Chapitre 73 - A corps perdu

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Le soleil se leva avec peine ce mardi matin-là.

La journée s'annonçait brumeuse.

Elle s'annonçait chargée aussi :

Marquand s'empara de son portable qui sonnait sur sa table de nuit. Vite, redonner à la pièce le calme qui y régnait encore quelques secondes auparavant.

Laisser Alice dormir, elle en avait tant besoin.

Il prit un instant pour l'observer. Ses traits étaient détendus, elle avait passé toute la nuit en se serrant contre lui, plaquant sa main chaude sur son ventre pour se soulager. Bien sûr, il l'avait laissé faire. Il avait tellement l'impression de ne servir à rien depuis le début. Et elle s'était si peu confiée, essayant de lui masquer les traces sur ses cuisses.

Mais il les avait vues, évidemment. La nuit, quand elle dormait enfin, il passait longuement ses mains sur ses hématomes, un peu come si elles avaient une sorte de pouvoir magique, qui les aiderait à se résorber.

Bien sûr ça ne changeait rien. Mais c'était sa manière à lui, pudique, discrète, de s'impliquer et de compatir.

Il décrocha le téléphone et essaya de dégager son autre main, qu'Alice continuait dans son sommeil à presser contre son ventre. Il ne voulait pas parler dans la chambre, il voulait qu'elle se repose encore.

- Attend Noah, attend, je sors du lit !

Alice soupira dans son sommeil, surtout quand elle ne sentit plus contre elle la rassurante présence de cet homme aux manières si douces, quand il voulait s'en donner la peine.

Elle l'entendit parler au loin et le son rassurant de sa voix rauque lui permit de se rendormir avec un début de sourire sur ses lèvres.

- Bon Noah, raconte ! Je t'écoute.

Il s'imprégna des informations transmises par son Lieutenant.

Il avait tellement espéré ne pas avoir à réveiller Alice. Mais il n'y aurait pas le choix.

Un meurtre. Dans un hôpital psychiatrique.

Un suspect potentiel. Qui évidemment niait toute implication.

Une logique de fou, en quelque sorte...


- Fred ? Pourquoi tu es déjà levé ?

Marquand se tourna vers elle. Pour une fois, il lui trouva presque l'air vulnérable. Elle était manifestement trop fatiguée pour trouver la force d'arborer cet air combatif et un peu fonceur qui ne la quittait que rarement.

Comme il était négligemment assis sur l'accoudoir du canapé, Alice s'approcha de lui lentement ; elle caressa doucement la peau douce de son cou, de sa nuque. Il leva son visage pour la regarder. Ils échangèrent un sourire qui n'appelait aucune parole. Ca n'était pas toujours le cas entre eux, loin de là, mais en cet instant, ils se comprenaient sans avoir besoin de se parler.

Doucement, Marquand posa sa joue tout contre le ventre d'Alice, tournant à peine la tête pour que ses lèvres effleurent sa peau.

- Non Fred, pas ça s'il-te-plaît, le supplia-t-elle.

La Peur du Vide venait de s'emparer d'elle, brutale, irrépressible.

Sa bouche contre son ventre vide, ça n'avait pas de sens si c'était pour un geste tendre.

Elle ne l'acceptait que quand elle savait qu'il s'agissait des prémices de moments intenses à venir.

- Hé, Alice ! Demain on ne parle plus de tout ça. Ca va aller.

La Peur du VideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant