De roses et d'acier (MxM)

Chapitre 28.2

Les ardeurs qui me maintenaient en lui finissent irrémédiablement par mettre un terme à ce moment. Je me retire, le sexe enduit d'une grosse quantité de sperme, mais je n'ai pas le temps d'admirer mes traces en lui. Ses membres se relâchent et ses paupières se referment.

— Bébé, ne t'endors pas.

Je le redresse en position assise et lui tapote la joue pour le sortir de sa torpeur. Avec mon aide, il parvient à se remettre sur ses pieds et reprend ses esprits contre le mur. Ses yeux se baissent sur les fluides qui dégoulinent sur son ventre et entre ses cuisses.

— Je vais t'aider à te laver.

— C'est bon.

Lorsqu'il presse le bouton de la douche, il sursaute devant le jet d'eau et recule vivement. La culpabilité me noue la gorge. Notre séparation ne sera pas aussi douce que je l'avais espérée... Toujours dos à moi, il articule :

— Va dans une autre douche, s'il te plaît.

J'acquiesce et me plie à sa volonté, le cœur lourd. Je prie pour que son amertume s'apaise avant mon départ, je crois que je ne me remettrais jamais de l'avoir perdu de cette manière... Ma douche est expédiée en moins d'une minute. Une fois rhabillés, je lui emboîte le pas dans le couloir pour nous rendre au dortoir, mais il s'arrête d'un coup.

— Rafael, arrête ça.

— Arrêter quoi ?

— Tu m'as fait revenir, c'est bon. Maintenant, laisse-moi. Vraiment.

Je déglutis. Les mots que je m'apprête à prononcer me compriment l'estomac.

— Donc, c'est fini.

Son silence est douloureux.

— Dis-le. Que les choses soient claires avant que je parte.

— Y'a que ça qui compte pour toi, hein ? s'écrie-t-il en se retournant vers moi. Tu veux avoir la conscience tranquille avant de partir ? Eh bien, je te libère, Rafael Martinez !

Stupéfait par ces mots, je fais un pas vers lui, mais dès l'instant où je le touche, il gifle ma main avec force.

— Est-ce que c'est un crime de vouloir savoir ?

— Ce qui l'est, c'est d'avoir tenté de me tuer.

— Je sais que t'es énervé contre moi, tu as toutes les raisons pour ça. Mais tu crois qu'on n'a pas dû me ramener à la réalité, moi aussi ? Être noyé dans l'eau dégeulasse des chiottes, réanimé à coups de poings pour ensuite recommencer, encore et encore... je t'assure que ça remet les idées en place. Alors, oui. Ce que je t'ai fait est ignoble. Impardonnable, même, surtout pour les gens normaux. Mais tu sais quoi ? On n'était déjà plus normaux à partir du moment où on a mis les pieds ici. Et on le sera plus jamais. Je pensais que tu t'étais fait à cette idée, mais j'avais tort. Parce que tu n'es pas comme nous et tu ne le seras jamais.

Une douleur amère brille dans ses yeux. Je réussis à glisser les doigts dans son cou, la gorge nouée.

— Mais le pire dans tout ça, le pire que j'aurais jamais fait dans ma vie, c'est de t'avoir infligé cette souffrance, murmuré-je d'une voix larmoyante. Avoir dû t'étouffer de mes propres mains comme si je cherchais vraiment à te tuer... t'entendre hurler, me supplier en silence, te voir suffoquer... J'aurais préféré qu'on me noie mille fois plutôt que te voir frôler la mort entre mes mains.

Ses lèvres se mettent à trembler, mes yeux à brûler. Je l'attire contre moi et l'enlace, submergé par la peur irrationnelle de le perdre. A mon plus grand bonheur, il me rend mon étreinte et enfouit son visage dans mon cou.

— Bébé, tu ne sais pas à quel point je t'aime.

— Je pense que j'en ai une vague idée, maintenant...

Il dépose un doux baiser sur ma pomme d'Adam et inspire mon odeur, les doigts plongés dans mes cheveux. Mon cœur s'enflamme. En cet instant, je me sens si fragile que je pourrais mourir d'amour. Et à la manière dont il ressert ses bras autour de moi, je sais qu'il en a conscience. Nous nous berçons de longues secondes avant que la surveillante Brown ne crève notre bulle par ses hurlements et des coups de trique.

Au moment de regagner nos lits, nous nous retournons l'un vers l'autre et échangeons un doux sourire, chargé de remords. Un sourire qui, ce soir, vaut tout l'or du monde.