Chapitre 20.1

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PDV Léo

C'est le trentième nom que je rentre sur ma liste d'attente et elle ne cesse de s'allonger. Lorsque le dernier détenu s'en va, je pose mon carnet de notes à côté de moi et laisse retomber le haut de mon corps sur le lit pour souffler un coup. J'ai du travail pour huit mois, minimum... Cette première session est close, les autres devront patienter ou s'entretenir directement avec Steven.

Je me frotte les yeux au-dessus de mes lunettes. Un début de migraine rayonne entre mes tempes. Et dire que personne ne me paie pour ça... Suis-je à ce point accroc à mon travail pour continuer à me démener en prison sans rémunération ou juste idiot ?

— T'es con, tu le sais ça ? me lance Rafael en s'asseyant près de moi.

— Je me posais justement la question, merci de confirmer ce que je pensais.

Il fait claquer sa langue contre son palais. Le fait que je m'épuise pour des hommes qui ne m'apprécient pas l'agace.

— Travailler à titre gracieux n'a jamais attiré le respect, Léo.

— Mon salaire est de me sentir en sécurité et qu'on me fiche la paix. Pourquoi crois-tu que Hamilton me laisse faire ? Je ne lui coûte rien, j'occupe les détenus de façon saine et je participe même à redorer l'image de sa prison.

— Et aussi parce que ton Steven l'a menacé.

Rafael marmonne entre ses dents. Je sais qu'il n'aime pas l'idée que je me fasse exploiter au profit des détenus, mais il a tout de même l'air de bien mauvaise humeur... Je n'ai pas le temps de renchérir, Ash apparaît devant nous en claquant des mains.

— Bravo, Pasquier, quelle démonstration ! T'as vraiment scotché tout le monde, aujourd'hui. Le lionceau a grandi en très peu de temps...

Je me redresse et le dévisage au-dessus de mes verres.

— Dis-toi qu'à l'extérieur, c'est moi le lion.

Mon cynisme se ressent.

— Eh, l'avocat !

Un chef de gang cubain m'interpelle.

— Tu m'as inscrit ?

— Oui, Morales, tu es en tête de liste. Fais-moi signe quand tu auras reçu les papiers.

— Bien.

Il s'approche de deux pas et jette au creux des jambes une poche contenant une dizaine de cigarettes.

— Comme preuve d'engagement, ajoute-t-il avant de repartir.

Je regarde les cigarettes, hébété.

— Je ne fume pas...

— On s'en fou, fait Rafael, ça te servira de monnaie d'échange, un jour ou l'autre.

Il me les dérobe pour les fourrer sous mon matelas.

— Je m'occuperai de te les cacher ailleurs, tout à l'heure.

Un autre homme s'avance vers moi. Un latino au cou entièrement tatoué de noir et aux iris aussi sombres que la nuit. Je connais son visage, mais impossible de me rappeler qui il est... Les mains dans les poches, il s'adresse à moi tout en me fuyant du regard.

— Eh, j'voudrais m'inscrire pour la session d'avril... possible ?

Les sourcils froissés, je reprends mon carnet.

— Ton nom ?

— Reyes.

— Rey...

Je relève la tête et le fixe droit dans les yeux.

De roses et d'acier (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant