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Mardi 14 avril.

— Allez, debout !

Avant même qu'il ne puisse ouvrir les yeux, un oreiller percuta Austin en plein dans la face. La lumière aveuglante du soleil l'éblouissait, par traversant la fenêtre sans rideaux. A deux mètres de lui, la petite fille aussi avait du mal à émerger, ce qui lui parut étonnant. Elle se mit à gémir en enfouissant sa tête dans son oreiller. Autour d'eux, une silhouette féminine s'agitait dans tous les sens. Le garçon crut un instant qu'elle soulèverait son matelas comme pour le faire chavirer. Une fois les yeux en face des trous, il reconnut Jane, qui s'était penchée sur lui, un large sourire aux lèvres.

— Allez, debout ! répéta-t-elle.

Puis, en se retournant vers la petite fille, elle pointa l'extérieur du doigt.

— On a de la chance ! C'est un jour magnifique, pour partir à l'aventure. Habillez-vous vite, on ne doit pas trainer !

Austin se redressa maladroitement, et se gratta le cou en marmonnant :

— Pourquoi on doit se dépêcher ?

La jeune fille lui jeta un regard mystérieux et haussa brusquement les sourcils.

— Une longue route nous attend.

Sur ce, elle referma la porte derrière elle et descendit les escaliers en trombe, appelant Sullivan pour qu'il leur prépare un sac avec des bouteilles d'eau et de quoi se faire des sandwichs.

— Alors, ça vient ?!

— Ouais, ouais ! rugit-il d'un air agacé.

Jane n'insista pas plus longtemps, glacée par l'air de viking barbare qu'il prenait lorsqu'il montait le ton. Elle s'engouffra dans la pièce sombre, menant à la douche, et prit une pile de vêtements qu'elle inspecta, jean après jean et tee-shirt après tee-shirt.

— Non... C'est pas à moi... Ah, il y a ça...

Une fois le tri fait, elle attrapa un sac à dos suspendu à un clou planté dans le mur et fourra tout à l'intérieur. Sans perdre une seconde, elle se rua vers l'écurie et ouvrit si brutalement la porte que Prince recula et manqua de percuter Azia. Le seau d'eau était vide, et il semblait à la jeune fille que le foin éparpillé sur le sol avait diminué de moitié. Son regard croisa celui du cheval couleur de bronze. Ce dernier affichait un air faussement innocent.

— Qu'est-ce qu'il bouffe, celui-là...

Ses yeux se posèrent sur le crottin qui traînait entre ses pattes arrière. Parcourue d'un frisson de dégoût, elle grimaça.

— Ouais... Tu m'étonnes.

Au premier étage, Austin et Lou descendirent les marches d'un pas nonchalant, baillant sans cesse l'un après l'autre, à chaque enjambée. Sully jeta le sac remplit de bouteilles au garçon :

— Réflexe !

Celui-ci s'accroupit pour le réceptionner, écrasé par le poids insoutenable du bagage. Il l'enfila sur son dos en grognant :

— Bon Dieu... Y'a un paquet de flotte, là-dedans !

Le jeune au bonnet gris renifla bruyamment et croisa les bras en jetant un coup d'œil au soleil, dehors.

— Vous en aurez besoin. Une fois sortis de la ville, vous ne verrez plus l'ombre d'un commerce pendant une voire deux nuits. Alors, estimez-vous heureux !

Il tendit un sac junior à Lou :

— Mets ça sur ton dos, princesse. Ce sont les sandwichs que je vous ai préparés.

Le Journal des VagabondsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant