10. ABANDON (Partie XXII)

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J'en eus tout à coup assez d'être là. J'avais la désagréable sensation de me figer de l'intérieur, comme envahie par une vague de glace dont les pointes acérées transperçaient ma chair meurtrie. Je ne pouvais plus supporter ça. Je ne le voulais plus. J'avais besoin de prendre l'air. Attrapant un morceau de papier sur la table, je griffonnai un message à la hâte.

Vais faire un tour dehors. Besoin de me changer les idées. Je reviens vite.

Je t'aime.

Sur ce, je partis du cottage et me demandai s'il serait bien nécessaire de prendre ma voiture. Je pouvais courir, c'est vrai, mais je n'en avais aucune envie aujourd'hui. Un vent glacial soufflait et caressait mes bras nus.

Étrangement, la sensation fut plutôt désagréable. Non pas que j'eusse froid, mais ce souffle glacé paraissait vouloir me pousser en avant, comme un iceberg à la dérive. Je fis donc une remontée discrète vers le garage, faisant en sorte de ne pas être vue. Je n'avais aucune envie que l'on me pose des questions, j'avais simplement besoin de m'évader un peu.

L'hiver venait tout juste de s'installer sur Forks, recouvrant la ville d'un épais manteau blanc. Il s'était mis à neiger quelques jours plus tôt, juste à temps pour Noël. Ce jour de fête n'en avait été un ni pour moi, ni pour aucun membre de la famille d'ailleurs et la situation avait comme un goût de déjà-vu – avec un je ne sais quoi de pire, cependant.

L'année dernière, notre cas était tout aussi désespéré – nous étions tous menacés de mort – mais j'avais passé ce que j'avais supposé être mes derniers instants en compagnie de tous ceux que j'aimais, sans exception. Cette fois-ci, les choses étaient différentes. Trop de monde manquait à l'appel.

Je contemplai les flocons de neige d'une blancheur parfaite qui tombaient du ciel et qui venaient s'écraser contre la baie vitrée du salon. Le sol était immaculé, juste entamé à certains endroits par le goutte-à-goutte des branches d'arbres, incapables de supporter le poids de la neige fraîche. Tout était incroyablement silencieux. Même la nature semblait vouloir nous accompagner dans l'abîme de silence qui était devenu le nôtre. Il ne se passait rien. Le néant.

J'espérais qu'Edward ne m'en voudrait pas trop de prendre la poudre d'escampette, mais il en allait à présent de mon équilibre psychique. S'il ne voulait pas me voir flancher, il valait mieux que je m'éloigne.

Je mis le contact et m'engageai sur l'allée de terre avant de gagner la nationale. Je choisis de me laisser guider au hasard. J'avais juste besoin de rouler, peu importait la destination. J'eus un pincement au cœur en passant devant la Réserve. Voir Jacob souffrir autant participait à mon désespoir.

Heureusement, il était revenu parmi nous, ce qui était le principal à mes yeux - pour l'instant, du moins. Il m'avait bien trop manqué pendant ces trois semaines d'absence - ainsi qu'à son père - pendant lesquelles nous avions imaginé les pires scénarios le concernant. Cependant, je savais que la situation ne durerait plus très longtemps. D'ici peu, quelque chose changerait forcément.

TWILIGHT - RÉVOLUTION (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant