Chapitre 96 - Mal d'enfant

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Quand Noah traversa la rue pour se rendre à la clinique, il ressentit quelque chose d'étrange. Il allait droit devant, comme il l'avait toujours fait, ne manquant ni de courage, ni de volonté. Derrière lui, il laissait Léa. Il la retrouverait plus tard, tout simplement.

Léa aussi avait un sentiment étrange, quand elle vit la haute silhouette familière disparaître derrière la porte vitrée de la clinique. Elle chassa ses pensées moroses de son esprit. Elle n'était pas ce genre de personne, à trop écouter ses intuitions, ses craintes, ses peurs, ou à perdre du temps en interrogations qu'elle jugeait vaines.

A quoi bon redouter ce qui n'était pas encore advenu, et qui n'adviendrait peut-être pas ?

***

Noah demanda à la secrétaire de consulter à nouveau le Docteur Victorino, prétextant avoir des précisions à apporter au médecin, en lui faisant comprendre qu'il profitait d'une absence de sa femme pour le faire.

- « Je vous laisse patienter quelques minutes en salle d'attente, Mr Faivre »

Noah prit la direction de la pièce, mais ne s'y arrêta pas. Ca n'était pas son but, bien sûr.

Dans le couloir, il scruta un plan d'évacuation du bâtiment en cas d'incendie, afin de mieux se repérer dans la clinique. Il visualisa la localisation du laboratoire ; il voulait s'y introduire, à la recherche d'indices ou de preuves.

Il se demanda ce qu'il pourrait faire de tous ces éléments, une fois qu'il les aurait trouvés. Il savait qu'il n'avait strictement aucune légitimité pour effectuer cette enquête. Alors comment transmettre aux autorités compétentes, dans ce pays étranger, les informations qu'il récolterait dans les moments à venir ?

Et puis il se posait une autre question. Une question qui allait loin, au plus profond de sa conscience : son supérieur et Madame le Juge devaient-ils savoir qu'il soupçonnait le laborantin et le Dr Victorino, d'avoir dérobé deux de leurs embryons ?

Si tel était le cas, s'il en trouvait la preuve, Noah pensa qu'il devrait le leur dire. Ils avaient le droit de savoir, même si cette vérité serait traumatisante, et constituerait le point de départ de questionnements douloureux et infinis. Il en parlerait à Léa ; car si toutefois elle parvenait à se projeter suffisamment dans des sentiments qui lui étaient jusqu'à présent presque totalement étrangers, son avis l'aiderait à conforter son choix.

Noah sourit en évoquant cette jeune-femme insaisissable qui pourtant ne le quittait plus. Il avait bien aimé leur complicité grandissante depuis plusieurs jours, et son implication, les balbutiements d'une sensibilité nouvelle. Au Docteur Victorino, elle avait tellement bien décrit la souffrance de ne pouvoir concevoir d'enfant, comme si elle avait pu se la représenter... Noah en avait été surpris, et ému.

Mais pour le moment, il devait poursuivre ses recherches. Il parlerait de tout cela à Marquand en temps voulu.

Faisant appel à son courage, celui qui ne lui manquait jamais, Noah s'avança d'un pas déterminé, en direction du laboratoire.

***

Manuel et Rodolfo Victorino suivaient chacun de ses mouvements, les yeux rivés aux écrans des caméras de vidéo-surveillance.

- Même s'il parvenait à entrer dans le labo, il n'y a plus rien à trouver. Les embryons sont transférés, et là où ils sont, personne n'ira les chercher !

- Ce qui m'interpelle... C'est que j'aimerais comprendre ce qui l'a mis sur la piste. Pourquoi il fouine dans nos affaires à Paris, et ici à présent ? Il n'est pas arrivé à se poser des questions tout seul ! Quelqu'un l'a aidé, non ?

La Peur du VideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant