XI - YEUX

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Chapitre 56

Samedi 5 août 2017

Pensive, j'observe ma valise qui se trouve sur le sol de ma chambre. Celle-ci est ouverte, prête à être approvisionnée. Ma sélection se concentre avant tout sur des tenues légères. Pourquoi m'encombrer avec des pulls en laine et des doudounes, si la température moyenne en hiver frôle les vingt degrés ? Sérieusement ? Un rictus se dessine sur mon visage, heureuse. Je m'imagine déjà déambulant près de l'opéra de Sidney, observant les pélicans sous le soleil australien. Des pensées précises, pour un rêve encore incertain...

- Alors c'est officiel ? Tu t'en vas ?

La voix de Mathieu se fait entendre, ce qui m'oblige à baisser les yeux, honteuse.

- Non, mais je commence à préparer ma valise, au cas où...
- Je vois...

Je relève la tête, mal à l'aise. Il est appuyé contre l'encadrement de la porte, absent. Je ne suis pas stupide, je sais à quel point cette histoire l'attriste.
Alors pourquoi suis-je en train de faire cette valise ? Dois-je renoncer une bonne fois pour toutes ?

- Mathieu, je sais que cette histoire te pèse mais...
- J'ai réfléchi, me coupe-t-il en se grattant la nuque. Je serais vraiment con de te retenir ici.
- Co... Comment ça ? bafouillé-je, stupéfaite.
- Je peux pas t'empêcher de réaliser tes rêves. Ça serait égoïste ! Notre relation peut tenir le coup, même à dix-sept mille kilomètres l'un de l'autre, j'en suis persuadé.

Je m'avance vers lui afin de passer mes bras autour de son cou. Il me fixe affectueusement quand mes lèvres viennent embrasser les siennes.

- Merci d'avoir compris. Merci !

Il me serre contre lui, son étreinte est si réconfortante. Malheureusement, plus les secondes passent, plus je sens quelque chose m'éloigner de lui. Ma vision devient floue tandis qu'un bruit strident s'amplifie, ce qui me fait aussitôt grimacer.

- Bébé... Ton téléphone...

Je gémis, priant pour que les choses reviennent à la normale. De quel téléphone parle-t-il ? Les images s'éloignent, me plongeant dans un trou noir tandis que le bruit devient insupportable.

Lorsque j'ouvre les yeux, la tête de Mathieu est enfouie sous les draps. Je cligne à plusieurs reprises, déboussolée. Alors quoi ? Tout ça n'était pas réel ? Je me décompose intérieurement, déçue.

- Tu devrais répondre, marmonne-t-il à moitié endormi.

Mathieu a raison, cette sonnerie va finir par nous rendre dingues et je dois à tout prix l'arrêter ! Je tends mon bras vers ma table de nuit pour attraper ce foutu téléphone. Je le ramène dans mon champ de vison quand le nom de Nour apparaît sur l'écran. Je décroche, agacée :

- Oui ?
- Purée, enfin tu réponds ! dit-elle soulagée. J'ai essayé de t'appeler une dizaine de fois !
- Qu'est-ce qui se passe ?
- Je... Je suis désolée..., s'excuse-t-elle d'une voix tremblotante. C'est Noé, il...
- Il quoi ? rétorqué-je sèchement. Nour, qu'est-ce qui se passe ?!
- Il jouait en bas du bâtiment avec Samy quand il s'est fait mal à la cheville. Je crois qu'elle est cassée, enfin... Elle est énorme ! Et je...
- Où est Noé ? Tu as appelé les urgences ?!
- Oui ! On est aux urgences à Clamart. J'ai prévenu ta mère, elle est avec moi. Les médecins parlent peut-être d'une opération, tu devrais venir, Syb.
- Putain... J'arrive tout de suite !

ALL NIGHT - PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant