Chapitre 49

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L'infirmier coupa le moteur et demanda à Yoongi de ne pas bouger : il attacha l'antivol et revint ensuite auprès de l'aveugle.

« Tu nous a amenés où ? lui demanda-t-il d'ailleurs.

- Bah, je savais pas trop où aller pour éviter la foule, on est à Séoul quand même, c'est pas le lieu idéal pour un agoraphobe. Du coup j'ai pensé à un parc dans lequel j'allais souvent avec Jungkook. Il n'y a jamais grand monde à cette heure du matin, à part peut-être quelques joggeurs, des personnes âgées et une ou deux familles dont les enfants se sont levés tôt. »

Le jeune homme acquiesça de nouveau. Il pouvait distinguer malgré le vent qui soufflait à ses oreilles en cette fraîche matinée de juillet de nombreux bruits dont il ne pensait pas qu'ils lui apporteraient tant de souvenirs : il y avait les arbres qui gémissaient sous les assauts répétés de la brise et leurs feuilles qui devaient probablement danser en rythme. Il y avait des bruits de pas précipités sur ce qui semblait être tantôt du gravier, tantôt un sol plus dur comme de la terre ; les joggeurs dont parlait Jimin. Et puis, il y avait aussi des pas plus traînants, ou bien des cadences plus lentes ; les personnes âgés, les familles. Le bruit d'une poussette ou bien d'un vélo qui roulait, dérangeant l'équilibre fragile des graviers, quelques rires enfantins, des chamailleries, des gens qui shootent dans un ballon parfaitement gonflé. Il y avait un enfant qui demandait un petit gâteau à sa mère et cette dernière qui déchirait l'emballage de plastique autour du met convoité. Les voitures étaient peu nombreuses dans le coin, ces bruits désagréables et artificiels ne venaient pas déranger la nature devant lui. C'était paisible.

Jimin demeurait muet, conscient que Yoongi s'abreuvait de ces sensations lointaines. Tant de bruits se confondaient qu'il ne put pas déterminer si Yoongi était capable de tous les distinguer les uns des autres. Puisque c'était un dimanche, il y avait plus de familles qu'à l'accoutumée, néanmoins cela ne dérangeait visiblement pas l'aveugle qui tournait la tête régulièrement en direction du bruit qui l'intéressait comme si de cette façon il était capable de voir d'où il provenait, quelle en était la source.

« Comment je vais faire pour me diriger correctement ? demanda-t-il finalement.

- Tu peux rester jute à côté de moi avec une main sur mon épaule.

- C'est ridicule ça, c'est pas naturel, je vais avoir l'air bizarre...

- Bah... t'avais une autre idée ? Parce que je me vois mal t'indiquer sans arrêt « tourne à gauche » ou « un peu plus à droite », c'est encore plus ridicule...

- Je savais que c'était pas une bonne idée de vouloir sortir, » soupira Yoongi.

Il était sur le point de demander à Jimin de partir quand il sentit les doigts de l'infirmier entourer délicatement son poignet.

« Et comme ça, ça ferait pas trop bizarre ?

- Ça ferait gay...

- J'te tiens pas la main non plus.

- T'es sûr que ça te dérange pas ? s'étonna Yoongi.

- Ça on s'en fout. Est-ce que toi ça t'irait de marcher comme ça ?

- Bah... euh... oui j'imagine. »

Jimin sourit à cette réponse et se mit en marche, le poignet de Yoongi dans sa main. En vérité, il devait bien admettre que ça le gênait, mais deux raisons le poussait à ne pas s'en préoccuper : d'une part il y avait peu de monde, d'autre part si ça convenait à Yoongi, alors peu importait son propre avis, ce qui comptait le plus c'était que l'aveugle n'ait pas envie de rentrer tout de suite.

Il y avait quelques regards en leur direction, sur leur main notamment ; il y avait des visages bienveillants, d'autres intrigués, et d'autres qui n'hésitaient pas à se montrer écœurés sans même savoir la raison pour laquelle Jimin tenait ainsi son aîné.

Du bout des doigts [Yoonmin]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant