.134.

62 17 14
                                    

Quelques jours plus tard...

.Soraya.

Allongé sur le ventre, face à la baie vitrée donnant vue sur la plage, j'observais à la dérobée Nathann assis sur le sable fin, torse nu, short de plage et ses cheveux en bataille que désordonnait encore plus le vent. Dayina fièrement jouait avec les vagues. À leur côté, se tenait Camelo le pêcheur favori de grand-père, vendeur de lambis. Ils discutaient et se régalaient de ces délicieux fruits de mer qu'ils puisaient depuis un petit sceau noir. Ils faisaient de grands gestes en levant les yeux vers le ciel. Il aura bientôt trente ans dans quarante-huit heures et dame nature était d'humeur à l'offrir des journées radieuses en commençant dès ce matin. Les nuages s'évacuaient, les arbres étaient tendres et se laissaient flotter par la fine brise marine. La température était douce et le ciel dégagé assistait à l'envolement des troupeaux d'oiseaux migratoire. Il releva la tête vers ma direction afin d'enseigner quelques choses à Camelo ! Rapidement, je saisis le vieux journal de mon aïeul qui me servait de camouflage afin de ne pas être démasqué. Je faisais mine de l'ignorer du mieux que je pouvais dès qu'il était dans les parages. J'avais jeté exprès ses fleurs à la poubelle sous son nez. Il avait arqué ses sourcils sans rien dire. Dès qu'il arrivait, je sortais, et dès qu'il sortait, je rentrais. À table, s'il fallait que je serve quelque chose, je prenais le soin de servir papi et Dayina. Je m'amusais beaucoup avec elle on faisait de la peinture, jouait au puzzle et des dessins sur bristol ensemble. Elle aimait dessiner et j'avais au moins quelqu'un qui valorisait mes œuvres d'arts. S'il me rendait un service, je lui remerciais sèchement, si nous étions tous ensemble avec grand-père et Dayina ou parfois les amis de grand-père, je l'ignorais complètement comme si dans ma tête j'avais des tiroirs où j'avais entassé la connerie qu'il avait involontairement faite avec l'autre. Je l'en voulais, mon côté féminin de femme jalouse avait prit le dessus. Il remit sa tête dans sa position initiale, je repris mon poste tout en feignant de m'adonner à une minutieuse lecture, un texte d'Emeline Trouillot intitulé "De l'autre côté de la rive ". Brusquement, mon journal me fit arracher des mains et je fus enveloppé d'un regard légèrement excédé de grand-père.

- Et tu comptes bouder combien de temps ?

Je roulai des yeux.

- Grand-père rends-moi mon journal. Je lis.

- Tu lis à travers la baie vitrée ? Tu as l'air d'une gamine Soraya.

- N'importe quoi et tu veux que je lui dise quoi ?

Il soupira.

- J'aurais bien aimé manger une salade de fruit mais la rumeur dit que le soir, le réfrigérateur se fait vandaliser par une grosse baleine.

Je ris.

- Je ne suis pas si grosse grand-père !

Il me caressa les cheveux.

- Tu sais bien que non. Le livreur de fruits ne viendra pas aujourd'hui. Tu pourrais demander à Nathann de t'accompagner au magasins de fruits frais qui se trouve à vingt minutes d'ici.

- Il y a un magasin de fruits ici?

- Lauture a mis sur pied une boutique artisanal de produits sains et locaux avec des commerçantes de fruits et de légume triées sur le volet. Vas-y Soraya. Marché te fera du bien que de rester vautré dans ce puff à l'espionner ! Entre temps tu trouverais quoi lui dire. Tu veux bien?

Il reprit son journal et cala son portable à l'oreille en ouvrant la baie vitrée, ce qui attira le regard de Nathann. Déjà je ne savais plus ou me mettre. Grand-père abandonna la pièce en décrochant son portable. Je me levai à mon tour et m'aventurai à l'extérieur en décidant qu'il était temps que j'arrête d'être ridicule. Je traversai la terasse auprès duquel s'étendait des hibiscus jaunes. Le verdoyant des feuilles qui abritaient les murs en pierres décoratives se laissaient dodiner par le vent tiède, les oiseaux sortaient timidement de leur nids et débutaient leur cahe-cache habituel. Les longues mèches des noix de coco et des palmiers se tenant fièrement de chaque côté de la villa de grand-père imitaient les valses désordonnées de mes cheveux. Les rayons du soleil aveuglaient à peine mes pupilles, caressaient ma peau tandis que les vagues s'affessaient timidement sur le sable. De mes paires de tongs, toute décidée, je voulu aller le rejoindre mais c'est lui qui vint vers moi en portant Dayina assise autour de son cou. À ma grande surprise, il s'arrêta à ma hauteur, posa Dayina près de moi, m'ignora complètement et poursuis son chemin à l'intérieur. La jolie petite caraïbéenne me tendit quelques coquillages que je pris toute déstabilisée par l'attitude de son papa. J'exhalai profondément et conduis mes pas vers la véranda où il caressait Vanilla.

.Antrav.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant