Chapitre 10

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PDV Léo

La nuit tombe sur la prison. Les détenus affluent dans les couloirs en direction du réfectoire dans un brouhaha incessant, j'entends à peine Elie qui me parle. Si l'on oublie les insultes homophobes, personne ne m'a menacé depuis sept heures, un progrès considérable.

— Pasquier !

Je me retourne sur Miller, posté devant son bureau. D'un signe de tête, il me fait comprendre qu'il veut s'entretenir avec moi. Timing parfait, il doit savoir que je compte arrêter.

Elie me jette un regard soucieux.

— Qu'est-ce qu'il te veut ?

En ce qui concerne ma mission d'informateur de contrebande, j'ai choisi ne pas impliquer Elie. Ici, moins on en sait, mieux on se porte.

— Rien, ne t'inquiète pas. Je te retrouve au réfectoire.

Je lui tapote sur l'épaule et rejoins le surveillant. Miller referme la porte derrière moi et m'invite à m'assoir devant son bureau.

— Bon, t'as appris quoi ? J'ai besoin d'infos. Hamilton est sur notre dos H24 pour la coke. Les sanctions vont bientôt pleuvoir si on fait rien.

— En fait, j'ai quelque chose à vous dire.

Changer les termes de l'accord ne sera pas si aisé, en fin de compte...

— Je risque de m'attirer de gros ennuis en espionnant les hommes de Suarez. Et je voudrais éviter de me faire égorger dans mon sommeil...

Un silence, puis Miller émet un rire nerveux.

— Je te pensais pas comme ça, Pasquier, et pourtant, je te suis depuis le premier jour. À peine arrivé, tu te sens en mesure d'utiliser un gardien.

— Quoi ? Non, vous n'y êtes pas !

— Vraiment ?

Il s'appuie à deux mains sur le bureau, face à moi.

— Je vais te dire, moi, ce que je crois. Je crois que tu as fait en sorte de neutraliser le gars qui te faisait chier, que tu as joué les intouchables devant tout le monde et maintenant que tu dois faire ta part du marché, tu te retires comme une fleur.

Je sursaute lorsqu'il cogne le bois avec son poing.

— Tu m'as pris pour un con ? Y'en a des dizaines avant toi qui m'ont fait c'coup-là. Avec des yeux doux, des histoires émouvantes et même des idées suicidaires. J'ai donné des ordres pour faire surveiller Davis et tenir mes engagements. Toi, qu'est-ce que tu as fait en retour ?

J'inspire lentement pour garder mon sang froid.

— Je cherche juste rester en vie, surveillant Miller. Je ne pensais pas être repéré aussi vite...

Il se redresse, croise les bras sur sa chemise trop serrée et me toise de haut. Je sais qu'un surveillant contrarié peut pourrir la vie d'un détenu, et j'ai ouï dire que leur imagination était débordante...

— Ta dette s'étale sur le long terme, Pasquier. Comment tu comptes la régler ?

— Je suis avocat, je pourrais peut-être vous aider sur quelque chose ou...

Il s'esclaffe.

— J'ai aucun problème avec la justice, moi.

Mon cerveau tourne à plein régime. Que pourrais-je faire de plus ?

— Ce que je peux te dire, c'est que tu tiens pas à te mettre les gardiens à dos, en plus du gang de Ash.

— Dites-moi quoi faire qui ne mette pas ma vie en jeu ?

De roses et d'acier (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant