VIII - ALL NIGHT

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Chapitre 32

Jeudi 15 juin 2017

C'est dans le calme et la sérénité que je viens d'inscrire le dernier mot sur ma copie. Mon stylo Bic est quasiment HS tandis que ma main droite, elle, est très engourdie. Il ne reste que quelques minutes avant la fin de l'épreuve alors j'essaie de ne pas me déconcentrer. Je relis mon devoir attentivement en prenant soin de ne passer à côté d'aucun détail. Cette année, les trois sujets proposés sont : « Suffit-il d'observer pour comprendre ? », « Tout ce que j'ai le droit de faire est-il juste ? » ou bien : « Expliquer le texte suivant : extrait de Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, mille-sept-cent-cinquante-cinq. » Après une courte réflexion, j'ai opté pour le premier et cela semble avoir fonctionné. 

Je m'empresse de rectifier les quelques fautes d'inattention, souligne les titres, ainsi que mes informations personnelles pour la présentation quand la sonnerie retentit brusquement. Je relève la tête, satisfaite, et réalise avec soulagement que l'épreuve de philosophie est désormais terminée.

Je range ma trousse dans mon sac et me lève afin de remettre ma copie à la personne chargée de cette tâche. Bizarrement, l'excitation de cet examen m'a permis de tenir le coup. La fatigue ne s'est pas fait ressentir une seule seconde à partir du moment où j'ai eu le sujet entre les mains. Malheureusement pour moi, je sens déjà la tension redescendre et mes bâillements se font de plus en plus fréquents...

Alors que je longe le couloir pour rejoindre la sortie, Mathilde, ma camarade de classe, me rattrape. Nous échangeons quelques mots. Cette dernière semble confiante et malgré la difficulté de cette épreuve, je le suis aussi.

Arrivées au portail, nos chemins se séparent. Je vais pour descendre les escaliers quand mon téléphone se met à vibrer. Mathieu. « Lève la tête. » Je la redresse instantanément. Mon regard balaye les alentours attentivement lorsque je l'aperçois, appuyé sur le capot de sa Golf. Je m'avance vers lui, agréablement surprise de le voir ici.

- Alors cette épreuve ? lance-t-il, perplexe.

À ce moment précis, je suis tentée de jouer avec ses émotions. Je grimace, dépitée. Il semble inquiet. Je trouve ça adorable.

- Je suis plutôt confiante, finis-je par avouer, d'un grand sourire.
- Toi, t'es la pire !

Un sourire de soulagement s'empare de son visage avant qu'il ne vienne pincer mon menton à l'aide de son pouce et de son index. Mathieu me tire alors vers lui pour m'embrasser. Je réponds sans tarder.

- C'était sérieux ? demandé-je en plongeant mon regard dans le sien.
- De quoi est-ce que tu parles ?
- Hier soir.
- J'ai plus envie de faire semblant, Sybille. Tu me plais.

J'élargis mon sourire de plus belle et viens l'embrasser à nouveau. Ses paroles me touchent, je me sens tellement chanceuse.

- Je te dépose chez toi ?
- Ça ne t'ennuie pas ?
- Si je te le propose, c'est que ça ne m'ennuie pas.

Mathieu ébouriffe mes cheveux avant de faire le tour du véhicule. Une fois installés à l'intérieur, il démarre sans perdre de temps.

- Ça va, t'es pas trop fatiguée ?
- Si... Ça commence.
- Toi au moins, tu vas pouvoir faire une sieste.
- Pas toi ?
- Non, j'ai rendez-vous au studio.
- Mais tu m'as pas dit que la mixtape était terminée ?
- Si mais j'ai deux nouveaux morceaux à faire écouter à Flav.
- Vraiment ?
- Ouais, je suis inspiré en ce moment.

Un sourire se dessine sur son visage à croire qu'il fait référence à notre histoire. Je me contente de faire de même et tourne la tête, gênée.

- Du coup, c'est quoi ta prochaine épreuve ?
- Histoire-Géographie, demain matin.
- Ça va, tu gères ?
- Disons que j'ai appris mes cours alors ça devrait le faire, souris-je.

Mathieu me regarde un instant, le sourire qu'il arbore à nouveau m'oblige à réagir.

- Quoi ? demandé-je, mal à l'aise.
- Ça me fait rire, parce qu'habituellement les nanas scolaires, c'est pas mon truc.
- Pourtant c'est agréable de parler à une fille qui n'est pas focus sur ses ongles et ses cheveux, non ?
- Très ! avoue-t-il, amusé. Mais en même temps, je n'ai jamais cherché plus alors ça m'importe peu.
- Mathieu Pruski, le garçon volage.
- Arrête... Plus sérieusement, je ne pensais pas attirer une fille comme toi.
- Comme moi ?
- Sérieuse, belle, mature, intelligente...
- Je peux te retourner les compliments.
- Ouais peut-être mais je suis loin d'être scolaire. Tu sais que j'ai raté mon brevet deux fois ?
- Et ? Tu as eu ton CAP mécanique et tu excelles dans le milieu du rap. Être bon à l'école ne signifie rien. Certes, ça aide mais tout est une question de volonté, d'idées et de talent. Tu en es la preuve, Mathieu.

Il se stationne devant mon bâtiment avant de venir poser sa main sur ma cuisse. Je sens que mes paroles le touchent, mais il se contente de me regarder avec ce regard qui en ferait fondre plus d'une. Je détache ma ceinture et m'approche doucement de son visage pour lui déposer un baiser sur les lèvres.

- Merci de m'avoir déposée.
- Arrête, c'est normal.
- Tout est toujours normal avec toi de toute façon.

J'élargis mon sourire et ouvre la portière quand il me retient le bras. Mathieu me tire à nouveau vers lui pour un autre bisou. Je me laisse faire, attendrie.

- Tu as quelque chose de prévu ce week-end ? On pourrait se voir.
- Oui, pourquoi pas ? On s'appelle ?

Un dernier smack et me voilà sortie du véhicule pour rejoindre la porte de mon bâtiment. Comme à son habitude, Mathieu attend que je sois rentrée pour partir. C'est avec un sourire niais que je monte les marches jusqu'à chez moi.

À peine arrivée dans mon salon, mon téléphone se met à sonner. Il s'agit de Nour. Je m'empresse de lui envoyer un message pour lui dire que je la rappellerai plus tard. Pour l'instant la seule chose qui m'importe, c'est mon lit. Je dois absolument rattraper mes heures de sommeil.

ALL NIGHT - PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant