J'ouvris finalement le robinet d'eau froide et commençai à me débarbouiller. Le résultat ne fut pas concluant. Mon maquillage - Alice avait tenu à me montrer une dernière fois avant son départ ses talents en la matière - se montrait tenace. Je cherchai alors, parmi la multitude de produits de beauté qui surchargeaient le comptoir, celui qui serait susceptible d'en venir à bout.
Je dénichai finalement le flacon lorsque mon attention se reporta sur un petit écrin blanc, renfermant une paire de lentilles de contact. Je saisis l'objet entre mes mains et l'envoyai valser dans la corbeille sous l'évier. Il y avait désormais un bon moment que je n'avais plus à recourir à ce genre de subterfuge pour cacher mon regard flamboyant à mon père ou à tout autre humain - bien que mes contacts avec ces derniers soient rares.
Lorsque mes prunelles avaient définitivement tourné à l'ambre, je m'étais décidée à ne plus les porter et m'étais sentie soulagée de ne plus avoir à subir la gêne qu'occasionnaient leurs imperfections. Bien sûr, je m'étais montrée inquiète au sujet de Charlie. Il serait bouleversé par ce changement considérable, c'était à n'en pas douter. Et il s'était en effet montré choqué de cette différence saisissante.
Il avait eu une réaction identique à la mienne lorsque j'avais découvert pour la première fois le feu qui se consumait dans mes prunelles. Une fois le choc initial passé cependant, Charlie avait déclaré que malgré toutes les bizarreries qui m'entouraient, je resterais toujours la même à ses yeux.
La boule qui avait obstrué ma gorge m'avait empêchée de lâcher le moindre mot et je l'avais alors serré dans mes bras. Mon père avait rougi jusqu'à la racine des quelques cheveux qu'il lui restait. Penser à Charlie me fit reprendre pied dans la réalité. J'espérais qu'il était en meilleur état que moi. Je décidai de lui rendre visite dès le lendemain.
Je commençai à enlever la crasse de mon visage, mais à la vue de mes cheveux, j'en conclus que le plus simple était encore de prendre une douche. Je me débarrassai de mes habits collants, puis récupérai la robe dos-nu que j'avais trouvé dans la penderie d'Alice. J'avais été forcée de constater que c'était la seule tenue « simple » qu'elle avait laissé.
Je restai sous le jet d'eau tiède pendant un bon moment et finis par me résoudre à sortir de la douche. Je me séchai rapidement, enfilai ma tenue propre et enveloppai mes cheveux dans une serviette. Je jetai ensuite mon drap de bain et mes habits dans la panière de linge sale. Puis, je me plaçai à nouveau devant le miroir et observai le résultat.
Enfin, mon reflet était de nouveau parfait, seule une légère teinte mauve soulignait mon regard. Je démêlai mes cheveux et ne pris pas la peine de me remaquiller. Ouvrant la porte de la salle de bain, je regardai une dernière fois la pendule et retins un hoquet de surprise. À nouveau, seul cinq petites minutes venaient de s'écouler. J'étais condamnée. Condamnée à errer pendant un laps de temps indéfini dans les limbes de la douleur.
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TWILIGHT - RÉVOLUTION (Tome 1)
Hayran Kurgu"Je me demandais combien de sillons le chagrin creuserait encore dans ma poitrine. Combien de temps encore allais-je devoir me débattre avec ma peine ? [...] Je me mis à sangloter en silence, le cœur douloureux. C'était inutile, je ne m'en sortirais...