Chapitre 8.1

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¹: "mon petit loup/louveteau" en espagnol.

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PDV Rafael


Je regarde mes joues maculées de noir dans le miroir de la salle de bain, et grimace.

— T'es pire que moi, mi lobito¹, me lance Diego en me tapant l'épaule de sa grosse main humide.

Je réponds par un grognement agacé. Cette putain d'huile de moteur... J'abandonne mes vêtements au sol et pars sous une douche pour décrocher toutes les tâches sur ma peau. L'eau savonneuse vire à l'anthracite.

« Oh, faut pas réagir comme ça, voyons... »

Mes muscles se raidissent. Même sous le jet d'eau, je reconnais cette voix mielleuse... Je me braque vers Hendrix, qui a réussi à faire fuir un mec pourtant connu pour son fort tempérament. Ce type me débecte. Il s'amuse avec les craintes et les réactions des détenus, et manipule leurs émotions. Le pire étant qu'il tente d'amadouer le premier pigeon venu ; après tout, tout le monde ne connaît pas encore son profil en détails.

Le portrait que Lewis m'a dressé de lui me laisse à croire qu'il voit tous les hommes de notre secteur comme de la viande fraîche avec laquelle il rêverait de jouer les bouchers. Si nous ne le supprimons pas rapidement, il aura le temps de jouer avec les boyaux de quelqu'un avant d'être envoyé en psy.

Le but de ce meurtre est d'épargner une vie, voire plusieurs. Cet homme est fou. Et puisque la justice ne compte pas nous protéger de lui, nous nous en chargerons nous-mêmes. Après tout, si je suis si respecté, c'est bien pour la vengeance et la protection que j'ai offert à cette prison.

— Casse-toi de là, Hendrix ! ordonne Mateo, dans mon dos.

Il se tient face à lui avec son air mauvais, encadré par Diego et deux autres de nos gars. Je sens le regard d'Hendrix peser sur moi. Depuis que je suis devenu le centre de son univers, il cherche à devenir le centre du mien. Et c'est gagné. Dans trois jours, je lui ferai quitter ce monde. Mais en attendant, je ne compte pas entrer dans son jeu ridicule.

— Je me demande à quoi ressemblait ce si beau corps, lorsqu'il avait dix ou douze ans... dit-il d'une voix rêveuse.

Je retire un instant la tête de la douche pour me retourner vers lui avec un air ahuri. C'est de moi dont il parle ? Je crois rêver ! Cette espèce de... Il me fixe comme un enfant obsédé par un jouet. Diego lui assène un crochet qui le projette avec violence contre un lavabo.

— Laisse-le, Diego. S'il veut venir tâter la marchandise, qu'il vienne. Je saurai l'accueillir, fais-je en souriant.

Nous rions aux éclats. Hendrix se redresse, la joue bleuie, lorsqu'un petit groupe de travailleurs arrive dans la salle de bain. Les retardataires. Mon expression se décompose. Les retardataires, mais aussi ceux qui évitent la foule en arrivant les derniers.

Quand mon regard croise celui de Léo, nous nous fixons un instant et je le détaille de la tête aux pieds. Ses cheveux, son visage et ses vêtements sont noircis par la terre. Je me retourne avec un air désintéressé et passe une main dans mes cheveux pour éjecter l'eau qui en coule.

— Dis donc, tu as fait quoi pour être autant barbouillé, jeune homme ?

Mon souffle se coupe.

— Euh, je suis tombé dans la terre, répond Léo.

— Oh, mais c'est pas bien du tout. Pas bien du tout, du tout.

Du coin de l'œil, je vois Hendrix tapoter les vêtements de Léo pour le dépoussiérer.

— Voilà. Maintenant, il va falloir me les donner pour la machine, ajoute-t-il sur un ton paternaliste

De roses et d'acier (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant