Du bout des doigts [Yoonmin]

Chapitre 36

Yoongi resta bouche-bée, incapable de parler.

Et merde.

« T'es sérieux ? lâcha-t-il au terme de quelques secondes.

- Tu pourrais au moins être heureux, ce matin tu me suppliais presque de dégager. »

Son ton montrait qu'il savait que Yoongi lui avait proposé ça par orgueil, pas parce qu'il le voulait vraiment.

« Mais... et ton boulot ?

- Tu veux dire te servir d'esclave ? »

L'aveugle ne répondit rien, Jimin avait complètement raison, son boulot, il n'avait jamais pu le faire vraiment.

« Je croyais que tu n'abandonnerais pas, ce matin tu l'affirmais fièrement.

- Parce qu'on ne s'était pas encore embrassés ce matin. »

Quelque chose dans la phrase du jeune garçon attira l'attention de Yoongi : Jimin ne rejetait pas la faute sur lui, sinon il aurait utilisé le pronom « tu ». Là, il avait utilisé le « on », il admettait que la faute avait été partagée... qu'il n'avait pas refusé ce baiser et qu'il l'avait poursuivi volontairement – du moins en quelques sortes, en tous cas il avouait que Yoongi n'était pas pleinement fautif.

« Écoute, je t'ai dit que j'étais désolé, reprit Yoongi, oublie ça, moi non plus je n'ai plus envie d'y penser. »

Ça c'était faux.

« Tu veux que je reste ? constata Jimin avec incompréhension.

- Non, enfin... peut-être, je sais pas ce que je veux. Et toi, où est-ce que tu vas aller ?

- J'ai appelé Jungkook, un ami, il sera là d'ici cinq minutes.

- Oh je vois. »

Est-ce que Yoongi devrait être jaloux ? Non bien sûr, il ne l'était pas, d'une part parce qu'il n'était toujours pas vraiment sûr d'avoir fait ce geste par amour et non parce que ce moment l'avait rendu con, et d'autre part parce que Jungkook était hétéro (bon, ça Yoongi n'en avait pas la moindre idée, mais les gays ça n'était quand même pas si fréquent, il en avait quand même déjà deux à côté de chez lui, fallait pas non plus abuser).

D'ailleurs il valait peut-être mieux pour Jimin de s'en aller, il serait tellement plus heureux loin de lui, le plus loin possible de cet appartement dans lequel il avait vécu un véritable enfer au quotidien avec lui.

Il ne pouvait pas faire autrement que le laisser partir, de toute façon il n'y avait aucun moyen de le retenir et Yoongi n'était pas encore prêt à changer ou à admettre qu'il l'appréciait plus que ce qu'il voulait lui faire croire.

Ils demeurèrent muets, aucun n'osait parler de peur de froisser l'autre ou bien de dire une bêtise. C'était peut-être mieux ainsi, pour une fois qu'ils ne s'insultaient pas, pour une fois qu'ils ne se chamaillaient pas ni ne se comportaient comme des enfants.

La sonnerie de l'interphone néanmoins y mit un terme et Yoongi voulut retenir son cadet sans oser le faire réellement. Ce dernier s'avança vers l'appareil et le porta à son oreille.

« Oui ? Kook ? Oui j'arrive, je descends t'embête pas à monter. À toute de suite. »

Il raccrocha et hésita un instant ; Yoongi se tenait là à quelques mètres de lui, aussi gêné que désemparé, et finalement le petit blond vint prendre l'autre dans ses bras, délaissant un court instant sa valise qui l'attendait près de la porte. L'aveugle fut surpris de ce témoignage d'affection, il y répondit timidement seulement.

« Porte-toi bien Yoongi, j'espère vraiment que tu trouveras le bonheur.

- Merci beaucoup. Je te souhaite de réussir gamin, tu le mérites. »