Chapitre 17

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PDV Rafael

Un disfonctionnement électronique. Voilà la raison que les gardiens offriront à Robinson lorsque le corps d'Hendrix sera découvert, demain matin. Robinson, qui reviendra de son gala de « charité », les narines encore poudrées, la panse grasse et le foie engorgé.

Ce soir, avec la complicité de quelques surveillants, le secteur A va trancher la tête d'un monstre.

Les couloirs sont calmes et une pénombre anormale s'installe sur la prison. Les ordres laissés sont clairs : dans leurs cellules, les fauteurs de trouble ne doivent pas broncher. Ceux qui transgresseraient la règle et viendraient perturber nos plans le paieraient très cher. Mais je ne me fais aucun souci. Personne ne prendra un tel risque. Cette nuit sera la plus paisible de toute l'histoire de Northbury.

Nos ombres glissent dans les couloirs, jusqu'aux sanitaires. Posté à l'entrée, le gardien Clarkson. Il baisse sa casquette et se retire sans un mot. Le colis nous a été livré. Le seul gars de mon gang que j'ai pris dans cette affaire s'arrête sur le seuil et enfile son rôle de guet ; l'expérience m'a rendu prudent. Personne, à l'exception des concernés, ne dois être témoin de nos actes.

Lorsque je pénètre dans la salle d'eau, je constate que les réjouissances ont déjà commencé. Hendrix, bâillonné et attaché aux deux robinets d'une douche, nu comme un ver et trempé de la tête aux pieds. Lewis et deux de ses hommes lui tournent autour avec un seau d'eau en riant, tandis que Sanchez joue avec un bout de bois acéré. Deux mexicains de son gang portent des outils entre les mains.

— Vous m'avez pas attendu, à ce que je vois.

Sanchez m'adresse un petit sourire en coin avant de lancer son arme en l'air pour la rattraper d'un geste habile.

— Quelques comptes personnels, apparemment. Tant que t'étais pas là, je les laissais s'amuser, mais j'ai gardé un œil dessus.

Je me poste à ses côtés et croise les bras. Leurs moqueries résonnent sous le haut plafond. J'inspire profondément. Ces instants de sérénité et de confiance insolente, avant que tout ne s'emballe, quand on pense maîtriser à la perfection une situation digne d'un scénario d'horreur, c'est ce moment que je préfère. Le contrôle est vital.

— Ça t'avait manqué ? me demande Sanchez.

— Quoi donc ?

— Tout ça.

Je contemple la scène devant nous. Un meurtrier pédophile enchaîné à nos pieds, sur le point d'être supprimé au nom des victimes. Bientôt, son sang giclera sur le carrelage. L'euphorie nous gagnera, nous serons hors du temps. Le sentiment de justice, l'écho d'une haine depuis longtemps ancrée en nous, relâchée comme une meute affamée, puis les grognements des fauves repus qui s'évanouissent dans la nuit. Entre ces murs froids, nous poserons le point final à une histoire macabre.

Je réponds par notre vieil adage avec un air mélancolique :

— Les prédateurs se réunissent pour en chasser d'autres.

Sanchez ricane et acquiesce.

— Moi aussi, ça m'avait manqué, Lobo Negro¹.

Je sors une arme de mon vêtement, confectionnée à partir d'un morceau de verre en forme de croc et d'un tissu noir, et me dirige vers Hendrix. Mes complices s'occupent de la logistique, guettent et « s'amusent » avec le gibier. Moi, je suis le chef d'orchestre. Et je porte le coup fatal.

Les autres s'écartent sur mon passage et je m'accroupis devant Hendrix pour examiner son expression. Des larmes bordent ses yeux, du sang macule le bâillon, mais un sourire bombe ses joues et sa poitrine tremble sous un rire compulsif.

Cet enfoiré est impatient d'obtenir la gloire qu'il n'a jamais eue, au lendemain de son décès, et de me voir péter un plomb sur lui comme s'il était quelqu'un d'important pour moi. S'il veut la célébrité, je vais lui en donner. Mais elle ne sera pas celle qu'il attend. La jeunesse qu'il convoitait à travers les réseaux se souviendra de lui d'une toute autre manière.

Il me fixe avec un regard luisant.

— Lorsque les photos de ton cadavre seront diffusées sur internet, on pourra te voir ouvert en deux, gisant dans des excréments comme l'ignoble porc que tu es. « Le cochon de Northbury », ce sera le titre que les médias imprimeront sur ton histoire. Les gens ne retiendront pas ton nom, ils penseront à toi en disant « le type qui a crevé dans la merde en prison », et ils riront. Hendrix ? Non. « Le cochon de Northbury ».

Je m'approche de son visage avec un large sourire satisfait.

— Ta mort ridicule effacera ton nom de l'Histoire.

Son rire s'envole sur ces mots. Il part dans une agitation folle et tente cette fois de se relever. Je me redresse pour m'écarter.

— Reste tranquille ! lance un homme de Lewis en lui envoyant son pied dans le ventre.

Je me tourne vers Sanchez et hoche la tête. Le travail peut débuter.

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¹ : « Loup Noir » en espagnol.

Le chapitre 18 sera intense 🔥 et très long (4 parties) préparez-vous !



De roses et d'acier (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant