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Une fois en selle, la dame leur serra la main en caressant la crinière de Prince. Lou grimpa, hissée avec l'aide du garçon. Une fois en selle, elle afficha une mine triste en direction de Ruby et de la dame.

— Vous allez rester seule ici... ?

Olivia secoua doucement la tête, un sourire apaisant au bout des lèvres.

— Je m'en vais aussi, petite. Vous savez où vous allez, maintenant ?

Austin parcourut le journal vert et s'arrêta sur une page presque blanche :

383 rue du Lac, Montpellier

— J'ai une petite idée.

Olivia tira une nouvelle révérence devant eux. Lou frissonna d'admiration. Le garçon empoigna les rênes de Prince, le regard à nouveau perdu en direction de l'étendue sans fin que ses yeux lui offraient.

— Puissiez-vous trouver ce que vous cherchez, murmura la pianiste.

Austin lui adressa un dernier sourire compatissant, avant de presser le corps du cheval avec ses talons.

— Vous aussi.

Prince poussa un hennissement retentissant, et s'éloigna au galop, reprenant sa course acharnée sur le sable doré.

— Au revoir ! cria Lou dans un élan d'émotion.

Olivia leva discrètement sa main gauche et l'agita devant eux, le cœur serré par la solitude qui se rapprochait d'elle, à mesure que les deux vagabonds s'éloignaient.

...

— On aurait peut-être dû lui demander de nous préparer des sandwichs...

Prince était à l'arrêt, buvant au milieu d'une herbe aussi verte que marécageuse, au-dessus de la mer. Les nuages recouvraient entièrement le ciel, si bien qu'il était difficile de percevoir la moindre lueur du soleil. Impossible de connaître l'heure. Mais Austin savait une chose : son estomac était d'accord avec Lou. Il secoua la tête.

— On laisse Prince faire une pause et reprendre des forces. Si on se débrouille bien, on sera à Montpellier ce soir.

Le cheval poussa un grognement. Le garçon fronça les sourcils, persuadé que cela lui était adressé. L'étalon reprit la marche au pas, enfonçant ses sabots dans la mélasse. La petite fille afficha une mine dégoûtée, puis dirigea un air soucieux en direction d'Austin.

— Alors... Tu ne m'en veux pas, d'avoir écrit dans le journal ?

Il haussa les épaules et plaisanta :

— Quand il me prendra l'envie d'écrire des partitions, je t'en voudrai. Ce n'est pas le cas pour l'instant.

— Et la police ? Comment est-ce qu'on va faire ?

Il serra les dents et soupira.

— Ne t'en fais pas.

Prince posa un sabot sur la terre ferme. Le vent soufflait vivement contre eux. Mais l'étalon resta stoïque. Dans un élan d'adrénaline, il détala. Pris de surprise, Austin et Lou s'accrochèrent comme ils le purent, secoués dans tous les sens, les cheveux leur passant un nombre incalculable de fois devant les yeux.

Une heure plus tard, le cheval avançait au trot, suivant le cours d'un ruisseau tranquille, grimpant au sommet d'une vallée de pin. Malgré le temps maussade, l'air était lourd. L'animal portait les deux vagabonds sur son dos, prêt à les mener à bon port, à la sueur de son front.

Le Journal des VagabondsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant