25.5

15 4 2
                                    


Ian ne frimait plus cette fois. Plus de cabrioles. Il avait les épaules rentrées, il courait vite et son regard était rivé vers l'avant, là où on commençait à voir d'où venait la menace.

Des militaires de l'OGRS tiraient sans pitié sur tout ce qui passait à sa portée. Mika assistait à des choses qu'il ne voulait pas voir dans le CALM. Une MnMoloch soulevait deux Artiseurs qui gémissaient de douleur, blessés. Des Carliers en poussaient d'autres qui avaient été aveuglés par des gaz toxiques. À cause de leur barrage, les Artiseurs avaient été les premiers à souffrir de l'assaut et les dégâts étaient impensables, atroces.

— Mika ! 

Cette voix. Thor Senu montrait un groupe de prisonniers Artiseurs.

— On y va, approuva Ian.

Les deux Carliers se mêlèrent aux MnMolochs et aux Artiseurs. Les Carliers étaient les meilleurs pour dévier les tirs, c'est à cela que Mika et Ian s'employèrent. Avec leur force, les MnMolochs repoussèrent les humains. Autour, les Artiseurs organisaient la défense, pointaient les faiblesses de l'ennemi, et c'est eux qui prirent en charge les prisonniers malgré les feux nourris. C'était l'enfer.

Mika n'avait jamais donné un coup qui fasse vraiment mal à un adversaire, qui tranche dans la chaire et fasse gicler le sang, et il ne s'en remettait pas. Pourtant, il avançait, parce qu'il était un protecteur et qu'il fallait tirer le plus de monde possible de là. Mais Mist tremblait. La crosse d'un militaire le percuta au visage. La douleur irradia dans son corps et ses oreilles se mirent à siffler. Thor le soutint en renversa l'homme d'un coup de fendoir. Il se prit un tir dans l'épaule et gronda de douleur. En le couvrant, Mika aussi se fit tirer dessus. La douleur était si intense que c'était à peine s'il pouvait respirer. Le suivant aurait pu le tuer, mais la balle dévia à peine, se contentant d'érafler sa gorge. Mika remercia mentalement Adam dont il reconnaissait la magie.

— Il faut reculer, haleta-t-il. On ne tient plus.

Les humains étaient de plus en plus nombreux, ils avançaient droit vers la Vieille Boite, en rangs serrés.

— Retraite, approuva Ian.

Tous reculèrent. Quand Mika se retourna, il se trouva nez à nez avec Osa qui le tenait en joue avec un fusil. Non, pas lui, les hommes derrière lui. Il se précipita vers elle, la souleva et elle prit appuie à son épaule pour continuer à les couvrir. Tous se mirent à courir, rejoignant Adam qui reculait pas à pas. Ils aidèrent les derniers à entrer dans la Boite et quand il ne resta plus un seul joueur à secourir, on ferma les portes.

À l'intérieur, c'était l'horreur. De nombreux blessés étaient en attente de soin, et les soigneurs impuissants ne pouvaient que panser et désinfecter avec ce qu'ils avaient sous la main, pas grand-chose dans la Vieille Boite encore trop vide.

Mika tomba à genou. La douleur irradiait dans son ventre, là où une balle avait perforé sa peau et ses muscles. Il toussa, l'odeur du gaz lacrymogène l'empêchait de respirer.

— Mika, Mika ! appela Osa en lui tapant sur la joue. Ça va aller, ouvre les yeux...

Il obéit et la dévisagea. Elle déchirait sa robe pour faire des bandages, elle pleurait, les yeux rouges, le corps secoué de sanglots nerveux. Elle poussa Mika en arrière pour examiner la plaie, blême. Adam s'agenouilla à côté de lui.

— Ne le touche pas avec ta lame tant que tu ne l'as pas stérilisé, gronda-t-il.

Mika les regardait, assommé. Il avait mal, mais finalement, ce n'était pas le pire. Le pire, c'était ces hommes dehors qui n'allaient pas tarder à entrer et qui allaient tous les tuer. Une barrière de MnMolochs tenait les portes, mais déjà ils commençaient à essayer de les enfoncer. La magie fonctionnait encore, elle fonctionnerait tant que les humains ne la constataient pas de leurs yeux. Sans elle, toute la Boite se serait déjà effondrée. Mika observait ce phénomène quand il comprit qu'il se passait quelque chose d'étrange. Osa et Adam se regardaient d'un air interdit.

— Quoi ? demanda-t-il.

— Je t'ai soigné, répondit Adam. Ça n'aurait pas dû marcher, mais je t'ai soigné...

— Essaye sur quelqu'un d'autre pressa Osa.

Adam obéit et se tourna vers Thor Senu qui était en train de se faire bander l'épaule. La plaie resta vive, quoi qu'Adam fasse.

— Tu as été blessé par un allier ? demanda Adam perplexe.

— Non, j'ai vu le tireur, et je sais bien que c'était un humain.

— Moi, un jour, j'ai survécu au tir d'un sniper humain. Je suis morte sur le coup, mais je me suis réveillée le lendemain, assura Keii.

— Non, répondit Ian. Le sniper en question était déjà sous ma coupe, dans le jeu, c'était Al Ankou Des. Ses tirs n'étaient déjà plus mortels. Le MJ n'a jamais laissé un assassin en état d'attaquer.

Mika se releva. Il n'avait plus rien. Plus aucune des coupures, plus d'hématomes malgré tout les coups qu'il avait reçus en allant sauver les prisonniers. Il se sentait bien... Alors pourquoi Adam ne pouvait pas soigner les autres ?

— C'est parce que tu es l'Élu, déclara Ian avec aplomb comme s'il avait lu dans ses pensées. Ça veut dire que tu vas pouvoir nous défendre.

Pour Mika, c'était irréaliste. Pourquoi il lui disait ça ? Ce n'était plus un jeu, là. C'était réel, avec de vraies plaies... alors pourquoi on parlait encore d'élu ? Ça, il n'arrivait pas à le comprendre. Soit c'était un jeu, soit ça n'en était pas un.

— Votre attention ! intervint une voix de femme au-dessus de tout le monde.

Une lyxir magnifique dans sa robe blanche lévitait au-dessus de tout le monde.

— Le Sanctuaire de la Vieille Boite ne tiendra pas indéfiniment et est trop petit pour accueillir autant de monde. Afin de tous vous mettre en sécurité et de prendre en charge les blessés, nous vous accueillons dans le Royaume. Veuillez passer par le portail.

Une grande lumière de forme ovale apparut au centre de la pièce, des Lyxirs en sortirent et guidèrent tout le monde à l'intérieur, aidant tous les blessés.

— Tout le monde, insista la reine qui lévitait toujours au-dessus du Chaos. Même vous, Davan. Nous protégeons les portes, mais nous ne pourrons pas tenir éternellement. Nous avons besoin de nos forces ailleurs. Dépêchez-vous. Commencez par les blessés !

CALMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant