Chapitre 109 : Caminar por la Vida

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Léa s'empara de l'information. Avoir enfin le droit de lancer des recherches officielles contre ceux qui avaient tué Noah, elle le sentait, c'était quelque chose qui allait l'aider. Son énergie se déploierait, canaliserait sa colère, la pousserait à retrouver ces deux hommes qui avaient bouleversé sa vie.

Elle avait compris, dans la douleur, qu'elle était capable d'aimer, et d'aimer pour toujours.

Seulement, elle avait été violemment privée de celui qui avait fait naître ce sentiment, en n'imposant rien, en se réjouissant de tout.

Ca lui servait à quoi , de savoir qu' elle pouvait aimer un homme bien plus fort que l'élan qui la poussait vers la liberté, si cet homme n'était plus ?

Est-ce que cela serait possible une seconde fois ? Y aurait-il une autre chance que la vie mette sur son chemin une personne capable de comprendre son farouche et ambivalent besoin d'indépendance ?

Noah avait si bien su louvoyer entre les pièges que pouvait générer la quête de Léa.

Il savait si bien faire semblant de ne pas être amoureux, tout en montrant le contraire. Il prétendait si bien la l aisser choisir, tout en aimant la guider discrètement. Solide pour l'épauler, pour la rassurer.

Et puis honnête surtout, même dans les moments où tous les deux faisaient semblant de ne pas être attachés l'un à l 'autre. Un jeu de dupes auquel ils avaient tellement aimé jouer. Noah qui faisait croire que rien de tout cela ne le touchait. Noah qui savait bien plus que Léa, à quel point ils étaient indissociables.

Léa constatait avec amertume que le libre-arbitre des humains, valeur qu'elle plaçai t au- dessus de toutes les autres, n'était finalement qu' un leurre, pour beaucoup d' entre eux.

Ils préféraient s'aveugler, se mentir, s'enliser dans des convictions qui n'étaient même pas les leurs, croyant, ultime ironie de leur vacuité, que toutes ces idées et ces valeurs étaient les leurs, choisies librement.

Peut-être aussi que c'étai t une des choses qu'elle appréciait chez Marquand : elle ressentait, sous la carapace qu'il endossait vaille que vaille, la même prise de conscience, que celle qui la guidait elle-même vers l' essentiel.

Elle voyait en lui bien plus qu'un homme de conviction et de caractère.

Elle sentait qu'il avait compris, lui aussi, que la plus grande liberté, c'était celle de l'esprit qui avance, et qui se questionne sans artifice.

Marquand avec ses embryons volés.

Elle, avec son amour brisé.

Ils s' étaient bien trouvés tous les deux, et le morceau de chemin qu'ils avaient encore à faire ensemble, n'en serait que plus aisé.

Dolorès Velonzio était là, vaillante, fiable, fidèle au poste, prête à continuer à avancer. Lorsqu'elle commença à mettre la main sur des éléments qui dirigeaient l'enquête en direction du Pérou, Léa prit quelques secondes pour observer la scène devant elle.

- « On forme une bonne équipe, tous les trois ».

***

Sans le savoir, c' était à cette équipe improvisée que Manuel tentait de se soustrai re. Marchant sans relâche dans le jour qui se terminait, il espérait apercevoir quelques habitations, dont la vue apaiserait enfin l'angoisse qui se faisait de plus en plus présente dans son esprit.

Chaque pas l'éloignait de ses repères, de sa vie d'avant. Chaque pas le rapprochait d'un futur dont il ne maîtrisait presque rien. Il rêvait d'un indice, d'un signe, qui lui indique de quoi son avenir serait fait. Lui qui n'avait toujours connu que la stabilité et les certitudes, il découvrait avec effroi ce qu'était évoluer dans un monde où tout paraissait inhospitalier. Ce sentiment de perdre la maîtrise des événements lui fit même envisager, l'espace de quelques secondes, l'idée de se rendre.

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