage,tu ne peux pas l'oublier.Elle a des tâches de rousseur,sous forme de grandes tâches compactes,à profusion,sur un fond blanc comme neige,et deux petits pois verts au milieu,entourée de lunettes immenses à la correction extrêmement importante.Un sourire blanc acéré,de longs cheveux ondulés et roux,le tout sous un grand chapeaux verts,et des robes vertes à carreaux,impromptues chez une fille de son rang.Bref,rien qu'au physique,elle t'intrigue,tu as envie d'être son amie;mais autre chose chez elle étonne.Elle est une française de souche,et pas des moindres,mais elle a l'apparence d'une irlandaise.C'est ce que toutes les filles de la classe sont venues au moins une fois lui demander,quand enfin elles s'approchent de nous autrement que pour nous insulter.

-"Comment tu es rousse!Tu viens d'Irlande?"

-"Vous rigolez?"

Pas sûr que ses parents apprécieraient d'être pris pour des étrangers.Sa mère vient d'une famille de la grande bourgeoisie parisienne,installée dans notre ville depuis neuf générations.Le père de Catherine,lui,vient de Grenoble,et pas non plus des familles les moins riches.Tout deux sont d'une richesse comparable à la mienne,grâce à un groupe commercial qui vend de l'orge.Ils ne lui ont je crois jamais adressée la parole,ou alors pour lui dire de donner des ordres à deux vieux domestiques que pour être allée chez elle je trouve forts sympatiques.Catherine est farouchement moquée elle aussi,mais rien de comparable à l'acharnement dont certaines d'entre nous sont victimes.Catherine subit pas mal par contre,victime d'un tas de refléxions sur son physique.Comme elle est en tête de classement,on sait que ce n'est pas n'importe qui,mais on la voit encore plus comme une curiosité.Elle a 20 sur 20 partout,c'est fou ce qu'elle réussit.Ca étonne tout le monde,sauf moi.Ses réflexions sur la vie,son recul et ses conseils sont tous emprunts d'une refléxion très aboutie,alors que ce ne sont que des phrases qu'elle prononce à l'improviste.Elle est incroyable,et je l'aime vraiment.

Ania.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant