Le concours.

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28 juin 1914.

Je dois admettre que je suis devant de l'inattendu,cette fois.Non,sincèrement.

Par où dois-je commencer?Par les bonnes ou les mauvaises nouvelles?

Je n'ai pas eu le courage de coucher sur du papier l'importance du stress que je ressentais pendant cette année.Je travaillais tellement que je n'avais pas le temps d'écrire.Et vous n'aurez pas d'explications moins prosaïques que celle-ci.Parce qu'en dehors du travail scolaire et des manifestations surnaturelles qui se dégageaient de moi,je n'avais qu'une seule chance de briller en société et je voulais absolument la saisir en croyant que tout sera trop tard après ça.Comme si mes pouvoirs ne pouvaient se suffire à eux-même,moi qui avait toujours prétendu vouloir absolument quitter ce monde,en réalité il me fascinait et je le comprenais mieux,l'avait plus expérimenté que beaucoup de monde.

Nous sommes le 28 juin 1914 et ma dernière lettre n'est même pas datée,j'ai dû l'avoir écrit pendant l'année scolaire.Là on est dans la soirée et je ne sais pas si je pourrais me contenter d'énoncer les faits.

Je suis rentrée chez moi tous les week-end,et j'ai revu Aïsha.Elle est enceinte de 4 mois,et elle nous a annoncé ça lors d'un dîner familial avec son petit copain.C'est pas une blague,la situation avait tout du point de départ d'un mauvais vaudeville:C'était les seules fois où on pouvait se réunir.Mon père semblait profiter de ce que seule sa fille la plus jeune était chez nous de manière permanente pour élargir son cercle.Il voyageait en France,en Europe,parfois en Amérique du Nord aussi,et il arrivait que je ne le voyais pas non plus le week-end.Nos relations passionnelles se calmaient,peut-être apprendra-t-il à être fier de moi.Ou à le manifester.Mon père n'a aucune raison d'avoir honte de ses enfants et surtout pas de moi.Bref,au lieu de l'annoncer au début du repas histoire de détourner l'attention de moi,elle a attendu qu'on évoque Martin.Nan parce que ma mère a beau être du pays du Bolchoï ils n'y connaissent rien à la danse,alors ils me parlent de sujet intéressant.Martin m'aimait,c'était certain.J'étais avec lui pour passer à autre chose,et aussi parce que j'étais persuadée de ne pas trouver un homme qui m'aimerait.

-Mais papa,j'ai 15 ans!Aïsha ne connaissait pas Mart à mon âge.Et pourtant tu ne lui as pas reproché,je vois pas comment tu devrais d'ailleurs.

-Oh,à ce sujet,au sujet de moi et de Mart,on avait une annonce à vous faire.

J'ai menti sur la marchandise,ils n'ont rien dit de mal au sujet de nos relations qui se résument,honnêtement,à travailler ensemble.De plus,si les chambres des garçons et celles des filles sont séparées par la cour et les parties communes c'est précisément pour éviter que cet institut ne devienne un baisodrome,rien de nouveau sous le soleil de Paris.Certains commençaient déjà à ressentir le besoin de s'aimer comme des adultes,et je me suis bien gardée de demander à Leslie ce qu'elle en pense.Elle a été promise à un homme comme ça se faisait dans des cercles très fermés,mais elle l'aimait.Séduire Leslie n'était pas bien difficile.Quant aux deux autres,elles se disaient qu'elles n'avaient que 15 ans et se consolaient en se disant que peut-être elles seraient promises à des hommes.

-Je suis enceinte.

-Mais vous n'êtes pas mariés!

-Ce n'est pas un problème,a fait Mart adroitement.Nous ne vivons pas dans la même société que vous.Et de toute façon ma femme attend un bébé de moi,l'avenir de votre lignée est assumée.Et puisqu'on en est là,cela fait une nouvelle personne douée de pouvoirs magiques sur Terre.

-C'est vrai,a fait Ryszard en se rasseyant.

-Je pense que je pourrais trouver un moyen de connaître le sexe du bébé avant sa naissance.

Ania.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant