XII - DU MAL

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Chapitre 58

Dimanche 6 août 2017

Lorsqu'elle me raccompagne sur le palier, je me sens apaisée. Je la remercie sincèrement pour cet entretien. Je ne m'attendais pas à ce que la grand-mère de mon petit ami me soutienne avec autant de fermeté. Son discours m'a surprise, mais il m'a aussi permis d'ouvrir les yeux. D'un, personne n'a le droit de décider pour moi. De deux, je ne dois en aucun cas me sentir coupable d'être heureuse. De trois, s'il tient vraiment à moi, il finira par accepter ma décision. Cela me déchire le cœur, mais je dois arrêter de culpabiliser, tout ça est insensé.

C'est dans un sentiment de réconfort que je descends les marches pour regagner le rez-de-chaussée. Cette discussion n'enlève en rien ma peine, en revanche, elle a su me rassurer. Mathieu me manque et nous savoir en froid rend les choses encore plus difficiles...

Arrivée dans le hall, je déverrouille l'entrée du bâtiment à l'aide du bouton mural, puis empoigne l'anse, prête à sortir. Alors que je suis en train de pousser la porte pour quitter les lieux, Mathieu apparaît dans mon champ de vision. Mon visage se décompose quasi instantanément, étonnée de me retrouver nez à nez avec mon petit ami. Il me fixe un instant, impassible, avant de faire demi-tour.

- Sérieusement ? marmonné-je, abasourdie.

D'un geste brusque, je pousse la porte et me précipite à l'extérieur pour le suivre.

- Tu comptes m'éviter encore longtemps ? demandé-je, d'un ton sec.

Aucune réponse. Il continue de marcher en direction de sa voiture. J'accélère le pas, agacée, et l'intercepte en attrapant son bras :

- Mathieu, s'il te plaît ! Je viens de te poser une question, la moindre des choses c'est de me répondre !
- J'ai plus rien à te dire, Sybille.
- Alors quoi ? Tu ne vas plus jamais m'adresser la parole ? C'est terminé, c'est ça ?
- T'as pris ta décision, non ?
- Donc tout est de ma faute ?

Il ouvre la portière de sa Golf et s'installe sur le siège conducteur tout en m'observant, plus calme que jamais.

- Ah parce que c'est de la mienne ?

Il claque la portière, mais prend tout de même le soin de baisser la vitre. Son sang-froid commence vraiment à me rendre dingue !

- Non mais je rêve ! rétorqué-je, exaspérée. Tu crois que c'est facile pour moi ?!
- Vu ton explosion de joie hier à l'hôpital, permets-moi d'en douter, dit-il en trifouillant son vide-poche, sans même me regarder.

C'en est trop ! Je fais mon possible pour ne pas craquer, mais les larmes commencent à me monter...

- Tu vois jusqu'à présent, je pensais que c'était moi le problème, mais je me suis trompée. T'es juste un putain d'égoïste !
- Moi égoïste ? reprend-il en haussant le ton.
- Si tu tenais réellement à moi, tu serais heureux de voir que je réalise des choses qui me tiennent à cœur !
- Attends, t'insinues quoi là ? crache-t-il, dubitatif en sortant de son véhicule.
- Tu sais très bien ce que j'insinue !
- Retourne pas la situation, Sybille, ne t'amuse pas à ça !

Je ne baisse pas le regard et continue de le provoquer avec détermination.

- Je suis quoi au juste ? Une distraction que tu te gardes sous le coude ?
- Mais qu'est-ce que tu racontes ? s'agace-t-il.
- Une copine sympa, qui reste toujours dans son coin ? Moi aussi j'ai des rêves, Mathieu !
- Allez travailler dans une école en Australie ?balance-t-il d'un ton condescendant. Super !
- Va te faire foutre ! Tu sais très bien que c'est bien plus que ça !
- Plus que quoi ? Que moi ? Ouais, ça j'ai bien compris, t'inquiète !
- À aucun moment, j'ai fait un choix, c'est toi qui es en train de le faire pour nous !
- Prendre un avion pour partir à l'autre bout du monde, c'est pas faire un choix ? Tu me prends pour un con ? Désolé, mais les relations à distance c'est pas mon truc.

Un rire nerveux m'échappe.

- Voila, c'est bien ce que je dis. Du cul et une compagnie. Je suis la Alix numéro deux, génial ! Bonne continuation, Mathieu.

Tandis que je commence à partir, il m'attrape brusquement le bras. Il me serre ce dernier, tout en me faisant face.

- Je t'interdis de te comparer à elle ! Elle t'arrive même pas à la cheville !
- Arrête ton numéro !
- Tu doutes de moi ?
- À ton avis ? rétorqué-je, dégoûtée.
- Non mais tu t'entends parler ? Après tout ce que je t'ai prouvé ?
- Qu'est-ce que tu m'as prouvé ? Hein ?
- Tu veux vraiment jouer à ça ?
- Dis-moi, Mathieu, je suis curieuse, qu'est-ce que tu m'as prouvé ? m'énervé-je.
- Je... Des tas de choses, je..., bafouille-t-il, pris de cours.
- C'est bien ce qu'il me semblait ! le coupé-je. S'il y en a un de nous deux qui a prouvé quelque chose dans cette relation, c'est bien moi !
- Ah bon ? En faisant quoi ?
- Tu oses me le demander ? le questionné-je, offusquée. Je me suis donnée à toi !  Je t'ai dit que je t'aimais ! Deux fois ! Tu as besoin que je te rafraîchisse la mémoire peut-être ? Tu sais les deux fois ou tu n'as même pas été foutu de me répondre ?
- Arrête, ça n'a rien à voir...
- Jusqu'à présent, j'essayais de me trouver des excuses bidon, mais il faut que je me rende à l'évidence. Tu n'es pas prêt pour une relation sérieuse. Et le pire dans tout ça, c'est que tu essaies de me faire culpabiliser ! Finalement, mon départ en Australie tombe à pic ! C'est mieux qu'on en reste là.

Mathieu ne s'amuse pas à renchérir. Je l'observe un court instant et lui tourne le dos, bien décidée  à quitter cet endroit au plus vite ! Ma vison se brouille, mes yeux sont remplis de larmes et je ne peux m'empêcher de me demander si j'ai pris la bonne décision. Des mois de bonheur pour finir devant chez lui à se balancer nos quatre vérités. Quel gâchis... Jamais je n'aurais imaginé en arriver là. Malheureusement, les histoires d'amour ne se déroulent pas toujours comme on le souhaite. La nôtre en est l'exemple...

ALL NIGHT - PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant