Chapitre 104 : Double peine

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- Bon, on récapitule ?

Installé dans le bureau du Lieutenant Velonzio, près de Léa, qui luttait de toutes ses forces pour rester concentrée et ne pas se remémorer les moments difficiles passés à la morgue, Marquand se contraignait à ne penser qu'à des éléments concrets.

C'était sa force, cette capacité d'abstraction et de mise à l'écart de ce qui pouvait poser problème. Ca l'aidait à se préserver, et aussi à être efficace.

Dolores Velonzio prit la parole pour résumer les éléments en leur possession.

- Le légiste a pu isoler différents ADN qu'il va confronter à la banque de données Européennes. Et comme les fuyards ont laissé quelques affaires personnelles dans la clinique avant de partir, on va aussi pouvoir chercher des similitudes.

- Ils seront loin, à ce moment-là, maugréa Marquand, la mâchoire crispée.

- On ne peut pas lancer de mandat d'arrêt international pour le moment, vous le savez Commandant ! On peut juste essayer de suivre leur piste.

Marquand soupira ; il savait tout ça. Mais il avait tellement envie de mettre la main sur les meurtriers de Noah. Et aussi sur ces personnes sans morale, qui avaient probablement volé des Moitiés-d'Eux.

Seulement pour lui, actuellement, c'était trop douloureux à évoquer, ne serait-ce que par la pensée. Alors la facilité, et la nécessité d'un minimum de répit, lui imposaient de ne pas plonger dans cette hypothèse aussi probable que terrifiante.

Léa prit le relais. Et si Marquand avait plus de facilité qu'elle à évoquer le meurtre de Noah, elle, en contrepartie, elle trouvait moins douloureux de se concentrer sur le couple receveur des embryons. A leur manière, ils étaient plutôt complémentaires.

- Et le couple d'origine Nordique, demanda-t-elle. Vous avez pu avoir un début de piste ?

Le Lieutenant Velonzio expliqua que les propriétaires de l'hôtel étaient actuellement sollicités pour dresser leur portrait-robot, et que la contribution de Léa serait la bienvenue pour les compléter.

Dès que les portraits seraient établis, ils seraient transmis au personnel de l'aéroport et des douanes afin de savoir s'ils y avaient été vus, et sous quelle identité. Les policiers en profiteraient également pour continuer à déterminer les possibles trajectoires de Victorino et Manuel, en interrogeant leurs collègues de manière informelle.

Léa demanda doucement :

- On devrait peut-être se pencher sur le nom d'emprunt que le couple a utilisé à l'hôtel ? Il y a peut-être des liens à imaginer de ce côté-là ! Ils peuvent avoir choisi le nom d'amis ou de proches, ou de quelque chose qui leur serait familier ?

Le Lieutenant, qui avait déjà pensé à explorer cette idée, approuva et leur proposa même de participer.

Mais Marquand refusa clairement.

- C'est comme si je devais entrer dans leurs pensées. Et je ne peux pas essayer de savoir ce qui se passe dans la tête de gens qui acceptent des embryons volés.

Il se leva et commença à marcher de long en large dans le bureau.

- Ils ne savaient peut-être pas ? murmura Léa avec douceur à son intention.

Elle n'avait pas ressenti de malaise en les croisant. Juste leur immense détresse. Mais bien sûr, elle ne pouvait pas en être certaine.

Et Marquand ne méritait pas de fausses réassurances.

La Peur du VideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant