XIII - DÉGAINE DE BANDIT

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Chapitre 45

Mardi 8 septembre 2020

Ce début de semaine n'a pas été de tout repos. Entre la rentrée de Noé, la paperasse administrative et les quelques bricoles à régler à droite et à gauche, je n'ai pas eu le temps de m'ennuyer. J'aime être occupée ; rester des après-midis entières chez moi avachie sur mon canapé n'est pas quelque chose que j'apprécie particulièrement, bien au contraire. J'aime vadrouiller, enseigner, créer, bricoler, étudier, là, j'ai l'impression d'être utile. Cela va bientôt faire six mois que je suis de retour en France et mon inactivité professionnelle commence sérieusement à me peser. J'ai beau faire quelques cours de soutien de temps à autre, c'est loin d'être assez. J'ai donc pris la décision de me lancer dans l'auto-entrepreunariat ! C'est Olivier et ma mère qui m'ont soufflé cette idée, après tout, je n'ai toujours aucune nouvelle de Tamara et pour l'instant, l'Australie n'est plus d'actualité. La restauration de meubles me plaît et j'ai beau prendre ça comme un hobby, il serait peut-être temps pour moi de songer à plus. Bien sûr, tout ça est encore secret et je préfère garder ces informations pour moi en attendant d'officialiser ma situation.

Entre midi et deux, un appel de Léa est venu bousculer ma journée. Alors que je faisais la vaisselle du déjeuner, cette dernière m'a contactée pour lui venir en aide. Aujourd'hui, c'est l'anniversaire d'Ilyès, le zozo de la bande. Il fête ses vingt-trois ans et Léa voulait à tout prix lui organiser un dîner surprise de dernière minute. Les garçons étant occupés, elle a directement pensé à moi. Je me suis donc empressée d'accepter. Ilyès est un garçon que j'apprécie sincèrement et je me voyais mal refuser la proposition de mon amie. Après tout, c'est une belle occasion de tous nous retrouver, non ?

Les achats pour le dîner terminés, Léa reprend la route jusque chez elle. Ce soir, le repas s'annonce délicieux ! De l'agneau, des pommes de terre rissolées et des haricots verts, sans oublier le fameux dessert ! Pour l'occasion elle a commandé un gâteau dans une célèbre pâtisserie des environs et c'est Lesram qui est chargé de le récupérer en fin de journée. Une organisation carrée, comme on les aime !

- Tu crois qu'on en aura assez ? me demande Léa en déballant l'un des nombreux sacs de courses présents dans la cuisine.
- Tu rigoles, j'espère ? rétorqué-je en prenant soin de mettre la viande au réfrigérateur. Il y en a au moins pour quinze personnes.
- Oui mais ils mangent tellement, on parle d'une bande de garçons ravagés par la nourriture, Sybille.
- Tu oublies tout ce qu'on a pris pour l'apéritif ! Tu peux me croire, ils vont sortir d'ici ballonnés à bloc !

Elle se contente de sourire, amusée, avant de poursuivre, apaisée :

- Au fait, votre dîner chez Nour s'est bien passé ? C'était ce week-end, c'est ça ?

Sa question me surprend. Il est vrai que j'oublie parfois que Léa et Mathieu sont avant tout de très bons amis et qu'ils discutent de temps en temps...

- Oui, c'était super !
- Mathieu n'était pas trop stressé ?
- Je crois que si mais il s'est très vite détendu.
- Tant mieux, car il appréhendait beaucoup ce dîner.

J'ai un moment de battement entre sa réplique et mon éventuelle réponse. Comment ça « il appréhendait beaucoup ce dîner » ? Mathieu s'était confié à elle sans même oser m'en parler à moi ? Sa copine ? À ce moment précis, je ressens une légère pointe de jalousie. Bien sûr, je n'en veux évidemment pas à Léa qui est avant tout une amie proche de mon copain, mais je dois admettre que ça me touche qu'il ait préféré se confier à elle, plutôt qu'à moi...

- Il a pas l'habitude des dîners de couples, c'est un novice dans le milieu mais je suis heureuse qu'il partage tout ça avec toi, reprend-elle.

Sa phrase arrive malgré tout à me redonner du baume au cœur. Je sais à quel point Léa est bienveillante mais c'est plus fort que moi, parfois il arrive que je me braque pour des broutilles, c'est humain. J'essaie de ne pas y accorder trop d'importance et enchaine sur un sujet, qui d'après moi, est bien plus intéressant que notre repas chez Nour, le week-end dernier.

- Et concernant Lesram et toi, vous en êtes où ?

Il est vrai que depuis notre retour de Corse, je n'ai pas eu l'opportunité d'aborder ce petit détail avec elle. Est-ce qu'ils sont toujours aussi in love ? Je croise les doigts pour que sa réponse soit positive !

- Disons qu'on a pas officialisé mais oui, on se fréquente toujours, avoue-t-elle, béate.
- C'est-à-dire ? Vous n'êtes pas exclusifs ? lancé-je, pleine d'incompréhension.
- Oula, non ! s'insurge, Léa. Moi vivante, jamais j'accepterais ce genre de choses ! Non, on est ensemble mais personne n'est au courant à part toi et Mathieu.
- Vivons heureux, vivons cachés, reprends-je de plus belle.
- Tu as tout compris ! Après, il est vrai que depuis Coti Chiavari, on ne s'est pas beaucoup vu tous ensemble, alors les garçons n'ont rien pu remarquer, mais je sais très bien que ça ne pourra pas durer indéfiniment. En fait, on se pose pas de questions, ça se fera naturellement.
- J'aime cette optique ! En tout cas je suis ravie pour vous. Vous êtes l'un de mes couples chouchous.

Léa a à peine le temps de rougir à ma réplique que son téléphone se met à sonner. Elle sort celui-ci de la poche de son jeans et élargit son sourire à la vue du nom qui est affiché sur son écran.

- En parlant du loup ! J'espère qu'il ne va pas me trouver une excuse pour ne pas aller récupérer le gâteau.

Elle roule des yeux et décroche dans la foulée :

- Allô ?
- Ouais, bébé, Anis vient de m'appeler. Y a eu une descente dans leur quartier, Ilyès est aux urgences.
- Quoi ? Comment va-t-il ? demande-t-elle, paniquée. Il est blessé ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
- J'en sais pas plus mais Anis l'a conduit à l'hôpital. Contacte-le, il t'en dira plus. J'essaie de décaler dès que je peux. Je pense que d'ici deux heures, je serai sur Clamart. Mathieu répond pas mais je lui ai laissé un message.
- D'accord... Bon, je vais voir avec Sybille.
- On s'appelle tout à l'heure, OK ?
- D'accord, je t'aime.
- Je t'aime aussi.

Elle raccroche. J'observe Léa attentivement, son visage se décompose brusquement, quant à ses yeux, ils se remplissent peu à peu de larmes. Je m'avance vers elle, inquiète.

- Tout va bien ?
- C'est Ilyès, il est aux urgences...

ALL NIGHT - PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant