La photo

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Lundi 22 février

Rhadamanthe reposa son verre sur un coin vide de son bureau. Même rentré chez lui, le juge continuait de travailler sur ses dossiers. Il parcourait les différentes notes qu'il avait prises, et notamment celles de son entrevue avec Dante, notes qu'il laisserait à Valentine pour qu'il les mette au propre. Le juge avait toute confiance en son secrétaire. Sinon il ne serait pas là. Sauf pour deux ou trois bricoles. Valentine n'avait pas non plus besoin d'être au courant de tout ce qu'il faisait. Il avait une vie privée tout de même !

Enfin, il se saisit du courrier qu'il avait ramené du tribunal. Il parcourut rapidement cinq ou six lettres mais la suivante attira particulièrement son attention. L'enveloppe marron de format A4 n'était marquée que de son titre et son nom : Juge WYVERNE. L'enveloppe avait donc été déposée directement au tribunal. Rhadamanthe la tourna un moment entre ses mains puis il se décida à l'ouvrir. Sans surprise, il trouva une feuille à l'intérieur. Encore un qui cherchait à l'intimider. Il recevait régulièrement des menaces mais ça ne l'empêchait pas de continuer.

Ah non, cette fois ça semblait être une photo. Il réfléchit un instant avant de la retourner. Qu'avait-il fait dernièrement pour qu'un maitre-chanteur se donne la peine de lui envoyer une photo ? Hm, non il ne voyait pas. Alors il se décida à retourner la feuille... ouuuh, celle-là, il ne l'avait pas vue venir ! Pourtant il se contenta de sourire. De replonger dans ce moment, même. Arlès. Il était avec lui sur cette photo en pleine rue. C'était un peu après qu'il soit sorti du poste de police, après sa discussion avec Dante. Le juge avait eu la surprise de rencontrer son amant. D'un seul coup très désireux d'un rapprochement plus intime, celui-ci avait voulu qu'ils se retrouvent à l'hôtel pour un petit cinq à sept. Mais Rhadamanthe avait refusé, ne voulant pas saccager autre chose que son salon ou sa chambre. Il avait vu, à la mine de son amant que cela lui déplaisait fortement, prétendant que le juge ne voulait pas que leur relation soit dévoilée. A peine sa phrase finie, Rhadamanthe avait pris possession de la bouche de son amant, laissant la main de ce dernier descendre le long de son dos pour se saisir de sa fesse malgré son pardessus. Le juge avait alors glissé un trousseau de clés dans la main restée libre d'Arlès en l'invitant à l'attendre chez lui. Et une fois dans l'intimité de sa maison...

Rhadamanthe releva subitement la tête, la sonnerie du téléphone l'avait brutalement arraché à sa rêverie. Celui qui l'avait dérangé dans l'évocation de son souvenir allait en prendre pour son grade ! Mais il n'eut pas le temps de dire quoique ce soit.

- Bonjour, juge Wyverne. La photo vous plait ? lui demanda une voix déformée à l'autre bout du fil.

Le juge plissa les yeux. Ce type connaissait son numéro de téléphone personnel ! Il devrait voir ça en allant au tribunal demain. Mais au moins, il avait le cran d'être direct. Dommage pour la voix, ça lui gâcherait certainement tout son plaisir.

- Le cliché est assez bien réussi, se contenta de répondre le juge de son ton habituel.

- Content que cela vous plaise. Maintenant si on parlait des conditions de sa non-diffusion.

Bien, droit au but. Pas de perte de temps. Maintenant, mettre les points sur les i.

- Visiblement, tu n'as pas bien compris, p'tit con. J'assume entièrement mon homosexualité. Si ça n'avait pas été le cas, je n'aurai jamais embrassé mon amant en pleine rue et la photo que je tiens entre les mains n'existerait pas. Alors tu peux la diffuser si ça te fait plaisir et par les médias que tu veux. C'est le cadet de mes soucis, l'opinion des autres, je m'en moque comme de l'an quarante. Des menaces et autres tentatives de chantage, j'en brûle facilement une dizaine par semaine dans ma cheminée (mensonge, il les gardait précieusement dans un classeur, comme des trophées !). Et je ne prendrais même pas la peine de savoir qui tu es (mensonge aussi, dès son arrivée à son bureau, il demanderait une recherche). Je vais même être bon avec toi et te donner un petit conseil : ne t'avise surtout pas d'envoyer cette photo à mon amant (enfin, s'il le trouve), parce que lui prendra la peine de te retrouver, uniquement pour le plaisir de te refaire le portrait...

Tiens, le maitre-chanteur avait raccroché. Rhadamantheregarda un instant le combiné du téléphone qu'il tenait encore à la main. Nonmais, quel malotru ! Le juge n'avait même pas eu le temps de lui demander uncadre pour exposer sa photo sur son bureau !

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