1.2 Mika

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— Et merde... La confiture...

Mika rentrait épuisé de cours, il faisait nuit, déjà, mais il faisait nuit tôt à Nevenoe. Il laissa tomber son sac et posa ses clefs sur le porte-clef, par habitude. Il était dans un tel état qu'il aurait pu s'endormir debout, alors il n'avait aucune envie de redescendre acheter de la confiture. Il ne rêvait que d'une douche et de pouvoir dormir jusqu'à leur de son raid. Une odeur forte l'alerta. C'était des effluves de peinture, et quand il alluma la lumière l'évidence lui sauta aux yeux. La confiture ne lui servirait plus à rien.

Tout l'appartement avait été repeint en rose, du sol au plafond. Tout. L'intérieur des placards, ses fringues, son clic-clac, son bureau... il paniqua en constatant les dégâts. Le clavier était mort. L'écran ne serait sans doute pas récupérable, mais peu importait tant que...

Il ouvrit le tiroir de la tour et sentit son cœur s'arrêter. Plus de pc. Il ne restait que les câbles et un mot.

« Tu préfères passer tes nuits avec lui qu'avec moi ? Je l'embarque, pauvre con. Je te le rendrai si tu viens t'excuser à genoux. Je t'attendrai dans une semaine à cinq heures du matin en bas de chez toi. Si tu ne viens pas je le balance. »

Il tomba à genou et gémit. La peinture gicla sur ses genoux. Amandine avait été si patiente avec lui, jusque là. Pas si patiente que ça en fait. Là, c'était complètement délirant. En fait, cette fille était dégénérée !

Il regarda autour de lui. Un énorme « Gros Con » turquoise ornait le mur au dessus de son canapé lit, dégoulinant sur le rose dont était recouvert tout le reste. Mais ça, à la limite, peu importait, il finirait bien par tout nettoyer, ou alors il repeindrait par dessus, peu importe. Mais rester une semaine sans pc, ça c'était impossible, et Amandine le savait très bien. Il fallait qu'il tente quelque chose, mais quoi ? Qu'est-ce qu'il pouvait faire sans ordinateur ?

Tout était si vide sans cette tour... si silencieux. Pas de musique, pas de mails, pas de jeux, pas de cours, pas de vie. Merde, c'était sa vie qui était là-dedans !

Il ouvrit grand les fenêtres pour laisser entrer l'air avant de finir asphyxié et s'assit sur le bord, se prenant la tête à deux mains. En bas, une bande de clodos faisaient la manche en écoutant de la musique trop forte. C'était un vieux rock braillard, mais Mika leur était presque reconnaissant de briser le silence.

Qu'est-ce qu'il allait faire ? Il ne pouvait pas attendre une semaine, impossible. Il avait des choses de prévues avec sa guilde cette nuit. Et puis si sa mère lui écrivait ?

Il laissa son sac, récupéra ses clefs et quitta l'appartement. Et s'arrêta net. Un problème n'arrivait jamais seul. La logeuse le dévisageait d'un air ahuri.

- Non, non non ! S'écria-t-elle Vous mettez de la peinture partout ! Mais qu'est-ce que c'est que ça ? 

La peinture rose dépassait de sous la porte et une petite flaque de quelques gouttes se formait devant l'entrée.

- Qu'est-ce que vous avez fait ? Je vous préviens que s'il y a des dégâts dans l'appartement vous ne reverrez jamais votre caution.

- Oui, madame. Désolée, madame. Pardon madame.

Mika ôta ses chaussures pour continuer son chemin à pieds. Pour une fois qu'elle avait de bonne raisons de le haïr... la caution était pour l'instant le cadet de ses soucis. Il ne se chaussa qu'une fois dehors et se mit à courir en direction du quartier de l'université. Il était allé une fois chez cette fille. Comment aurait-il pu se douter qu'elle était dangereuse, qu'elle avait un grain ! Mais il n'était qu'un homme et il avait été séduit par sa poitrine arrondie par ses soutien-gorge fantaisistes, et ses petits hauts en résille fluo qui ne cachaient rien, absolument rien de sa divine anatomie. Maintenant il le regrettait, il se disait qu'il aimait vivre dangereusement, mais de toute évidence, il y avait des conséquences qu'il n'était pas capable d'assumer. L'enlèvement de son ordinateur en était une.

CALMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant