Chapitre 103 : Post Mortem

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Quand la voiture du Lieutenant Velonzio stationna devant un bâtiment sans charme, Marquand et Léa eurent besoin d'un certain temps avant de trouver le courage de quitter le havre de protection, certes illusoire, que constituait le véhicule.

Ils savaient bien sûr que les moments à venir ne seraient pas faciles à vivre.

- Ca va aller ? Demanda Marquand.

Léa hocha courageusement la tête. Son caractère résolu lui était terriblement utile en ces heures difficiles. Et puis elle n'était pas seule. Même si elle sentait Marquand très à vif, inquiet, tendu, elle savait surtout qu'il était là, présent, prêt à continuer à l'épauler. Et à partager ses émotions.

- On y va ? Demanda le Lieutenant Velonzio.

- On y va, répondirent Marquand et Léa avec la même voix chargée d'appréhension, comme si leurs cordes vocales étaient engourdies.

Peut-être qu'elles l'étaient un peu, parce que personne n'aurait pu leur faire croire que la tristesse de leurs sentiments, n'avait aucune incidence sur leur corps, qui leur semblait comme anesthésié.

- Souhaitez-vous m'accompagner pour écouter les conclusions du médecin légiste ? Leur demanda le Lieutenant Velonzio.

Léa et Marquand se regardèrent;

Une jeune-femme qui se découvrait bien plus amoureuse qu'elle ne l'avait pensé.

Et un homme qui était un collègue en premier lieu, mais devenu ami au fil du temps, et par l'intensité des obstacles franchis ensemble.

Pourraient-ils entendre les mots bruts et froids du professionnel qui expliquerait ce qui avait causé la mort de Noah ?

Le médecin légiste sortit d'une pièce. Marquand et Léa le comprirent vite lorsque le Lieutenant Velonzio le héla en utilisant son titre de médecin.

Ils se crispèrent instinctivement tous les deux.

Le Lieutenant Velonzio s'approcha du légiste. Marquand interrogea Léa du regard. Elle secoua doucement la tête en signe de dénégation.

Non, elle n'était pas prête à entendre.

Marquand n'en avait pas envie non plus, mais son côté pragmatique et fonceur lui permettaient d'aller au-delà de son appréhension.

Il avait besoin de comprendre, parce que l'action était, encore et toujours, son principal moyen d'avancer et de se confronter.

Il savait que foncer, interroger, enquêter, pourchasser même, c'est ce qui l'aiderait à tenir les jours à venir.

Léa et Marquand n'affronteraient pas les difficultés de la même manière. Ils n'avaient pas non plus le même lien à Noah, bien sûr. Ils n'étaient pas prêts à entendre la même vérité, aussi forts soient-ils l'un et l'autre.

Cela sous-entendait que Léa devrait abandonner le poignet de Marquand, qu'elle n'avait pas lâché depuis l'arrivée du Commandant à Barcelone, s'accrochant instinctivement à lui. Ca n'était pas une question de faiblesse ou de besoin de se reposer sur la carrure d'un homme d'apparence fiable. Après tout, Léa n'avait jamais eu besoin de ça pour avancer dans la vie, bien au contraire.

C'était juste qu'elle se sentait comme orpheline, orpheline d'une sorte d'âme soeur, et qu'elle ressentait la même douleur et la même béance chez Marquand. Alors tenir son poignet dans sa main, c'était une forme d'union de leurs plaies, de leurs solitudes. Une sorte de solidarité purement instinctive entre deux humains endeuillés.

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