Chapitre 21 - Retour attendu

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Alice avait décidé de reprendre le travail. La parenthèse avait duré juste le temps qu'il fallait, à mi-chemin entre un besoin de lâcher la pression, de se reconstruire un minimum, et le besoin de la retrouver. De faire ce qu'elle aimait faire, de retourner à la vie trépidante qu'elle avait toujours menée jusqu'à présent.

Elle avait besoin de retrouver cette part d'elle-même qui vivait dans l'activité sans fin, la décision, l'adrénaline ; elle avait à nouveau envie de rendre la Justice.

Elle s'était suffisamment penchée sur son nombril à son sens, et d'autres aussi d'ailleurs, pour diverses raisons et avec divers degrés d'implication.

Dr Devaux, pour lui sauver la vie.

Dr Rafael, pour lui rendre l'espoir de donner à nouveau la vie.

Marquand, pour lui faire sentir à chaque instant qu'elle était en vie.

Bien entendu elle l'avait accueilli avec joie dès lors qu'elle avait provoqué son retour du purgatoire où elle l'avait elle-même envoyé. Depuis cette nuit-là, il n'était plus reparti. Chacun de ses retours, en fin de journée, était un moment de plaisir : retrouvailles avec le Petit Paul qui, même s'il ne l'exprimait pas, paraissait heureux d'avoir à ses côtés cet homme qu'il avait toujours connu, seul personnage masculin stable dans sa vie, avec Jacques. L'homme et le petit garçon s'entendaient très bien, tout en complicité, en tendresse et en confiance. Alice appréciait à sa juste valeur l'infinie attention que Marquand portait à son fils ; parfois elle souriait même de le trouver plus protecteur avec Paul, qu'elle ne l'était elle-même.

Quand il rentrait le soir, elle avait toujours eu une idée, parfois simple, parfois plus recherchée, pour faire briller leur quotidien : une table joliment dressée, un verre de vin, ou un accueil plus personnalisé, qui laissait Marquand ébloui, haletant, lorsque Paul dormait déjà.

Le besoin de reprendre son travail était venu tout naturellement après sa dernière consultation auprès du Dr Devaux, rassurante.

Elle avait immédiatement prévenu Lemonnier, et elle avait souri d'entendre son bonheur transparaître à travers leur conversation téléphonique.

C'était le mois de mars, et il y avait une chose qui trottait dans la tête d'Alice, et qu'elle avait besoin de confronter avec la vie qu'elle menait habituellement.

Elle gardait en mémoire ce désagréable sentiment de vide qu'elle avait ressenti après ses retrouvailles charnelles avec le Commandant. Elle voulait savoir si c'était juste lié à cet instant, à cette conjoncture, ou si son malaise était plus profond.

En reprenant le chemin du Palais, en reprenant sa vie d'avant, peut-être qu'elle saurait.

***

Alice poussa la porte de son bureau.

Victor sautait dans tous les sens comme une puce.

- Oh... Bonjour Madame le Juge ! Oh, est-ce que je peux vous embrasser ?

- Mais oui Victor, bien sûr ! Mais juste pour aujourd'hui, hein !

Ils s'étreignirent affectueusement.

C'était bon d'être là.

Le téléphone sonna, Victor se précipita pour décrocher.

- Bureau du Juge Nevers j'écoute !... Ah, bonjour Commandant !

C'était bon de tout retrouver tel qu'elle l'avait laissé. De voir le bouquet de roses blanches et les petits chocolats, avec le café chaud qui l'attendaient.

La Peur du VideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant