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Le scintillement au loin, Lee l'avait interprété comme la menace d'une bataille. Les Carliers avaient attendu, rien n'était venu de la nuit, mais dès le début de l'après-midi suivant, les Artiseurs, jamais pressés, lui avaient donné raison.

Une attaque d'Artiseur, ça n'avait rien à voir avec une attaque de MnMoloch. Les Artiseurs étaient nombreux, très nombreux. Un clan comptait trente à quarante membres et c'est huit clans qui s'approchaient de la vieille Boite en rang d'ognon.

Comme dans les jeux, les Artiseurs étaient méthodiques et précis, tout avait été planifié, les options étudiées, le terrain maitrisé.

Médusé, Mika vit Law-Lord et Osa marcher côte à côte. La robe d'Osa était pratique bien que complexe et une lourde ceinture pesait sur ses hanches. Son fusil en bandoulière pouvait rivaliser en qualité avec celui que Fabio avait volé aux Stealside. Elle était belle et plus guerrière que jamais. Mais quand elle vit Mika, elle lui fit un petit signe de la main et lui sourit, elle avait vraiment l'air heureuse de le voir, elle semblait excitée par la bataille qui s'annonçait. Elle était en train de jouer, et elle prenait son pied. Mika en était tout content, même s'ils n'étaient plus dans le même camp.

— On fait quoi ? demanda Fabio.

— On ne fait rien, répondit Lee Tsu Hiko en retrait derrière les vigiles. On attend qu'ils déclarent une bataille, et on les laisse entrer. Une fois dans le hall, on les tue. C'est encore là qu'on sera le plus fort. Hors de question qu'on les affronte dans leurs horaires. On n'est pas assez nombreux, et la moindre perte nous serait fatale contre les MnMolochs.

Le soleil était encore haut dans le ciel, mais l'après-midi lyxir s'était achevé et la soirée Artiseur commençait. Les clans continuaient de s'organiser, et Mika commença à voir certains d'entre eux dévoiler des tourelles, déployer des câbles partout, du matériel compliqué... Et au milieu d'eux Osa organisait, donnait des ordres, répondait aux problèmes. Elle avait son propre clan, comprit Mika à force de l'observer. Law Lord avec son chapeau de travers était plutôt dans les travaux manuels et la formation sur le tas.

— Ils n'annonceront pas de bataille, souffla Keii en posant son bras sur l'épaule de Mika pour s'appuyer. C'est un siège...

L'idée fit son chemin dans la tête de Mika. Un siège... Couper l'arrivée des alliés, empêcher toute sortie... Ça avait l'air cool ! Les Artiseurs avaient des idées sympa...

Son téléphone sonna. Un appel... c'était tellement rare qu'il en fut surpris, d'autant plus quand il vit s'afficher le nom du contact : Bloody Adélie.

— Salut Mika ! Alors, tu flippes ? demanda Osa avec un sourire dans la voix.

— Tu plaisantes, répondit-il amusé ? On est au chaud, tranquille, et on boit des bières en jouant aux jeux vidéo, là.

— C'est ça. Comment vas-tu ?

— Toujours aussi bien, assura Mika en répondant aux signes qu'elle lui faisait de loin. Et toi ?

— Génial. C'est à toi que j'ai parlé, l'autre jour, si j'ai bien compris. Tu avais pris les traits de Fabio, c'est bien ça ? Tu fais des illusions maintenant ?

— Oui, on dirait bien. Tu m'en veux de t'avoir mystifiée ?

— Non, assura-t-elle. Mais ça t'aurait fait bizarre si je t'avais sauté dessus.

Il rit.

— Ne m'en parle pas. Alors... ça s'est bien passé, ce transfert ?

— Oui. J'ai fait destituer le président actuel et relancé les votes. J'aurais pu me présenter, mais je n'en avais pas envie, ce n'est pas mon truc. Par contre, j'ai monté un clan avec Law. Nous sommes le clan Bloody Lords. Ça sonne bien, non ? 

— Oui. Et tu ne regrettes pas d'avoir quitté les Carliers ? 

— Franchement ? Non. Après avoir tenté tous les peuples, je sais que je suis une Artiseur. C'est ça qui me plait. Les Carliers, ce n'était pas franchement ma tasse de thé. Vos intrigues de cours étaient assez minables et ont cédé à la première tension. C'est bien plus tendu et maitrisé, ici. Mais j'ai quand même perdu quelque chose auquel je tenais. Vous me manquez. J'aimais notre équipe, nos missions à quatre, nos soirées métal...

Mika resta silencieux. Oui, à lui aussi ça lui manquait même s'il n'avait pas vraiment retenté depuis, et c'était entièrement la faute d'Osa qui les avait laissés à trois et fait passer pour des parias. Ce n'était pourtant plus le cas depuis quelques jours, mais la situation n'était pas propice.

— Bon allez, j'ai une manucure à refaire. Tu salues Ian et Fabio de ma part ?

— Pas de problème, répondit Mika. Baisse pas trop longtemps les yeux sur ton vernis, Osa, parce que tu risques de ne pas nous voir venir.

— C'est ça... ricana-t-elle. Venez donc qu'on s'amuse un peu.

— À tout de suite, susurra-t-il avant de raccrocher.

D'un coup d'œil, Mika comprit que toute l'équipe avait entendu la conversation, et pas seulement. Ça en amusait certains, mais d'autres autour d'eux trouvait cela gênant qu'il fraternise aussi ouvertement avec l'ennemi. Mika, lui, n'en avait rien à faire et il se contenta de surveiller avec les autres la progression des installations. 

CALMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant