Ces livres

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Il était silencieux. Comment une telle masse pouvait-elle être aussi silencieuse. Ce n'était pas un chat pourtant, ça Kanon en était sûr. Il avait laissé Mô à regret et il ne pouvait pas s'empêcher de s'inquiéter pour elle. Mais d'un autre côté, la jeune fille avait raison, la priorité, c'était d'abord de retrouver les enfants. Et puis, il avait aperçut une ombre. Mais pas une petite ! Seulement, il n'avait pas pu définir ce que c'était. Alors il tentait de la retrouver. Si c'était une sorte de chien de garde, genre 5XL, il allait certainement s'en prendre à quelqu'un. Et forcément, ça ne tomberait pas sur ce Tockel ou sur la guêpe ! Ça serait trop beau ! Non, ça serait pour l'un d'eux, en espérant que ce ne soit pas l'un des enfants. Mô avait vraiment raison, il fallait absolument retrouver les garçons.

Ou bien suivre cette chose. Enfin, si Kanon parvenait à retrouver sa trace et le sol rocailleux ne l'aidait pas. Il ne voyait aucune empreinte, aucune trace du passage de cette chose qui pourrait indiquer au bleuté une taille approximative de la chose.

Il regarda un instant cette longue vallée désormais remplie d'eau. Kanon avait eu chaud. Il s'apprêtait à descendre lorsqu'il avait entendu un étrange grondement et il avait bien fait de ne pas aller plus bas. L'eau avait brusquement repris la place qui était la sienne. Ça, c'était avant d'apercevoir cette ombre. Maintenant, il était coincé de ce côté de la rive avec certainement une bête monstrueuse en liberté. Kanon ne traverserait pas ce fleuve. D'abord à cause de tous les débris que charriait le cours d'eau mais aussi parce qu'il ne semblait pas y avoir grand-chose. Alors que de ce côté, il avait des constructions. Bon, elles étaient loin mais au moins il était sur la bonne rive, apparemment, et toujours du même côté que Mô, il pourrait toujours la rejoindre.

Du moins, il l'espérait. Pour l'instant, il continuait de longer le fleuve en allant vers ce qui lui semblait être l'amont où du moins, c'était de là qu'était venue l'eau. Peut-être trouverait-il des habitations. Ou bien des ruines parce que les gens lui semblaient plus morts que vivants. L'eau du fleuve montait doucement mais sa surface était devenue paisible, sans une ridule. Son eau opaque avait vite retrouvé son calme. Trop vite selon Kanon surtout vu la masse d'eau dont il s'agissait. Le fleuve était large, très large et la violence avec laquelle elle avait reconquit son lit. Et tous les débris qui jonchaient le fond du fleuve, le retour violent de l'eau aurait dû les balayer ! Mais ils semblaient plutôt avoir été absorbés par le fleuve comme pour les emprisonner, aucun ne dépassait de la surface. Rien. Le fleuve les avait totalement absorbés.

Accroupi au bord de l'eau, Kanon se tâtait. Devait-il mettre la main dans l'eau ? Non, il avait plus important à faire. Il s'éloigna sans voir qu'à la surface de l'eau, un visage s'était dessiné. Le bleuté s'était éloigné du fleuve, pas qu'il l'est vraiment choisi. Le relief le lui avait imposé, une haute falaise se profilait droit devant. Le détour était donc obligatoire et Kanon commença l'ascension escarpée du relief. Il ne pouvait s'empêcher de se demander pourquoi des hommes étaient venus s'installer ici et ce qui c'était passé. Désormais, la terre stérile ne donnait plus rien.

Il s'arrêta d'un seul coup. Il avait une impression étrange. Comme si...

En se retournant, il fut saisi. Derrière lui une âme tentait péniblement de s'extraire du fleuve. Mais celui-ci ne semblaient pas décidé de s'en séparer. Kanon les auraient bien aidé à en sortir. Mais devait-il seulement le faire ? Il redescendit. Au moins, il le hisserait sur la berge. Après... il avait toujours les enfants à trouver et le reste du groupe.

Kanon restait un moment immobile sur la berge. Comment devait-il s'y prendre ? Il chargea de bon appui avant de se pencher pour se saisir de l'âme. C'était un peu étrange de se dire que c'était l'âme de quelqu'un qu'il s'apprêtait à prendre. Il aurait plutôt cru qu'elle serait immatérielle, insaisissable. Mais non, il pouvait la toucher. Il s'apprêta à la saisir lorsque quelque chose lui attrapa le poignet. Une autre main ! Sortie tout droit du fleuve ! Et une autre qui venait d'agripper l'âme que Kanon était venu aider. Non mais franchement ! Quelle idée d'avoir voulu l'aider ! Il était trop con des fois ! Il tenta de se dégager. Mais la première âme s'était saisie de ses chevilles pour ne pas être de nouveau avalée par le fleuve. Kanon se sentait glisser. Plus il se débattait, plus ces deux âmes l'entrainaient avec elles. Et derrière elles, le bleuté pouvait voir apparaître d'autres silhouettes. Si celles-là parvenaient à l'attraper, il était cuit.

Son ciel s'obscurcit d'un seul coup et une ombre plongea sur lui.

-¤-¤-¤-¤-

Minos était restée un moment immobile après le départ de Rune, à regarder le petit paquet, posé dans sa main. C'était encore pour elle, pour Mô. Depuis qu'elle était arrivée, Rune était souvent avec elle. Et à elle, il lui parlait. Avec Minos, il ne disait pas grand chose. A coup sûr, la Tibétaine savait davantage de chose sur son ami qu'elle-même, alors que Minos le connaissait depuis plus longtemps. D'ailleurs elle avait appris plus de choses ces derniers mois, depuis qu'il fréquentait ses « amis » que depuis qu'elle le connaissait. Tout ça parce qu'elle avait mal rangé un livre à la bibliothèque. Les livres, toute la vie de Rune.

Elle se tourna pour regarder les étagères sur lesquelles les livres étaient posés avant qu'elle ne les éjecte. Elle s'immobilisa, fixant son regard sur la Mort. Thanatos était debout près de la bibliothèque. Il lisait l'un des livres que Minos n'avait pas jeté au sol.

- Je me souviens de cet homme, commenta-t-il plus pour lui-même que pour Minos. Il s'est battu longtemps contre moi, contre sa maladie mais finalement, je finis toujours par gagner. (Il tourna la page). Oh ce petit intrépide ! Une pirouette de trop et sa mère a suivi dans les mois qui ont suivi. Elle s'est totalement abandonnée. Et le naufrage de ce bateau dans les eaux glacées... particulièrement distrayant. Certains m'ont résisté longtemps. C'est incroyable comme certains mortels peuvent s'accrocher à la vie.

Minos restait sans bouger à détailler la Mort évoquer ce qui semblait être des souvenirs. Les yeux rivés sur le livre, Thanatos parcourait les pages, se laissant aller à ses évocations. Parfois Minos le voyait froncer les sourcils comme s'il peinait à se souvenir. Enfin il se décida à poser le livre sur l'étagère.

- Sais-tu à quel point ce livre est précieux ? Tu me déçois de laisser ainsi tes sentiments troubler ton jugement.

Il se tourna vers la jeune fille. Son regard n'était pas exactement le même que celui qu'il avait lorsqu'elle avait vu dans la boutique de son grand-père. Il semblait blessé mais aussi plus froid. Minos sentit sa respiration devenir plus superficielle et rapide à mesure que la Mort s'approchait d'elle. Comment savoir ce qu'il avait en tête. Rien ne transparaissait dans son regard métallique. Il s'arrêta juste devant la jeune fille. Il sentait sa peur et il aimait ça. Il aimait que l'on puisse le craindre. C'était un sentiment de dominance qu'il lui plaisait beaucoup. Il se pencha encore vers elle. Minos pouvait presque sentir son souffle sur sa joue. Elle ferma les yeux en tentant de l'imaginer éloigner les bêtes sauvages de la petite fille abandonnée en pleine forêt. Mais elle n'y parvint pas. Elle manquait cruellement d'imagination. Mais la présence de la Mort...

Elle se souvint subitement où elle avait déjà ressenti cette présence, lorsque son grand-père était mort. Elle avait entendu Eaque dire à Tockel qu'elle pouvait éloigner la Mort. Mais elle doutait de pouvoir le faire sinon il ne serait pas aussi près d'elle, sa présence était à l'opposé de celle douce de Mô. Malgré sa peur, Minos ne tressaillit pas lorsque Thanatos posa le revers de sa main sur sa joue.

- Mon frère est mort.

Minos le savait. Elle avait entendu Eaque et Tockel en parler. Elle avait très bien reconnu Hypnos à la description qu'ils avaient faite de l'homme mort à la place de Mô. Mais en entendant Thanatos parler ainsi, Minos eut l'impression qu'un souffle glacial se propageait dans tout son corps. Voilà pourquoi son regard avait changé. Le décès d'Hypnos l'affectait parce qu'elle ne doutait pas que ce soit de lui dont il était question. Il serait mort pour protéger Mô. Tockel avait été suffisamment furieux que son homme de main ait changé de cible de son propre chef. Assassin qui avait ensuite été...

Minos se recula de deux ou trois pas pour fixer Thanatos. C'était lui ! Elle trébucha sur les livres restés au sol. Elle se retrouva les fesses par terre mais son regard n'avait pas quitté l'homme en face d'elle.

- Sais-tu où se trouve Tockel ?

Tockel ? Thanatos l'avait cherché. Habituellement, il pouvait trouver n'importe qui. Il pouvait rejoindre n'importe quel mortel. Mais pas Tockel. Comme Hadès, il ne parvenait pas à percevoir sa présence.

- Quelque part ici, parvint à lui répondre Minos dans une respiration saccadée. Il est rentré en même temps que moi.

Thanatos s'accroupit devant la jeune fille avant de se pencher vers elle pour lui chuchoter à l'oreille :

- Je veux que tu portes la vie que je vais te donner, celle d'Hypnos.

Etablissements Scolaires Sanctuary (Saint Seiya)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant