La journée serait longue alors Marquand et Noah rejoignirent leurs collègues d'outre-Rhin dans leur salle de pause. L'interprète venait d'arriver et ils purent vider une cafetière en parlant à droite et à gauche. Marquand remarqua qu'il commençait à comprendre quelques mots de cette langue abrupte qui lui était auparavant encore totalement étrangère.
Il remarqua aussi qu'il prenait un certain plaisir à être avec ces hommes professionnels, mais aussi à l'humour potache quand les évènements n'imposaient pas une rigueur totale.
Pour l'heure en effet, pas de stress dans cette brigade d'intervention. Johann, l'interprète, avait apporté des viennoiseries, que toute la petite troupe de garde ce jour-là, s'empressa de dévorer dans un moment très convivial.
Mis à part qu'il ne comprenait pas toutes les plaisanteries, Marquand trouvait sympathiques ces hommes qui n'étaient pas bien différents de lui, de Noah, de leurs collègues. Leur humour n'était pas très éloigné de celui qui se pratiquait au 36, Quai des Orfèvres.
La seule chose qui le dérangeait, c'était quand les autres l'appelaient par son prénom.
« Frederik »
Une seule personne, à part sa mère, l'appelait par son prénom au complet.
Cette personne le prononçait d'une voix si douce, et avec cet accent presque chantant, un peu comme une sirène de la Mer du Nord qui l'aurait attiré.
Julia.
Son prénom resterait longtemps dans son esprit, aussi longtemps qu'il aurait l'occasion de penser à l'Allemagne.
Il serait à jamais associé à cette courte période de sa vie faite de fureur, de peur, de haine, de colère, de mort.
C'étaient les femmes qui l'avaient empêché de sombrer :
Juliette en lui prouvant par de petits gestes tendres et sa complicité, que la douceur et l'espoir existaient encore.
Les pensées et les regrets envers Alice quand il avait cru de pas sortir vivant de la cave. La peur de quitter le monde sans avoir pu lui dire que c'était elle qui comptait comme aucune autre femme ne compterait jamais dans sa vie.
Et puis Julia, qui l'avait enveloppé de sa douceur un peu ambiguë, prenant soin de ses plaies et se donnant à lui en toute simplicité pour qu'il se sente à nouveau vivant.
Pourtant par les femmes arrivait aussi sa perte :
Le conflit qu'il avait amplifié de manière totalement irrationnelle avec Alice.
La fuite pour sauver une des autres femmes de sa vie, sa fille Juliette. Ca l'avait entraîné au bout de l'Europe dans une traque qui aurait pu leur coûter la vie.
L'oubli dans les bras de cette jolie Julia, avec ses allures enfantines et sa confiance naturelle en elle-même, qui lui avaient permis sans combat, de vaincre toutes les réticences du Commandant. Un oubli de quelques heures seulement, mais jamais cette journée et cette nuit où il avait aimé une autre qu'Alice, ne parviendraient à s'effacer de sa mémoire.
L'oubli, ce serait si facile pourtant.
Mais Marquand ne voulait pas.
Souvent il avait tiré les ficelles de la facilité au cours de sa vie ; ça n'étaient pas les moments de son existence dont il était le plus fier.
Il n'y aurait plus de solution de facilité à présent dans sa vie.
Il en avait fait le choix ces dernières heures, quand le froid l'engluait petit-à-petit sur le muret face à la porte de Brandebourg.
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La Peur du Vide
FanfictionFan-fiction faisant suite à la série Française "Alice Nevers, le Juge est une femme" (Suite de la saison 12 diffusée au printemps 2014). Alice Nevers est Juge d'Instruction à Paris. Elle mène une vie bien remplie, avec son fils Paul, de 5 ans, issu...