SAVOIR, C'EST SE SOUVENIR(juillet 846)Gisbert Fritz

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Quel plaisir de respirer le parfum de mes rosiers ! D'habitude, par cette chaleur, leur senteur devient un peu écoeurante, mais cette année, elle flotte avec élégance sur tout le jardin

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Quel plaisir de respirer le parfum de mes rosiers ! D'habitude, par cette chaleur, leur senteur devient un peu écoeurante, mais cette année, elle flotte avec élégance sur tout le jardin. Cette variété a été créée spécialement pour moi et porte mon nom. Si elles sentent si bon, c'est sans doute parce que je suis de fort bonne humeur !

Je me penche sur les corolles rouges sang, gardant un oeil sur l'allée que mon majordome remonte à pas comptés. Il serait temps de m'en séparer, il se fait trop vieux... Un beau jeune homme dans la fleur de l'âge me conviendrait davantage... une compagnie plaisante dans des tas de situations...

Reto traîne dans les parages, sous les arbres, à chasser les mouches. Il s'occupe de mon journal mais je ne lui fais pas encore porter le courrier ; il estime que ce n'est pas dans ses attributions. Je le soupçonne de trouver ça dégradant. Il ne devrait pas faire la fine bouche encore longtemps, après le fiasco de toutes ces opérations menées contre le bataillon. Je suis trop bon de le garder à mon service...

Et puis non, il m'est indispensable. Il sait presque tout de moi mais il ne dira jamais rien. Il en abuse, je le sais. Mais si je lui ordonne de s'occuper de mon courrier, il le fera. Et avec le sourire, j'y compte bien. Il ira toujours plus vite que ce vieux Wagner... Allez, hâtez-vous, je n'ai pas toute la journée !

Je le laisse monter les trois marches jusqu'à la terrasse, le souffle court, et constate sur son plateau tendu la présence d'une seule enveloppe. Elle comporte, écrite de façon raffinée, la phrase "pour sa gracieuse seigneurie, le prince Gisbert Fritz". Hm, je ne connais pas cette écriture. La curiosité me dévore tout à coup. J'ai l'habitude d'attendre le repas de midi pour lire mon courrier, mais cet expéditeur inconnu m'intrigue. Ce n'est pas une écriture de femme, mais celle d'une main d'homme, à la fois dure et légère... pleine d'assurance et... d'autre chose...

La température semble soudain monter... Le soleil ne frappe pourtant pas plus fort sur le jardin... Je saisis l'enveloppe, renvoie Wagner et vais m'asseoir sous les arbres sur un banc de pierre pour ne pas perdre une minute de plus. Je passe mon doigt sous le rabat et le soulève d'un coup sec.

Un seul feuillet, noirci de cette même écriture inconnue. Je dois me concentrer un moment pour pouvoir la déchiffrer. Et quand je commence enfin à lire, le sang me monte au visage par degré... Je dois me retenir de ne pas trembler de rage...

"Je vais vous épargner les formules de politesse habituelles, et entrer directement dans le vif du sujet. Votre temps doit être précieux, et le mien l'est également.

Je vous informe que nous avons découvert vos manigances, et le but que vous poursuivez. Nous n'ignorons rien des moyens que vous avez mis en oeuvre pour nuire à notre régiment. Mes hommes ont longuement travaillé pour en arriver à ce résultat, et les langues que nous avons déliées ont fait le reste."

Les yeux me sortent de la tête ! C'est lui, je n'ai pas de doute ! J'ai senti cette odeur de duplicité qui lui est propre dès que j'ai ouvert l'enveloppe ! Les espions ont été repérés ? Et interrogés ? Ils ne savent rien sur moi de toutes façons !

Les Chroniques de Livaï ~ Tome 3 [+13]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant