VII - ILS NOUS COMPRENNENT PAS

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Chapitre 23

Mathieu

Samedi 25 juillet 2020

La tête légèrement inclinée, c'est attendri que j'observe mon ex-petite amie terminer sa nuit. Cela doit faire vingt minutes que je suis réveillé et c'est à peine si j'ose bouger. Sybille est blottie contre moi, le visage posé sur mon torse. Si je n'étais pas conscient, je pourrais croire à l'un de ces rêves qu'il m'arrivait de faire à l'époque. Un épisode réconfortant qui, au réveil, vous plonge aussitôt dans un état déplorable, vous rappelant que tout ça n'était qu'une putain d'illusion. Mais cette fois-ci, les choses sont différentes. Je suis lucide, elle est bel et bien contre moi. Et rien que pour ça, je pourrais rester immobile des heures.

Hier soir, j'étais loin de me douter qu'en frappant à sa porte, Sybille me proposerait de rester dormir avec elle. Ce rapprochement nous a permis d'éclaircir un sujet important : l'Olympia. Une discussion nécessaire qui m'a fait comprendre que je n'étais pas le seul à m'accrocher à cette histoire. Savoir que nos sentiments ne se sont jamais dissipés, malgré tout ce qu'il s'est passé, m'encourage à croire qu'il y a encore une chance. Cette nuit lorsque je l'ai prise dans mes bras, on est resté l'un contre l'autre, sans prononcer le moindre mot. Sans doute pour profiter un maximum de ce moment secrètement attendu. Malheureusement, le sommeil nous a très vite rattrapés.

Un rire me sort brusquement de mes pensées. Une voix féminine se fait entendre au bout du couloir. Il n'y a pas de doute possible, il s'agit de Léa. Je me relève légèrement en tapotant le bras de mon ex pour essayer de la réveiller tandis qu'elle ouvre les yeux, à moitié endormie.

- Je crois que Léa est là, elle est dans le couloir, chuchoté-je.

Elle n'a pas le temps d'assimiler ma phrase qu'elle prend conscience de sa position. Prise d'une gêne, elle se redresse, mal à l'aise, quand la poignée de la porte se met à bouger. Elle me fixe, paniquée.

- Syb ? T'es réveillée ? Pourquoi la porte est fermée à clé ?

Sybille mord sa lèvre inférieure en se levant brusquement du lit. Elle appuie sur l'interrupteur des volets, entre-ouvre la baie vitrée et contourne le lit, tout en me faisant signe de me taire en plaçant son index sur sa bouche.

- Oui, je suis réveillée, accorde-moi deux minutes.

Elle m'ordonne de me lever et m'attrape par le bras afin de m'indiquer le chemin à prendre : le placard mural. Je ne cherche pas à comprendre et m'exécute sans broncher. Dans la précipitation, elle ramasse mon sac à dos et mon t-shirt pour me les tendre. C'est à peine si elle m'adresse un regard et referme les portes sans tarder. Malgré ça, j'arrive tout de même à voir ce qu'il se passe dans la pièce grâce à une petite fente. Sybille jette un coup d'œil rapide autour d'elle et s'empresse d'aller ouvrir la porte, comme si de rien n'était.

- Désolée, j'étais dans la salle de bains.
- Tu fermes pas la porte habituellement, si ?
- Non, c'est vrai... Mais habituellement tu es avec moi.

Léa se contente de sourire et Sybille en profite pour rebondir :

- D'ailleurs, où étais-tu, jeune fille ? demande-t-elle d'un ton léger.
- Peut-être que je suis partie retrouver un garçon que j'aime beaucoup.
- Less ?

Elle baisse les yeux telle une ado prise sur le fait. Sa joie se fait ressentir à des kilomètres.

- Alors ça veut dire que vous êtes de nouveau ensemble ? reprend-elle.
- J'en sais rien, on a pas encore discuté de ça. On était beaucoup trop occupé à...
- Oulà ! N'en dis pas plus, la coupe Sybille. Une part de mystère, ce n'est pas si mal !
- Oui, t'as raison ! s'amuse-t-elle.

Une vibration se fait entendre sur la table de nuit côté porte. L'attention de Sybille se pose immédiatement sur mon téléphone qui est resté sur le chevet.

- Tu réponds pas ?

Elle tend son bras pour l'empoigner, nerveuse.

- C'est ma mère, je la rappellerai plus tard.
- Tu lui passeras mon bonjour ? Je vais prendre une douche.
- OK, pas de soucis !

Léa se dirige dans l'autre pièce. J'essaie de ne pas faire de bruit. La pression relâchée, Sybille s'assoit sur le lit, soulagée. Elle observe brièvement l'écran de mon téléphone et attend patiemment que notre amie soit sous la douche pour venir me sortir de ce foutu placard.

- Pardon, grimace-t-elle. J'ai paniqué.
- On s'en sort mieux que dans les films, chuchoté-je. On pourrait presque croire qu'on a quelque chose à cacher.

Elle lève les yeux au ciel, amusée, avant de poser mon téléphone contre mon torse :

- Tu devrais quitter cette chambre si tu ne veux pas être démasqué, Pruski.
- À vos ordres, cheffe.

C'est naturellement que je viens poser ma main contre la sienne pour récupérer mon iPhone. Sybille se pousse légèrement afin de me laisser partir et c'est sans attendre que je sors de la pièce dans la plus grande discrétion. Pour avoir le plus de crédibilité possible, je m'éclipse de la villa et pars retrouver la plage pour me rafraîchir. C'est seulement une trentaine de minutes plus tard que je réapparais sur la terrasse tandis que tout le monde est rassemblé pour le petit déjeuner.

- Le voilà enfin ! annonce Ilyès, enthousiaste.
- Tu viens de te réveiller ? demande Léa, perplexe.
- Non, j'étais à la plage, dis-je en montrant du doigt mon maillot de bain encore humide. Bien dormi ?

Je lance ma réplique dans le seul but de la taquiner mais celle-ci ne laisse rien transparaître.

- Oui ! Sybille et moi on est tombé de fatigue, pas vrai ?
- Oui, on était épuisées !

Le regard de mon ex en dit long, ce qui me pousse à sourire. Je m'installe à table quand Anis poursuit la conversation :

- Vous repartez à quelle heure ce soir ? demande-t-il en s'adressant à Aladin et Hanaé.
- L'avion est à vingt-deux heures.
- Oh... C'est vrai que c'est votre dernière journée, reprend Léa, déçue.
- Eh oui, les vacances se terminent. Vous, c'est demain, c'est ça ? nous questionne Hanaé.
- Oui, l'avion est à vingt heures, répond Anis.
- On peut éviter de parler des départs ? râle Ilyès. On est encore en vacances je vous rappelle !
- Il a raison ! Faut profiter un max des derniers instants ! dis-je en posant mon attention sur Sybille.

Elle me fixe, souriante, avant de ramener le verre de jus de fruits à ses lèvres. Durant le repas, on ne peut s'empêcher de s'échanger des regards. Lesram et Léa nous font rire. Ils se comportent comme si de rien n'était alors qu'au fond, ils sont cramés. Honnêtement, je suis content pour eux et j'espère que cette fois-ci leur relation va marcher. Qui sait ? Peut-être qu'ils ne seront pas les seuls à retrouver l'amour sous le soleil de Coti-Chiavari.

ALL NIGHT - PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant