Chapitre 23.1

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PDV Rafael


Je suis scotché sur la table depuis deux heures, le menton vissé sur mes poings et accoudé à mes genoux. Près de moi, il y a juste Mateo, en train de se creuser la tête pour essayer de comprendre avec moi les raisons de cette rupture absurde. Parce qu'il est évident que je ne vais pas lâcher l'affaire. Oui, j'ai dit que j'accepterai s'il venait à me quitter, mais pas ce genre de rupture, jamais.

— T'es très silencieux, Rafa, ça me surprend. Le calme avant la tempête ?

La tempête ? Plutôt un ouragan.

— J'étais plus choqué qu'autre chose et il est parti vite. Je vais pas le laisser me larguer comme ça.

— Hermano, c'est pas bon, ça...

— Quoi ?

— Antonio, il disait pareil. Il a fini par séquestrer Tania et il l'a tuée à la fin.

— Je le tuerai jamais, tonto (idiot).

— Mais le séquestrer, t'es pas contre, ricane-t-il.

— Où tu veux que je le séquestre, ici ? Sois pas con.

Même sans le regarder, je vois sa tête remuer de droite à gauche en signe de dépit.

— Toi, t'as pas prêt de revoir l'extérieur, crois-moi.

— Tu me gonfles, Mateo.

— Y'a que la vérité qui dérange.

Je relève la tête et le fixe.

— S'il faut en arriver là pour avoir des réponses, ouais, je le coincerai quelque part et il en sortira pas avant de m'avoir craché la vérité !

— Et si c'est vraiment ce type de sa fac ?

Ma mâchoire se serre. Une ribambelle de solutions illégales me traverse l'esprit. Obtenir l'adresse de ce gars. Envoyer quelqu'un chez lui et le forcer à abandonner Léo par la force.

Mon Léo. Il se retrouvera seul et me reviendra. Le plan d'un cinglé inconscient. Serais-je ce cinglé ? Non. Parce que la seconde partie du plan est incertaine. Je douterais toujours des sentiments de Léo pour moi, après ça.

Je secoue la tête et me frotte le visage. J'ai l'impression de sombrer dans un tunnel sans fond.

— De toute façon, je suis convaincu que ce mec est une excuse. Il s'est passé quelque chose, juste avant. Il était mal, il a même voulu vomir. Je suis sûr que ça vient d'ailleurs, mais d'où ?

Mon regard s'allonge sur Jackson, le nouveau colocataire de Léo. Un afro-américain aussi bien rasé et coiffé qu'un PDG. Beaucoup trop de charisme à mon goût. Et surtout, il le suit partout depuis deux jours. Je grommèle dans ma barbe. J'ai envie de lui péter les dents.

— On s'est renseignés sur lui, commence Mateo en me voyant l'observer. Il est arrivé y'a six mois à Northbury, il était dans le secteur C, jusque-là.

— Il a fait quoi ?

— La drogue et les putes. Il trempait dans plusieurs business.

Je lâche un rire dédaigneux. Les putes... Le fait que le coloc' de Léo soit quelqu'un qui traite une partie de la population comme de la marchandise est loin de me rassurer.

— Il traîne aussi avec cet ancien marine et un autre gars.

— Putain, c'est ce mec-là ? J'étais focalisé sur le marine.

— Ils se font discrets, on les voit jamais. Et pis, ils sont arrivés y'a pas longtemps.

J'enrage. Si seulement, j'avais été là pour voir ce qu'il s'est passé avant qu'il ne me quitte...

— T'as parlé aux gars, dans la cour ? me demande Mateo.

— Personne a fait gaffe, tout était tranquille. Ça fait deux jours que je pose des questions, mais je dois pas en dire trop.

— C'est bon signe, conclut-il en bâillant.

— Et ça peut pas être Hawk, il avait bouclé le dossier y'a un moment.

— Ecoute, t'as qu'à l'obliger à parler, impose-toi. De toute façon, c'est pas comme s'il pouvait s'échapper.

Je hoche la tête. Aux grands maux, les grands remèdes. Je me lève de la table et vise l'étage, la dernière cellule du fond, sur la droite.

— Viens avec moi.


De roses et d'acier (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant