ALL NIGHT - PLK

VIII - BUNKOEUR

Chapitre 25

Dimanche 26 juillet 2020

La porte d'entrée verrouillée, j'appuie sur l'interrupteur pour éclairer la pièce. Je m'avance dans le séjour, hésitante, et me stoppe, laissant ma valise à roulettes au beau milieu du salon, dépitée. Cela fait cinq jours que je n'ai pas remis un pied dans cet appartement. Habituellement, retrouver son chez-soi est une sensation réconfortante, pourtant, ce soir, l'ambiance est tout autre.

Nos vacances à Coti-Chiavari sont désormais bel et bien terminées, de quoi me rendre particulièrement nostalgique. Les au revoir à l'aéroport d'Orly se sont déroulés dans la joie et la bonne humeur, même si je dois reconnaître qu'un soupçon de confusion régnait dans l'air à ce moment précis. Arrivés au parking, nous nous sommes séparés en deux groupes. Je suis montée dans la voiture de Léa, tandis que les garçons, eux, sont repartis avec Anis. Un départ bref, qui m'a laissée sur ma faim. Par où commencer ? La nuit dernière ? Ou bien cette journée interminable ? Une chose est sûre, le retour à la réalité n'est pas des plus agréable.

Ma valise défaite, je prends deux minutes pour envoyer un message à ma mère ainsi qu'à ma meilleure amie pour leur faire part de mon arrivée à la maison. Nour répond du tac au tac en me demandant si on peut s'appeler pour un débriefing mais je n'ai pas la tête à ça, pas ce soir. Je coupe court en lui expliquant poliment que je suis épuisée du voyage, ce qu'elle comprend. Sous la douche, j'essaie d'assimiler la situation. Mathieu et moi, nous nous sommes embrassés. Très bien. Si je m'arrête à ça, mes vacances n'auraient pas pu mieux se terminer. Cependant, les choses ne se sont pas passées comme je l'espérais.

Hier soir, lorsque je me suis retrouvée dans ma chambre, je n'ai pas pu m'empêcher de sauter sur mon lit telle une ado surexcitée ! Depuis toutes ces années, mes sentiments pour Mathieu n'avaient pas diminué d'un pourcentage et ce qu'il s'était passé sur la terrasse ne faisait que confirmer notre attirance. Un moment de bonheur que j'ai dû gérer seule. Je me suis mise au lit, attendant patiemment qu'il pointe le bout de son nez. Malheureusement, à force d'attendre, j'ai fini par tomber dans les bras de Morphée.

Ce matin, au réveil, les images de la veille ont refait surface. Je me revois sourire niaisement en repensant à la scène du baiser. Euphorique, je me suis empressée de jeter un œil à mon téléphone. J'espérais secrètement un message ou un emoji, mais aucun signe de Mathieu à l'horizon. Ne voulant pas m'attarder sur des détails futiles qui pourraient me frustrer, je me suis levée afin de me préparer. Une fois prête, je suis sortie sur la terrasse pour petit-déjeuner avec la bande. Sans surprise, mon ex-petit ami s'est comporté comme à son habitude : taquin, souriant, mais discret. Pour être franche, je ne m'attendais pas à plus de sa part, surtout devant le reste du groupe. Après tout, cela serait beaucoup trop précipité. La matinée s'est terminée à la plage avant de remonter définitivement à la villa pour organiser notre départ. La bande étant toujours avec nous, difficile de trouver du temps pour discuter seul à seule, et s'éclipser n'étant pas la solution la plus discrète, je me suis contentée de faire comme si de rien n'était. Un peu comme Lesram et Léa...

L'eau de la douche coupée, j'enroule mon corps dans une serviette éponge et marche à l'aide du tapis jusqu'au lavabo. Séchée, j'enfile mon pyjama et prends quelques minutes pour moi.
Arrivée dans ma chambre, je remarque Teddy Polak confortablement allongé sur mon lit. Je me penche afin de lui déposer un bisou sur la tête et m'installe dans mes draps, préoccupée. Je repense à ma discussion avec Léa sur le chemin du retour. Nous avons évoqué sa relation avec Lesram. Les étoiles qu'elle avait dans les yeux m'ont fait réaliser à quel point l'amour nous anime. Au fond, je n'arrive même pas à savoir si cela est positif. Malgré ça, mon amie n'a pas pu s'empêcher de me questionner sur mon ex :

- Et toi alors ? Avec Mathieu ? me demande-t-elle, intéressée.
- Comme tu peux le voir, les choses se passent plutôt bien.
- Je suis heureuse que vous soyez de nouveau en contact. Vous n'avez pas perdu votre complicité, c'est vraiment mignon.

J'ai vu à son regard qu'elle aurait aimé me demander mon ressenti sur notre relation. Savoir si j'envisageais plus ou pas, mais elle s'est abstenue. Quant à moi, j'ai pris sur moi pour ne
pas lui raconter ce qu'il s'était passé hier soir. C'était en partie pour protéger son histoire avec Less que Mathieu avait rejoint les garçons sur la terrasse. Que se serait-il passé s'ils n'étaient pas rentrés à la villa ? Est-ce que nous l'aurions fait ? Après tout ce temps ? Je roule des yeux, dépassée. Une sensation étrange se fait ressentir au niveau de mon ventre. J'ai beau imaginer la scène, je me pose tout de même des questions. Pourquoi n'était-il pas revenu me voir dans la chambre ? Regrettait-il ? Aucun mot, aucun message, rien. Avait-il réalisé son erreur ? Reproduire le même schéma n'est peut-être pas la solution. Je sens mon ventre se serrer davantage. Et si je repartais ? Et si tout recommençait comme en 2017 ? Mon esprit commence sérieusement à se brouiller. Je mords ma lèvre inférieure, pensive. Je pourrais faire le premier pas ? J'empoigne mon téléphone et commence à taper un texte sur mon clavier tactile avant de me rétracter. Je soupire, anxieuse, et ferme l'application avant d'éteindre ce dernier de façon à le laisser sur ma table de nuit.

- C'est ridicule ! marmonné-je.

J'éteins ma lampe de chevet et claque ma tête sur l'oreiller, bien décidée à trouver le sommeil pour oublier ces dernières vingt-quatre heures.