Chapitre 12

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PDV Rafael

Mon regard est figé sur le bitume de la cour. J'ai pris une décision. Une décision précipitée et qui pourrait nous coûter cher, si la logistique ne suit pas ce changement, mais je ne veux pas prendre le risque qu'Hendrix fasse du mal à Léo la nuit prochaine. Nous devons passer à l'action dès ce soir. Et en parlant du loup...

L'objet de tous mes désirs pénètre dans la cour avec le rouquin qui parle trop. Adams, je crois. Je n'aime pas ce type. Une vraie commère. Mais je sais qu'il ne parlera pas de moi, il me craint trop. Comme tous les gens des petits groupes inoffensifs et les esseulés. Il montre à Léo la machine qui permet de travailler les jambes, puis celle pour soulever des poids. Les regards se tournent vers eux, et plus particulièrement vers Léo. Les nouveaux arrivants attirent toujours l'attention. Et cette attention ne me plaît pas.

Je vois déjà les plus agressifs de quelques gangs remuer autour des tables. Quand on s'ennuie en taule, la moindre nouveauté devient source de distraction. Une sale nuit, un conflit anodin, et les nerfs sont à vifs pour la journée. Deux d'entre eux se décrochent de leur gang et viennent analyser Léo sous toutes les coutures alors qu'il essaye une machine sous les bons conseils d'Adams.

— Toi, le p'tit blanc ! T'es qui, t'as fait quoi ?

Angel. Un mec au visage anguleux et tatoué jusqu'au front. L'un des plus sournois du gang des mexicains. D'ange, il ne porte que le nom. L'autre, je ne le connais pas. Léo les contemple sans un mot. Bien sûr, il ne sait pas quoi répondre...

— Je t'ai parlé, le blanc !

Il l'arrache de la machine et le bouscule. Mateo et Diego me lancent un regard sous-entendant « on se les fait ? », mais je me contente d'observer. Si quelqu'un doit intervenir, ce sera moi. Je jette un coup d'œil vers les gardes en ronde dans la zone.

— Je vais te démolir, petit enfoiré, crache Angel.

A l'instant où il lève la main sur Léo...

— Sanchez !

Ma voix résonne dans toute la cour et fige Angel sur place. Le chef de gang mexicain se braque vers moi en entendant son nom. Je me lève, il m'imite, et je me dirige vers lui. Une fois assez près de lui, je lui souffle à l'oreille :

— Sanchez, rappelle ce connard ou il va attirer l'attention des gardiens. Tout doit rester calme jusqu'à ce soir.

— Jusqu'à ce soir ?

— Hmm. Il faut qu'on parle.

Il acquiesce avec un air préoccupé et rappelle l'autre connard à l'ordre.

— ¡ Angel, vuelve con los demás y cierra la puta boca ! Que si atraes à los cerdos, te doy un tiro. (Reviens avec les autres et ferme ta putain de bouche ! Si tu attires les cochons (gardiens) je te fracasse.)

Le concerné rentre dans le rang après avoir craché aux pieds de Léo. Je sens mon poil se hérisser. Je me tourne vers le reste de la cour, à la recherche de Lewis. Dès qu'il me voit, il nous rejoint et nous nous positionnons à l'écart pour discuter du changement de plan.

Adossé entre eux contre un mur, mon regard s'allonge sur Léo, qui s'est rassit sur la machine et m'observe de biais. Ce contact visuel semble le rassurer, car il reprend ses exercices de musculations. Ses biceps se tracent et gonflent alors qu'il soulève les poids. J'imagine la sueur couler sur sa jolie peau pâle, ses veines se dessiner sur ses bras et dans son cou tandis que tout son corps se contracte. Je réprime un sourire.

— Martinez ?

— Après la dernière vague, fais-je, toujours dans la discussion. Memphis s'occupera des caméras et Tim des rondes. Les plannings sont déjà en cours de changements, on aura la bonne équipe pour la nuit.

— On prévient les autres.

— Toujours en discrétion. Le big boss est pas au courant et j'ai pas envie que ma mère le soit.

— On gère, me rassure Lewis.

— C'est pas comme si c'était la première fois, me répond Sanchez.

Nous échangeons un petit sourire complice et je lui tapote dans le dos. En effet, ce vieux fou avait déjà couvert mes arrières, lors de l'assassinat de Thompson. De nombreuses personnes souhaitaient sa mort. Mais j'étais encore un jeune loup inexpérimenté. Aujourd'hui, tout sera calculé au millimètre près.

— Je vous laisse gérer le reste en amont. J'ai des choses à régler.

Nous entrechoquons nos poings et je me dirige vers les machines, où Léo et Adams s'entraînent. Si le sexe est banalisé, à Northbury, les sentiments sont interdits. L'amour a entraîné la mort de celle que j'aimais. Je ne peux pas laisser Léo se faire tuer pour la même raison. Je dois jouer les enflures avant que quelqu'un d'autre n'endosse ce rôle avec lui.

— Mateo !

Mon meilleur ami se lève pour me rejoindre, suivi par Diego. La commère sue déjà à grosses gouttes. Et cette sueur-là n'est pas due au sport. Je me plante devant les machines et fais signe à mes amis de s'emparer d'eux.

— Les nouveaux, on va les tester.

— Eh, mais moi, je suis pas...

Adams s'interrompt pour se pétrifier lorsque je me penche vers lui.

— Si t'ouvres encore ta gueule, il va t'arriver des trucs pas cool.

Il déglutit. Sur mon ordre, Diego dégage l'un de ses amis pour le faire marcher vers la porte et Mateo vise Léo. Un sourire lubrique aux lèvres, il le sort de la machine par le bras et le pousse en avant tout en se collant à lui. Il lance une œillade victorieuse à notre gang, qui ne se prive pas de ricaner grassement.

Je dois feinter la brutalité. Les hommes doivent m'obéir au doigt et à l'œil, ce soir. Si mon autorité est remise en question avant le meurtre d'Hendrix, tout tombera à l'eau.


De roses et d'acier (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant