XI - YEUX

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Chapitre 52

Mardi 25 juillet 2017

Mon bureau rangé, je déplace le sac de Nour et plie ses affaires afin de les placer dans un coin de la pièce. Si ma mère me voyait faire, elle dirait sans doute que je suis maniaque ou dérangée, mais c'est totalement faux. Je suis juste une personne ordonnée, tout simplement.

Je traverse ma chambre pour rejoindre mon lit. Je soupire, réalisant que ma sensation de mal-être est toujours omniprésente. Je manque cruellement de sommeil. Il est difficile pour moi de dormir paisiblement depuis quelques jours. Les migraines, les vertiges, le manque d'appétit, le stress m'envahissent et c'est comme si je n'étais plus bonne à rien. Alors que je m'apprête à me perdre une nouvelle fois dans mes pensées, Nour entre dans la chambre.

- Déjà au lit ?
- Non, je m'allonge juste.

Mon amie acquiesce d'un sourire. Elle s'avance vers son sac pour y ranger sa trousse de toilette avant de venir s'installer à côté de moi. Elle me regarde un instant, heureuse, ce qui me pousse à réagir, gênée :

- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Je n'arrive toujours pas à croire qu'Olivier ait réussi à te trouver un travail à l'autre bout du monde ! avoue-t-elle enjouée.
- C'est fou, n'est-ce pas ?
- Tu as vraiment un beau-père en or !
- Un beau-père, carrément ? souris-je.
- C'est bien parti pour, non ? En tout cas, je trouve ça super sympa qu'il essaie de t'aider dans tes projets.
- Ouais...
- T'as pas l'air convaincue ?
- C'est juste que l'année dernière quand j'ai fait mon dossier pour l'Australie, je me suis donné beaucoup de mal. Là, tout me tombe sous le nez et...
- Sybille, stop ! me coupe-t-elle en levant les yeux au ciel. Oui, Olivier t'a aidée à trouver cet emploi, mais pour le reste, c'est à toi de faire tes preuves. Tu ne fais pas partie de ces enfants pourris gâtés qui sont appuyés par leur famille pour ne rien faire par la suite ! Tu as un très bon niveau, tu es une jeune femme déterminée, douée et agréable. Tu mérites amplement ce qui t'arrive, OK ?

Un sourire se dessine sur mon visage, rassurée. Malheureusement, les choses ne sont pas aussi simples...

- Qu'est-ce qui te tracasse ? Mathieu ? me questionne-t-elle, inquiète.
- Quand ils m'ont annoncé la nouvelle, je suis restée sans voix. J'étais aux anges ! Je me suis levée pour les remercier, heureuse. Et là Noé a pris la parole. Il a dit une phrase qui m'a brisé le coeur : « C'est qui qui va me garder ? Et Mathieu, tu vas l'abandonner lui aussi ? »

Le simple fait de me remémorer la scène me contraint à lâcher une larme.

- Noé est un enfant intelligent. Il risque d'être triste quelque temps mais il finira par comprendre.
- Tu as sûrement raison mais je ne suis pas certaine que ce soit le cas de Mathieu.
- Alors quoi ? Tu laisses ton rêve de côté pour une relation d'à peine quatre mois ? lance Nour, perplexe.
- Ce n'est pas une question de mois, Nour...

Je baisse mon regard et les larmes me montent instantanément. Ma meilleure amie vient se blottir contre moi, embarrassée.

- Excuse-moi, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Je dis juste que s'il t'aime vraiment, il comprendra. Depuis le début, tu l'accompagnes dans son rêve, à lui d'en faire autant.
- C'est pas aussi facile.
- C'est vrai. Toi, tu seras à l'autre bout du monde mais bon... Tout problème a sa solution, non ?
- Je n'en sais rien...
- Tu hésites ?

J'acquiesce d'un mouvement de tête, perdue.

- Imagine que votre relation ne fonctionne plus ? Tu vas le regretter toute ta vie, tu en es consciente ?
- Oui, j'en suis consciente...
- Tu as parlé de tes doutes à ta mère ?
- Oui... Elle comprend mon ressenti mais elle pense comme toi et je vous rejoins. Le problème c'est que mon cœur parle plus que ma tête, c'est très déstabilisant.
- Les conséquences de l'amour avec un grand A, dit-elle d'un ton léger.

Sa réplique me fait sourire, quand mon téléphone qui se trouve sur ma table de nuit se met à vibrer. Je tends mon bras afin de l'empoigner et observe l'écran. Trois messages de Mathieu s'affichent sur ce dernier. C'est avec la boule au ventre que je lui réponds brièvement avant d'éteindre mon portable.

- C'est Mathieu ?
- Oui...
- Rien de grave ?
- Non, il me demande pourquoi je mets autant de temps à répondre. Je lui ai juste répondu que j'étais occupée.
- L'ignorer n'est pas une solution, Sybille.
- Pour l'instant, c'est celle qui me semble la plus envisageable.
- Tu comptes faire ça longtemps ?
- Possible, j'en sais rien.

Nour m'observe quelques secondes, sérieuse, avant d'enchaîner, enthousiaste :

- Bref ! Je suis pas venue ici pour te voir déprimer, OK ?! Tu as toujours ton carnet ? Tu sais, celui où tu notais toutes les choses que tu aimerais faire en Australie ? Non parce que je pense qu'on devrait y rajouter quelques trucs !
- Tu crois ?
- J'en suis même certaine !

Je me lève d'une traite, euphorique, à la recherche de ce fameux carnet. J'ai beau me sentir coupable, cette nouvelle vie en Australie m'attire comme un aimant. Accepter ? Ou refuser ? Voilà la question qui hante mon esprit depuis plus de trois jours. J'ai beau retourner la situation dans tous les sens, j'ai l'impression que peu importe ma décision, celle-ci aura de lourdes conséquences...

ALL NIGHT - PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant